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Roman : René (épisode 14)

Episode 14 : On fait connaissance…

Tout le monde s'installe, l'instant est un peu solennel, on entendrait tourner un mono 125 équipé d'un catalyseur !

Le maître (ne pas oublier qu'il a été considéré, malgré un unique titre en 250, comme un des pilotes les plus talentueux de l'histoire par les ténors du Continental Circus...) observe l'assemblée sans dire un mot, comme pour bien les jauger.
Le groupe retient son souffle !

Monsieur Sarron parle enfin :
« On va commencer par un tour de table et vous allez vous présenter un à un...»
Et la vingtaine de s'exécuter.… Bon, je te passe tout ça, on va pas les faire causer tous, de toute façon, pour la plupart, c'est le genre p'tit c.n friqué qui te taxe au comptoir du bar avec la dernière hypersport du marché.
Le genre qui plait aux constructeurs car il s'agit de la partie « prolifique » du marché, aussi bien en terme de moto (généralement celles qui margent le plus), qu'au rayon pièces détachées ou on peut afficher, sans honte aucune, le plastique au prix de l'or (t'as vu le prix d'un carénage ?...:). Ceux la, ils achètent cash, ils la jouent façon « grille de GP », se plantent, car ça ne fait pas branché de demander le mode d'emploi, et achètent ensuite les pièces pour réparer...

Quelques uns, peut être moins cons que les plus cons, finissent par honorer de leur auguste présence ce genre de stage (à la condition que le mono soit une vedette...), réalisant enfin le ridicule de leur condition (tu sais, celle qui nous fait marrer, nous, les vrais...) lamentable de pseudos passionnés qui ne connaissent rien à l'histoire de la moto mais te répondent systématiquement « je sais » quand tu essayes inutilement de leur inculquer le moindre savoir...

Oui, je sais, je m'égare un peu mais, pardonne moi, ça fait du bien.

Revenons à nos moutons, pardon, je voulais dire motards, on va s'intéresser à trois protagonistes seulement (et ça m'évitera d'user mon clavier : un journaleux m'a expliqué il y peu qu'il fallait faire court pour garder le meilleur...) : Grigou, Valentini et René...

Le jeune Plumitif se lève devant le parterre impatient d'entendre « l'autre » célébrité :
« Je me nomme Grigou Thekick, journaliste essayeur à Moto Canard depuis deux ans (p...ain !, deux ans...). Mon rédac' chef m'envoie ici couvrir le reportage et rouler avec vous. Mais, je vous en prie, considérez moi comme un simple motard lambda malgré mon statut au sein de la rédaction number ouane de la presse française. Comme vous, je roule au quotidien, et sur un 500 GSE... »

A l'énoncé de la « modeste » machine, certains se mettent à rigoler, doucement (faut pas trop attirer l'attention, au cas où...), mais... ironiquement !

René ne dit rien mais ça le gonfle franchement : à son époque, on aurait traversé la France avec une 125, en se fichant du « qu'en dira t'on », uniquement par amour du deux roues ! Aujourd'hui, on n'effectue pas le tour de quartier de maison à moins de 1000 cm3...
D'un seul coup, Grigou lui devient plutôt sympathique !

Puis arrive le tour de Valentini :
« Je me présente : Valentini ROSSO. Je viens d'avoir 18 ans et roule sur piste depuis mes 5 ans.
J'ai participé, grâce à mon pôpa ici présent, lequel tient une grôôôôôsse concession muti marque aux pays des Pommes, à TOUS les championnats cyclos de la ligue, que j'ai gagné haut la main.
Je tente le pari, l'an prochain, de sauter du cyclo à la catégorie Superproduction en Open et de remporter le titre dès la première année !!! »

Le père se lève, les yeux brillants de fierté :
« C'est mon fils à moaaaa !!!, d'la graine de champion, j'vous l'dis !!! » dit il, lui qui n'a jamais le cap d'une qualification au cours d'une carrière éphémère, bien entendu par faute d'une moto « performante ».

Là, c'est Maurice qui ne peut s'empêcher de pouffer, sous le regard complice de Christian qui se dit que cet oiseau là, va falloir l'avoir à l'œil...

