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Histoire constructeur : Ghezzi Brian

Un constructeur à part entière qui sublime les Moto Guzzi en les rendant légères et performantes

Roadster, sportive, supermotard, machine de course : une expertise variée et adoubée par le constructeur

Alignement de Ghezzi Brian SupertwinsLes dernières fois que l'on a pu fortement associer les termes "Moto Guzzi" et "sport" remontent très vraisemblablement à la magistrale (que dis-je, la sculpturale, la fantomatique, l'incroyable, la bellissime !!) 500 V8 de GP de 1955 (probablement l'une des machines de course les plus excitantes de l'histoire de la moto) et la 750 V7 Sport de 1971, qui fait référence aujourd'hui encore pour la justesse de sa ligne, la rigueur de son châssis, la cohérence de sa conception, tout comme par ses performances, car elle fut la première moto de série à taper le 200 chrono. Ceci en partant du principe qu'absolument personne ne se souvient des deux victoires de Moto Guzzi au Tourist Trophy de l'Île de Man (250 et 500 cm3). Il faut dire aussi que c'était en 1935.

Bien entendu, la firme de Mandello del Lario a essayé par la suite d'entretenir la flamme de la performance à travers différents modèles de sa gamme, mais, de la 850 Le Mans à la V11 Sport, Moto Guzzi emprunta la dissidente route de la différence qui la conduisit progressivement, mais sûrement, sur l'autoroute de l'indifférence. Au fil du temps, les sportives de la concurrence devenaient plus affutées et Moto Guzzi subissait l'héritage technologique de son architecture en V refroidi par air et de sa transmission par cardan.

Mais la passion a ceci de sublime qu'elle créent des êtres qui refusent la fatalité : Giuseppe Ghezzi et Bruno "Brian" Saturno font partie de ceux-ci.

1995 : remettre des Moto Guzzi sur la piste

Ghezzi et Brian, donc, décident de s'associer en 1995 pour optimiser les modèles sportifs de Moto Guzzi et en faire des machines de course, rien que cela ! Et la recette de Ghezzi Brian a, de toute évidence, bien fonctionné puisque leur machine remporta le championnat italien de Supertwin en 1996. Il faut dire que la machine avait été revue du sol au plafond : châssis, échappement, éléments internes du moteur, nouveaux matériaux, pièces d'habillage...

Ghezzi Brian remporte le championnat italien de Supertwin en 1996

Belle idée que celle de Ghezzi et Brian, même s'il ne faut pas remonter aux années 50 pour retrouver la trace de Moto Guzzi en compétition. Nos lecteurs les plus érudits ont probablement entendu parler d'un dentiste américain basé à Downington, Pennsylvanie : Wittner de son nom (mais plus connu sous le surnom de Dr. John). Ingénieur et pilote de talent, il a préparé ses propres Moto Guzzi dans les années 80 pour courir avec et il remporta même le championnat américain d'endurance en 1984, en gagnant 4 des 12 épreuves (dont celle de Daytona où la Guzzi prenait 270 km/h chrono sur l'anneau !) et en battant des Honda VF1000R et des Suzuki Katana kitées en 1150. Cela lui valu d'être recruté en 1989 par Alejandro de Tomaso (des automobiles du même nom, alors propriétaire de Moto Guzzi et de Benelli) pour poser les bases de la Daytona. Nul doute que la philosophie et l'approche de Dr John ont été une grande inspiration pour Ghezzi Brian ; on en reparle un peu plus bas.

1998 : des Ghezzi Brian pour la route

Le succès engendrant crédibilité et demande, Ghezzi Brian passèrent à l'étape suivante en 1998. Le petit atelier basé à Missaglia, en Lombardie, se mit à faire des préparations homologuées pour un usage sur route. C'est le modèle Supertwin 1100 qui inaugure cette nouvelle stratégie. Entre gros frein périmétrique, châssis maison, amortisseur arrière en position quasiment horizontale, trait de design quasiment horizontal : cette machine respire la vitesse !

Ghezzi Brian Supertwin de route

Au fil des années, une véritable gamme va se mettre en place. Une gamme qui ratisse plutôt large, avec des modèles tantôt basés sur les sportives tantôt sur les roadsters, avec des moteurs à deux ou quatre soupapes. Certaines motos sont profondément préparées, d'autres s'apparentent un petit peu à des modèles tunés... Dans tous les cas, Ghezzi Brian aiment beaucoup les petits phares lenticulaires et les couleurs acidulées.

Une Guzzi V11 Sport transformée par Ghezzi Brian

Ghezzi Brian Furia, à peine préparée

On ne peut s'empêcher de voir une forme de communauté de pensée entre Ghezzi Brian et Erik Buell : tout deux se donnent pour mission (pas facile !) de rendre léger, performant et dynamique un bon vieux V-twin refroidi par air et tous deux utilisent des recettes en apparence similaire : fourches avec angle de chasse très fermé, pot d'échappement sous le moteur, frein avant périmétrique, boucle arrière de cadre minimaliste... Regardez-bien la Furia ci-dessous : n'avons-nous pas un peu l'impression de voir une cousine très proche de la Buell XB9 ?

Ghezzi Brian Furia, proche d'une Buell ?

