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Survivalisme sur deux roues

Se débrouiller plus ou moins tout seul sur un bout de terrain. Oui mais… avec quelle moto ?

Dans mes projets inavouables de reconversion figure en bonne place l'idée de me débrouiller plus ou moins tout seul sur un bout de terrain. Oui mais… avec quelle moto ?

Survivalisme sur deux roues (c) photo : Harrison Haines
Survivalisme sur deux roues (c) photo : Harrison Haines

C'est le côté gênant de certaines utopies : à chaque fois, je démarre au quart de tour –pire qu'une Matchless calée aux petits oignons. Une petite maison en lisière de forêt, un terrain dont je peux faire le tour à pied en dix minutes, 160 Ah dans deux batteries AGM branchées sur du polycristallin de récup', une bonne paire de bottes et zou !

J'aime bien l'idée du mélange cyberpunk des traités de botanique du XIXe siècle (le français d'avant 1800 peut rebuter) et de la feuille de calcul. Faire ses rillettes à la maison, certes, mais prévenir les copains que c'est prêt par SMS. La faux, c'est bien, mais une tondeuse fait aussi une super broyeuse.

Tout est une question de choix : qu'est-ce que je garde, qu'est-ce que je considère comme trop compliqué ou impossible à réparer ? Les bougies et les lampes à kérosène sont trop dangereuses : je garde les ampoules à leds. Les robots électriques consomment trop de jus en plus d'être fragiles : vive les ustensiles à main et notamment les très pratiques broyeurs.

Dans certains domaines, je fais donc un ou deux pas en arrière. Jusqu'où et-ce que je rembobine l'histoire de la moto pour trouver un véhicule à ma mesure, vu l'abîme de mon ignorance en mécanique ? Éliminons d'emblée l'injection électronique : fiable, certes, mais impossible à réparer. Je garde en revanche les allumages à transistors : les vis platinées, ça fonctionne, mais j'aimerais pouvoir démarrer par tous les temps.

Je trouve l'inspiration chez les maîtres en la matière : les Africains, habitués à tout faire tourner avec n'importe quoi et un bon coup de marteau. Pour la mécanique de précision, je prendrai des cours dans les échoppes de Delhi ou de Pondichéry. Il paraît que les derniers sorciers du collecteur d'échappement viennent de Cuba.

Je suis bien sûr tenté par la mob', le couteau suisse à jantes de 16 pouces. Les pièces sont devenues rares, donc dans mes rêves un peu fous je commande un ensemble cylindre-piston-segments en alliages modernes et à l'usinage léché : cinq chevaux, cinquante-cinq de croisière, ça suffira bien pour faire des courses. Allez ! Si j'ai besoin de faire un peu de route, je prendrai un Kreidler.

Pourtant, le quatre-temps a bien des avantages : les petits monos japonais d'il y a quarante ans font mieux qu'une mob', c'est certain. Là, c'est soixante à l'heure à mi-régime en consommant deux litres et demi au cent. Je m'inquiète juste des pneus, maintenant que le 110 à l'avant a cessé de stupéfier.

Une Honda CM, alors ? Du trio japonais (CM, DR/GN, SR/XT) c'est celle que j'aime le moins. Heureusement, il me reste les CG et XLS. Peut-être que j'aurai besoin de la garde au sol un jour de crue.

Dans un contexte comme celui-là, je trouve déplacé de rouler sur une Duke ou une MT-03. Elle ne cadrerait pas dans le paysage. Il me faut du rustique, du documenté, avec un minimum d'électronique.

Ici, je considère la notion de valeur : entre une GSXR1000R gratuite et une XT 350 payante, je prends cette dernière, évidemment. Que ferais-je de la Gex' ? Un groupe électrogène de luxe en boulonnant une génératrice en sortie de vilebrequin ?

Tu vas me poucerouger si j'ajoute un paragraphe sur l'électrique ? L'électrique, en attendant qu'ici ça soit devenu l'Afrique et que les fils des bobinages servent à faire des bijoux pour l'anniversaire des gamines –elles en seraient ravies. Je me dis qu'il reste dix ans, quinze peut-être, pour profiter de l'électrique, avant qu'on revienne aux environs de 1890 et aux machines de Wimshurst, entraînés par des chevaux ou des moteurs de mob'.

Il y a un côté rassurant à savoir que je ne vais pas rester comme deux ronds de flan devant une mob' qui refuse de démarrer. La mob', c'est tout fastoche à bricoler. Maintenant, il faudrait que je monte un cran au-dessus : la 125 ou la 250 quatre-temps à carbus. Si je sais faire avec une 125, ya pas de raison que je recule face à une 600, non ?

Sous l'appentis, je vois bien une XT 500 en 12 volts. Ça ne roule pas beaucoup plus vite qu'une bonne 125 moderne, mais c'est plus romantique.

