La Chronique de Koud'pied o'Kick

Koud'pied o'Kick est un journaliste professionnel écrivant actuellement pour un grand hebdomadaire. Vous le retrouvez chaque mois exprimant son opinion sur un monde qu'il affectionne énormément : la moto, avec un amour immodéré de la controverse, à nul autre pareil.

KroniK de mars

Tentations passéistes

Pensée du mois : si ta première tentative est un échec, peut-être faut-il considérer que le parachutisme n'est pas fait pour toi.

Je lis toujours avec intérêt les articles consacrés à l'Enfield Bullet. Outre le fait qu'elle enterre n'importe quelle sportive, je lui trouve un charme certain. Ce que je lis moins souvent, en revanche, c'est qu'il s'agit vraiment d'une ancienne mais que l'on peut acheter neuve. Comprenez par là que 120 est sa vitesse de pointe, et qu'un petit 90 constitue une bonne vitesse de croisière une fois rodée, ce qui induit un décalage certain par rapport aux conditions de circulation actuelles. De ce point de vue, elle n'est en rien différente d'une bonne 125, qui se conduit un oeil devant et un oeil dans les rétros.

A la lecture de ces articles, j'ai toujours peur qu'un motard se méprenne et ne la considère ni plus ni moins comme une SR 500 à peine plus vieille. Sans même parler de la partie cycle, et en particulier des freins, le moteur ne tiendrait pas du tout le choc d'un tel traitement. Cela n'a rien à voir avec la qualité de fabrication (apparemment, les usines indiennes ont fait beaucoup d'efforts de ce côté là), mais tout simplement à cause de la conception même de la mécanique. A son guidon, on revient quarante ans en arrière. C'est un peu comme rouler avec une 2CV 4 : c'est sans doute très marrant, mais pour aller bosser tous les jours, mieux vaut prendre une Tringlo. Rouler en Bullet, faut oser, et ça se mérite. Rien à voir avec une W 650, à laquelle il lui arrive d'être comparé.

Et voilà t'y pas que Ducat nous fait le coup de « revival » avec ses « SportClassic ». Mouais. Si j'étais vraiment chien, je dirais qu'il s'agit d'impostures motocyclistes. Qu'elles singent les anciennes sans prendre le moindre risque. Qu'une fois qu'on a gratté le vernis, il ne s'agit ni plus ni moins que de Mostro modifiées, affublées de quelques plastiques spécifiques. Qu'à s'en tenir à des artifices esthétiques, on se coupe du charme d'utilisation de vraies « anciennes ». Qu'une 900 SS nécessite un mode d'emploi particulier qui la rend unique, par rapport à ces ersatz policés.

Mais il faut vivre avec son temps, donc je modère mes propos :

Ces machines sont une insulte à tout amateur de moto classiques qui se respecte. Leur logique relève de cette même manie qui consiste à conserver les façades des immeubles haussmanniens pour « sauver les apparences » et limiter la prise de risque architecturale, tout en les vidant de leur substance. Ici, par quelques courbes, Ducat' tente de faire revivre une époque révolue, une époque où une Ducati n'était pas comme aujourd'hui un bête produit de consommation courante, crédit à 6,25% TEG à la clef. Les SportClassic n'assument pas une seule seconde leur héritage, elles le travestissent pour servir non pas une passion, mais bien plutôt des objectifs commerciaux que Ducati partage avec le plus humble des producteurs de chaussettes de la planète. Côté prise de risque, c'est zéro. C'est comme la énième reprise d'un vieux film : ça, pour sûr, les effets spéciaux sont plus léchés... mais ce qui passait pour une prouesse, une performance, un défi, un cri de révolte à l'époque tombe à plat aujourd'hui. On n'innove pas, on ajoute simplement un peu de paillettes sur l'emballage. Cet auto-plagiat manque décidément de panache. Emballez, c'est pesé.

A part ça, la Sport est plutôt marrante. La référence des pots peints en noir échappera sûrement aux plus jeunes. Pour pousser la logique un poil plus loin, il aurait été amusant d'avoir aussi le dessous du réservoir peint de la même couleur. Mais là encore, rares sont ceux qui y auraient été sensibles. J'apprécie le retour d'une vieille typographie sur les réservoirs, ce simple détail y fait beaucoup. En revanche, j'ignore si les rétros en bout de guidon pourront être homologués en France. Si Ducat m'en offrait une, c'est sans doute celle-là que je choisirais. M'enfin, ma référence ultime reste tout de même les jolis monos 250 ou 350, avec leur mignon cul de selle et leur réservoir minimaliste. Aux chiottes le confort ! En série limitée à 1.000 exemplaires, m'sieur Ducat', steuplé ?

