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MotoBrev Nouveau sujet

looooong *^_^*

avatar bru 21-09-2003 14:33
looooong *^_^*

- Voilà ! Je n’ai plus qu’à attendre qu’elle sèche.

Deux heures de boulot pour nettoyer cette chaîne ! Faut dire que je ne l’avais jamais fait. La crasse s’était déposée entre les maillons et avait formé une croûte épaisse, noire et qui reluisait çà et là de petites particules métalliques.

- Pas étonnant que tu buttes tes kits chaîne aussi vite, m’avait dit Brice quelques heures plus tôt.

- Quoi ? J’ai un blême avec ma moto !

- Tu rigoles. Elle éparpille ses saletés à chaque fois que tu démarres. Pourquoi tu crois que je suis toujours devant ?

- Ben ! T’as une sept et demi et moi, juste une 500. Alors …

Notre conversation n’avait pas été plus loin. Le feu était passé au vert et au démarrage, il avait allumé son pneu arrière. Je crois qu’il en avait marre d’enlever les tâches de graisse sur sa bécane. Pourtant, c’était toujours lui qui venait me chercher. A croire qu’il était un peu maso.

Debout, dans cette pièce ouverte à tous vents, j’avais fait plusieurs fois le tour de la moto. Tour à tour émerveillé ou honteux, je faisais le décompte de mes errances, de mes maladresses et de mes négligences. Brice avait raison, elle faisait pitié à voir. J’avais de la tendresse pour elle et … c’était nouveau.

Mes mains sentaient le pétrole. Je n’aimais pas cela. Pourtant, j’étais content de moi. Ma chaîne était redevenue grise et mes pignons arboraient à nouveau leurs dents avec fierté. La bassine rouge dans laquelle j’avais travaillé n’était plus qu’un réceptacle à pétrole où flottaient quelques icebergs de graisse non-encore dissous. Les particules métalliques s’étaient déposées au fond de la bassine et malgré la noirceur irisée du pétrole, elles brillaient comme de l’or au sein d’une rivière. Et si ce n’en était pas, elles en valaient au moins le prix.

Le soleil, qui ne s’était pas beaucoup montré, disparaissait à l’horizon et l’air devenait cru. Ma brelle, une vielle GPZ 500, respirait la misère. Elle était obscène comme ça, le *** nu, libéré de sa roue arrière et montrant sans pudeur toute sa détresse. Prenant plus de plaisir à la piloter qu’à l’entretenir, je l’avais négligé comme on néglige parfois son épouse. Elle me rendait pourtant de fier service, me laissait la chevaucher par mont et par vaux et même quant elle préférait rester au creux de notre maison, elle me laissait faire. Si parfois ma conduite était déraisonnable, jamais elle ne m’avait laissé en rade. Alors pour une fois, au lieu de parcourir la lande, j’avais décidé de passer l’après-midi avec elle.

A présent, la nuit est pleine et la lune, absente. Mon ventre crie famine mais je n’ai pas le cœur de la laisser comme cela, une certaine pudeur peut-être. Avec douceur, je la rhabille, lui graisse sa chaîne et termine avec une caresse amicale sur la selle.

Ma rue, d’habitude si calme, vrombi d’un coup sous l’impulsion de mon démarreur. Le vacarme se propage sur les murs des maisons de cette rue étroite et je ne résiste pas à l’envie soudaine de couper le choke. Voilà, c’est mieux !

Nous sommes heureux tous les deux. Ma GPZ perturbe la nuit d’un « pout pout » coquin, irrégulier et m’invite à la chevaucher. J’enfile ma combinaison mixte cuir-tissus que j’avais laissé traîné là ce matin, passe mon casque et monte dessus. Le rythme de mon moteur est maintenant plus cadencé et il n’y a plus que quelques volutes blanches qui s’échappe du pot. Pas pour longtemps !

D’habitude, lorsque je suis assis dessus, c’est plutôt le couteau entre les dents. Ou alors, parfois, une sorte d’insouciance légère évapore à mes yeux le reste du monde quant à allure réduite, je m’émerveille que nos routes soient si belles, que la forêt, tout à côté, protège de son ombre changeante ce ruban de bitume ondulant entre ses troncs. Le feulement feutré de mon Bi ne trouble pas la quiétude de la forêt. Il lui donne une onde sonore qui lentement se répercute d’arbre en arbre jusqu'à ce fondre avec la mousse et l’humus de nos bois. Les animaux, proches ou loin, m’entendent arriver, relève la tête pour me regarder passer puis sans crainte et apaisés, reprennent leurs vies sauvages.