2004 : la MGS/01, le succès en course puis la séparation

L'expertise des duettistes leur a valu, on s'en doute, d'être approché par Moto Guzzi. La firme de Mandello leur demanda en 2001 de travailler sur le concept d'une machine très sportive, la MGS/01 et le projet prit forme en 2004 avec une cinquantaine d'unités fabriquées, dont la plupart furent préparées directement en configuration compétition. Son V2 de 1225 cm3 sort 128 chevaux et possède des cylindres haute compression (mais à l'époque la moindre sportive japonaise dépasse déjà facilement la barre des 160 ch en full) et la machine pèse un peu plus de 190 kilos à sec. La MGS 01 a néanmoins remporté la course des BOT (Battle of the Twins) à Daytona en 2006 et 2007, ainsi que le championnat italien de Supertwins en 2006 ; une victoire "usine" en quelque sorte, 10 ans après le sacre du prototype engagé et conçu par Ghezzi Brian.

Moto Guzzi MGS 01 compétition

Cette étape marqua d'ailleurs la fin d'un cycle : Giuseppe Ghezzi intégra alors le staff Moto Guzzi en charge des motos performantes (ndr : il a du un peu se friser les rouleaux depuis 10 ans, car on n'a pas vraiment vu de motos de ce registre sortir des ateliers de Mandello) tandis que Brian resta aux commandes de leur petite entreprise, dont le nom fut inchangé.

Les années 2010, entre hommage et diversification

Brian désormais seul aux commandes, l'entreprise doit à la fois valoriser ses fondamentaux sans oublier de regarder vers l'avenir. Cette phrase, digne de figurer sur un powerpoint d'un cours d'introduction au marketing, recouvre une réalité : la base des fans de Moto Guzzi qui souhaitent une machine plus performante n'est peut-être pas extensible à l'infini et il faut peut-être trouver d'autres sources de profit.

Bien entendu, la Guzzi performante reste au coeur des préoccupations. Dans la gamme actuelle, on note donc avec intérêt la présence de la Fionda, un roadster agressif et minimaliste conçu sur la base d'un V11 à 2 soupapes. Notez le phare agressif comme le regard haineux d'une mante religieuse et les gros étriers radiaux, la selle très tendance café racer ainsi que les guidons bracelets positionnés bien bas pour un engin qui a vocation à dévorer les lacets des routes de montagne, dixit son constructeur.

Ghezzi Brian Fionda sur base V11 2 soupapes

La V-Twin Motard est forcément plus polyvalente. Conçue sur une base de Griso 8 soupapes, elle propose très certainement une nouvelle expérience de conduite seul ou en duo, grâce à sa selle généreuse. Une nouvelle programmation électronique, une boîte à air plus généreuse et un échappement dédié dont les deux sorties pointent vers le ciel augmentent significativement le couple entre 3000 et 6000 tr/mn, tandis qu'un amortissement dynamique, à la manière d'un ESA chez BMW, fait son apparition. Sa centrale est capable de 25 000 mesures par seconde et le pilote à simplement besoin de sélectionner le mode de conduite et la charge de la moto au guidon, le système fait le reste. Des roues à rayons font également partie de la panoplie tandis que l'habillage de cette V-Twin Motard est exclusif.

Ghezzi Brian Motard sur base de Griso

Cependant, on sent bien que la performance sur piste reste la véritable passion de Brian Saturno. La preuve avec ces deux autres modèles présents au catalogue, la V11 Trofeo, une pistarde qui possède presque ce qu'il faut pour aller d'un circuit à l'autre par la route et surtout, la fameuse Dr John Tribute toute de rouge vêtue, un hommage à la Daytona du dentiste le plus rapide du monde !

Ghezzi Brian V11 Trofeo

Dr John tribute par Ghezzi Brian

Aujourd'hui, Brian distribue également des roues à rayons et tout un catalogue de pièces "tuning" pour Moto Guzzi. Il travaille sur un projet "secret" relatif aux partie-cycles de Moto2 et travaille sur la Curva, où une base de Ducati Panigale recevrait un châssis en carbone et un affichage tête haute.

Projet chassis Ghezzi Brian Moto 2

Ducati Curva by Ghezzi Brian

On s'éloigne du V2 2 soupapes des origines...

Plus d'infos sur Ghezzi Brian

Commentaires

tom4

raaaah, merci pour le souvenir.
Dr John, ça me parle, je lisais ses exploits à l'époque.

tom4

13-04-2016 10:04 
Phil G

C'est vrai qu'on peut parler d'exploit car aucun des concurrents de l'époque, imprégnés de la suprématie japonaise, n'imaginait se faire battre sur des courses et un championnat par un dentiste qui avait hypothéqué sa maison pour préparer sa Guzzi. En cherchant un tout petit peu sur le net, on trouve des archives de la revue "American Motorcyclist" (janvier 1986) dont le titre de l'article "Who are those guys?" résume bien l'incrédulité du milieu !
PG

13-04-2016 10:49 
dante

Ben moi j'en ai une ...

13-04-2016 21:44 
Phil G

Et c'est bien ?

14-04-2016 00:19 
dante

c'est avant tout le plaisir d'avoir un truc quasi unique sur la route je dirais, avec plein d'inconvénient quand y a un problème et/où qu'il faut changer un truc, les limites de l'artisanat, ça dépend vraiment de ce qu'on a envie et de pourquoi on possède une moto.

19-04-2016 10:29 
 

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