Les malheurs de mon gromono à moi

Traumatisé par l'arrivée sur le marché de la XT 660 à qui il manque plein de trucs pour être un vrai gromono, je n'ai pas roulé pendant un mois avec Virgule (ouais, ouais, fallait bien trouver une excuse moins bête que : il fait froid, il flotte et je vieillis). Du coup, le redémarrage a pris trois semaines. Que je vous explique.

A la première tentative de remise en route, forcément, la batterie déclare forfait assez vite. Logique. Je démonte, ramène la batterie au chaud, recharge et remonte.

- Le démarreur : « Gné gné gné »
- Le moteur : « Cause toujours »
- Le démarreur « Gné gné gné »
- Le moteur : « Hein ? kesstu dis ? »
- Le démarreur : « Gné gné gné gné gné »
- Le moteur : « T'as de la discussion, toi, ça fait plaisir »
- Le démarreur : « Gné gné gné... gné... gné »
- Le moteur : « Fait un peu frisquet ce matin, tu trouves pas ? »

Voilà, à tous les coups, j'ai noyé le moteur. Et comme je n'ai pas de clef à bougie adaptée à Virgule, je suis coincé. Séance de poussette jusqu'à chez le concessionnaire le plus proche. Pour moi, un coup de clef, on fait sauter la bougie, on décrasse un coup, on met la batterie sur une nourrice et pom pom pom. C'est fou comme je suis optimiste.

Un jour passe. Pas de nouvelles.

Un 2e jour passe. Coup de fil :

- Le mécano : « heu... on comprend pas, on a tout vérifié, elle démarre pas ».

Moi qui pensais que ça allait simplement me coûter un tallebin de 10 euros glissé délicatement dans la paluche du mécano pour ses 15 minutes de taf', ça va ptètre pas ressembler à ça...

3e jour. Coup de fil :

- Le mécano « bon, on a un problème, là, ton moteur ne comprime pas »

Sueur. Piston percé, culasse fendue, soupape grillée, siège en petits morceaux sur le piston ? Gamberge et suppositions.

Comme ce concessionnaire ne fait pas Honda, difficile de lui en demander plus. Donc direction le spécialiste le plus proche. Renseignements pris, le moins loin et disponible est à 10 bornes à vol d'oiseau de chez moi. Ca va ptete poser un problème de pousser jusque là... Bon... Va falloir passer par la case dépanneuse alors. 115 euros plus tard, nous voici à pied d'oeuvre. Serrage de paluche au chef d'atelier : ça tombe bien, c'est un mordu de gromono Honda. Sur l'établi trônent un moteur de XR et un autre de Dominator, en cours de remontage.

Samedi passe, pas de nouvelles. Lundi, c'est jour de fermeture. Mardi :

- Le chef d'atelier : « ton moteur comprime pas »
- Moi : « ça je le savais déjà »
- Le chef d'atelier « en démontant le carbu, on a vu qu'une des soupapes fermait pas »
- Moi : « aïe »
- Le chef d'atelier : « faut déculasser »
- Moi : « d'ac »
- Le chef d'atelier : « je te rappelle ».

Mercredi, coup de fil :

-Le chef d'atelier : « y'avait de la flotte dans ta chambre de combustion, le cylindre a rouillé, l'eau a décollé la calamine du piston qui est venue bloquer les soupapes. Faut tout changer »
- Moi : « de l'eau ? »
- Le chef d'atelier : « ouais, de l'eau, j'ai pas compris comment. Faut réaléser »
- Moi : bon, d'ac, au boulot ».

Maintenant, je sais ce que ça coûte une réfection haut moteur sur un gromono. Moins cher que sur un 4 en ligne, mais tout de même.

Moralité : roule avec ta bécane au lieu de faire des économies de compteur kilométrique ! Ca coûte moins cher !

Koud'pied o'Kick, - le 1er mars 2004

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