La première passe avec le « klong » habituel et je laisse quelques kilomètres à mon moteur et à mes pneus pour prendre leurs températures. Je leur laisse même un peu plus de temps pour compenser la fraîcheur nocturne. Mon phare, que j’avais toujours trouvé médiocre, n’éclaire que faiblement mon avenir immédiat. J’enroule calmement les virages qui se succèdent avec régularité. Je connais cette route sur le bout de mes pneus. Elle m’est familière et pourtant, sous cette pénombre, elle m’apparaît parfois plus longue ou plus courte. Elle me déboussole. Entre deux virages, je ne sais plus à quelle distance je me trouve du suivant. Ce qui était éclairé l’instant d’avant se presse de disparaître une fois sortit du cône de lumière que dispense difficilement l’ampoule grillant dans mon carénage. Je frôle l’inconnu. Il m’enveloppe et balisé d’une lueur rouge et d’une autre blanche, j’évolue dans un monde que je ne discerne pas. J’en ai des frissons. Je ne suis poursuivit que par la traînée rouge de mon feu arrière et pourtant j’ai peur.

- T’es con ! Ce n’est jamais que la même route, les mêmes virages, la même forêt, les mêmes arbres.

Instinctivement, j’accélère, pour fuir au plus vite cet endroit. Je sais que dans quelques kilomètres, une étendue de champs s’ouvrira devant moi. Je reste concentré malgré ce frisson malsain qui m’ordonne de ralentir. Dans un virage à droite, je dépose une gerbe d’étincelles. Dans le suivant, j’élargis et passe sur l’autre bande. Personne en face ! Heureusement !

Ces avertissements ne me suffisent pas. Je continue à rouler fort, trop fort. L’ampoule du phare avant claque et au milieu d’un virage, je me retrouve dans le noir absolu. Je vacille, lutte pour ne pas me redresser. Je roule sur le bitume comme un aveugle marcherait sur la corniche d’un toit, un pas de travers et … la chute. Je sens que la route se dérobe, que mes pneus sont à la limite. Entre la forêt et le goudron, c’est quelques secondes me sont une éternité. En sortie de virage, j’évite de plonger sur mes freins, me redresse et m’arrête. Je suis vivant et … debout ! Un miracle ! La moto est encore sous mes fesses. Elle ronronne. Elle ne s’est aperçue de rien. Je reste là, essoufflé, au centre de la route. Je suis en sueur et mes tempes battent au moins aussi vite que mon twin. Je ne sais plus bouger et c’est avec peine que je parviens à tirer la béquille latérale. Je laisse la moto là, au milieu de la route, sans phare. Elle tourne encore. Je m’en extirpe, enlève mon casque et sort peu à peu du coma émotionnel où cette mésaventure m’a plongé.

Il n’y a que le silence autour de moi. Je n’entends même plus la Kawa tourner. Mon casque noir est perdu sur du goudron noir dans une forêt noire et, il est effacé par une nuit noire, elle aussi. Je suis à genoux. Les mousses de protection de mon pantalon s’écrasent sous le poids de mon corps fourbu et me protègent de la morsure typique des irrégularités acérées du goudron. Je souffle, m’essouffle et récupère petit à petit mes sens.

La première chose qui me revient c’est l’odeur charnue des bois qui m’entourent. Elle éveille mes sens. Ensuite, c’est la fraîcheur légèrement humide de ce qui sera la rosée demain matin qui s’insinue dans le haut de mon dos par l’ouverture laissée par ma tête courbée. Les particules d’eau se fixent aux fibres de mon t-shirt et lentement s’insinue jusqu’à mon échine. La sensation est désagréable et je relève la tête. Le relent d’essence qui surnage juste au-dessus de la vapeur d’eau est alors à la porté de mes narines. Innocente et insouciante, la Kawa crache encore, comme un anachronisme, ses vapeurs enivrantes. Elle tourne. Elle chauffe. Le petit ventilateur se met en route comme pour me dire qu’il faut dès à présent s’occuper d’elle. J’obtempère. Ce n’est peut-être pas ce qu’elle avait imaginé mais je la fais taire par une simple rotation de mon poignet puis, je range la clef dans ma poche. C’est bête mais je suis soulagé. Enfin, une certaine unité dans mon environnement.