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Commentaires

XM

après, si l'éternité de ta réclusion n'excède pas quelques années, tu peux quand même partir sur de l'allumage électronique, voire de l'injection, en faisant un peu de stock stratégique pour remplacer le module qui pourrait foirer sans savoir comment ça fonctionne là-dedans. juste savoir comment le brancher s'il faut le changer.
un africain (burkinabé) m'a expliqué comment il faisait des segments pour don DTLC à partir de fil de grillage, mais il m'a dit aussi que quand tu commences à bricoler comme ça, il faut sans arrêt y revenir.

10-11-2020 13:15 
1364

C'est plus une DTLC, là, c'est plutôt une DT... rin... C, non ? clin d'oeil

10-11-2020 18:45 
la carpe

Marrant cette méfiance invincible envers l'électronique embarquée. Pourtant, s'il y a bien un progrès qui a spectaculairement fiabilisé les véhicules, c'est celui-ci. Au point que depuis une ou deux décennies, ça ne tombe pour ainsi dire plus jamais en panne, et quand ça foire, c'est mille fois plus souvent un problème de connectique que d'électronique.
Mais bon, c'est comme ça, quand un truc est vraiment bien et sans vrai défaut, on trouve ça louche, on cherche des embrouilles et des vices. Ça le fait pour les vaccins, les ondes GSM et les bon gros steaks... y en a toujours qui trouvent ça suspect.

10-11-2020 20:21 
L'iguane

Cette méfiance elle vient juste du fait qu'on avait des engins à la fois fiables et performants (fin des 90's - début 2000), et que depuis l'arrivée de l'électronique de pointe nous sommes à la merci du moindre petit bug, y compris sur un véhicule neuf.
Avant, quand tu voyais un véhicule sur la BAU, c'était une poubelle. Si c'était un véhicule en bon état, soit il avait crevé, soit il n'avait plus d'essence.
Aujourd'hui, il est fréquent de voir des véhicules très récents en train d'attendre la dépanneuse. Et ce ne sont pas des cas isolés.
La dernière fois que j'ai fini mon trajet en dépanneuse, c'était en 2017 sur une voiture d'1 an et 12.000 bornes. Le remède à la panne : une reprogrammation du turbo.

Autre point qui fait exclure l'électronique dans une optique survivaliste : son côté irréparable.
Prends un 500 XT et un trail récent (GS, KTM, Africa, on s'en fout), plonge-les tous les deux au fond d'un étang, ressors-les, sèche-les, et dis-moi laquelle redémarre.

Tu dis que l'électronique a fiabilisé les véhicules, je ne suis pas d'accord. L'électronique a apporté de la facilité, de la stabilité, du confort, mais certainement pas de la fiabilité. La fiabilité était déjà là.
Des carbus, un câble d'accélérateur, un allumage à rupteurs, oui ça se dérègle, oui ça marche sur une plage limitée, oui ça demande qu'on y mette les mains, mais si on se plie à ces conditions c'est infaillible.

10-11-2020 23:03 
olivieux

Pour moi ce sera ma Suzuki GT550 (3 cylindres 2T) dont j'ai changé les segments dans le camping d'Agadez et qui ne m'a jamais laissé tomber

11-11-2020 10:56 
1364

Raaah ! C'était l'bon vieux de(ux) temps! clin d'oeil

11-11-2020 12:43 
Aristoto

Un rêve de bcp cette petite maison en lisière du bois… et un bon petit trail... KLX 250 ?

11-11-2020 22:09 
KPOK

quitte à rêver : DTR 200.
je brûlerai un cierge à Sainte Greta en rémission de mes péchés.

12-11-2020 12:34 
la carpe

Franchement, la 500 XT, pas besoin de la mettre dans l'eau, même à sec elle démarrait pas toujours, elle a pété environ 1 millier de chevilles droites, et a laissé en rade d'innombrables aventuriers d'opérette.
Honnêtement, plus personne ne se demande en prenant sa bécane le matin "est-ce qu'elle va démarre?", plus personne ne trouve remarquable de faire plus de 500 km dans la journée sans un raté, sans un hoquet, et de recommencer le lendemain.
Quand aux 2-temps, ceux qui en ont eu avec gestion électronique ont beaucoup moins serré ou percé de pistons.
Et oui, fiabilisée la pétrolette, même si ça fait mal à la nostalgie.

12-11-2020 18:22 
la carpe

Quant aux bagnoles en panne sur les bords d'autoroute, j'en connais rarement la cause, mais 1) à 90% c'est des Renault, au point que c'en est suspect, et 2)"reprogrammation de turbo" alors là, mystère et boule de gomme !

12-11-2020 19:23 
L'iguane

Citation
la carpe

Honnêtement, plus personne ne se demande en prenant sa bécane le matin "est-ce qu'elle va démarre?", plus personne ne trouve remarquable de faire plus de 500 km dans la journée sans un raté, sans un hoquet, et de recommencer le lendemain.

C'était déjà le cas avant l'arrivée de l'électronique à outrance.

12-11-2020 19:33 
L'iguane

Citation
la carpe
à 90% c'est des Renault, au point que c'en est suspect,

Si seulement c'était si simple...

12-11-2020 19:34 
 

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