A présent, même la lueur rouge de mon phare arrière s’est éteint. Il me contrariait et me rappelait l’horrible moment que je venais de passer. Doucement, mes yeux s’habituent à l’obscurité qui se révèle être en fait beaucoup moins sombre que ce que j’avais imaginé. Je perçois plus que je ne vois mais les formes et les ombres effacées par manque de contraste se distinguent suffisamment pour me permettre de me mouvoir sans trop de peine. Dans cet univers à nouveau cohèrant, ma moto au milieu de cette route ressemble fort à un obstacle imprévisible et bien sur, alors que je me suis approché pour la déplacer, j’ai shooté dans mon casque qui est allé se perdre dans la rigole naturelle formée à coup d’averse orageuse. Il a roulé, roulé et encore roulé pour s’arrêter hors de ma vue dans un « poc » pas très engageant pour son intégrité. Je râle mais je ne peux rien faire pour le moment. D’abord la moto ! La clef sur la position « OFF », je la pousse vers un petit chemin de traverse en terre qui commence à quelque pas. J’en ai marre ! Je voudrais être ailleurs, plus loin, sur une route à l’air libre, vers une voie continue, dans une joie contenue. Enfin ! pas ici, pas seul et pas dans ce merdier.

La béquille s’enfonce dans la terre comme un couteau dans une motte de beurre. Rien à faire, elle ne tiendra pas debout ici. On a beau dire mais 179 kilos, c’est lourd, même sur deux roues. Une galère, on sait quant elle commence, jamais quant elle fini. Je me suis embarqué avec elle dans cette travée boueuse, il va falloir maintenant que je l’en sorte. Mes pieds, chaussée de botte moto, s’alourdissent à chaque pas de quelques centimètres cubes de terre et deviennent aussi glissant que deux quartiers de patate qui frottent l’un contre l’autre. Vous devinez la suite, les pneus ont suivit le même chemin que mes bottes et se sont dérobés. Comme un âne, j’ai essayé de la retenir mais trop tard, elle s’est avachie comme une bouse alors que moi j’évitais de justesse de me retrouver sous elle en me jetant en arrière…

Heureusement, il n’y a personne dans ce bois. Je jure comme un chartier. J’hurle ma véhémence pour ne pas faire plus de mal encore à ma GPZ qui gît, misérable, dans la boue. J’imagine, en fureur, l’huile se déverser par relent dans la boite à air. Je sais qu’après je serai bon pour un démontage en règle, tout ça pour une méprisable ampoule.

avatar Ecrino 21-09-2003 18:19
Re: looooong *^_^*

sympathique petite histoire...Tu n'as pas rencontré de corrigans ? ou bien...l'Ankou ??, Brrrrrrrr....

avatar Mesrine 22-09-2003 12:30
Re: looooong *^_^*

c'est peut être sympas ton histoire mais j'ai pas eu le courage de tous lire (fait plus court) clin d'oeil

avatar bru 22-09-2003 15:30
Re: looooong *^_^*

Oui, tout à fait !

Je résume:

Je roulais puis je me suis presque vautré.

hi hi hi

Tous les commentaires sont les bienvenus

avatar Patrick38 22-09-2003 15:45
Re: looooong *^_^*

Bonne histoire, mais comment cela ce fini?

avatar Nickola 22-09-2003 16:05
Re: looooong *^_^*

ouais... moi j'veux la fin....

En plus, tu parle de moi... tu jure comme un chartier j'aime , c'est un peu mon nom de famille à une faute d'orthographe près clin d'oeil

avatar swaz 23-09-2003 18:20
Re: looooong *^_^*

Wow. Eh ben t'écriras une thèse sur ta prochaine gamelle.

avatar bru 28-09-2003 00:56
avatar borodino 28-09-2003 10:47
Re: looooong *^_^*

Comme qui on peut être motard et littéraire.

 

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