René, enfin, se présente :
« Ben... moi, chuis René Gédeufoitrentans : un motard de la période glorieuse et encore actif à ce jour. J'ai décidé de ne pas finir idiot en participant à ce stage, histoire de valider mon savoir et d'ajouter un peu de sécurité à mon roulage de tous les jours.
Faut dire qu'après plus de trente ans de pratique à circuler par tous les temps sur les routes de France et de Navarre, je viens de passer dernièrement à la 1300 V6, et que celle ci me demande une réactualisation du coup de gaz... »

En disant ça, il jette un regard amusé vers la famille ROSSO, et particulièrement vers le jeune Valentini qui le regarde bizarrement...

Bon, les présentations sont faites, voici maintenant le tracé du Bugatti, dont le revêtement est neuf depuis cette année. Le grip est exceptionnel, même sur sol humide. Mais bon, la météo sera clémente.
« Un mot sur vos machines : vous gardez vos réglages habituels ! Le but est de vous apprendre à vous en servir, pas de chercher des excuses bidons comme certains pilotes : elles resteront donc telles que vous les utilisez au quotidien.
Une règle à ne pas oublier : vous êtes là pour apprendre, pas pour faire une course. Le premier qui déroge à la règle en mettant les autres en danger est mis hors stage immédiatement...
Maintenant, je vous laisse quelques minutes pour vous mettre en tête le tracé... »

Le maître a parlé ! Ces quelques mots ont pesé comme l'action de son poignet droit face aux adversaires d'alors et tout le monde se concentre à étudier le tracé au tableau...

Christian reprend :
« Maintenant, écoutez-moi et prenez des notes si vous le voulez : on démarre de la voie des stands pour rentrer dans le grand droit de la courbe Dunlop. Celle ci s'aborde en 6 en prenant la corde très tard car elle vire en deux temps (il trace la traj' au tableau): la difficulté consiste à plonger la deuxième fois alors que le virage est « en aveugle ».
Le truc est de sacrifier un peu de vitesse à l'entrée pour bien ressortir en ligne car une chicane, à gauche, se présente rapidement : freinage en ligne et relâché des freins en balançant avec les repose pieds (il mime la scène).
Ensuite, grosse accélération pour un freinage le plus à l'extérieur possible à « la Chapelle », dont vous aller chercher la corde le plus loin que vous le pouvez, comme ceci (nouvelle démonstration au tableau), en 3. Vous passez la 4 très rapidement pour un énorme freinage en ligne au « Musée », le plus à la corde possible (attention à ce point sinon vous allez visiter le bac à sable en sortie) pour sortir en 2, puis en 3 très rapidement et 4 voir 5 jusqu' au « Garage vert » , un double droit en cassure où vous prenez le plus possible l'extérieur entre les 2 virages.
Ensuite Gaz ! : Longue ligne droit jusqu'au pif paf du « Chemin aux Bœufs « lequel demande beaucoup d'improvisation (on verra en dynamique...). Puis 2 et 3 jusqu'aux « Esses Bleus », qui s'abordent comme le « Musée ».
Après, c'est plus technique car vous avez un grand gauche avec beaucoup d'angle (certains d'entre vous y passeront « fond de 3 ») avec un freinage, moto encore inclinée, jusqu'au virage du « raccordement » où la moto va se détendre au relâchement des freins que vous allez effectuer en contrebalançant pour attaquer ce droite assez serré (gaffe à ne pas en faire trop sinon, comme Arnaud Vincent au dernier GP, vous allez visiter le sable Sarthois...).
Ensuite, retour à la ligne droite et passage devant la voie des stands.
La pôle aux essais du dernier GP est, je le redis pour ceux que ça intéresse, détenue par « 4+3 » Gibernau en 1'33"425.
Tournez en 2' et vous me ferez plaisir ... »

OOOOUUUUUFFFFFFF ! L'assemblée est concentrée comme le lait et personne n'ose piper mot.

Christian invite les participants à aller chercher les motos et à s'équiper : rendez vous devant le stand dans trente minutes pour les fameux 2 tours derrière le champion !

René a décidé de rester à côté de Grigou, en queue de peloton, pour avoir une vue d'ensemble. Valentini, lui, sur le bolide préparé par « son pôpa », se place directement derrière Christian : c'est pôpa qui lui a ordonné de faire comme ça...

Et c'est parti...

Allure sénatoriale de Christian qui, d'une main, indique les bonnes traj' en tête du cortège, lequel suit docilement.

Le deuxième tour est plus rapide : déjà certains s'écartent et doivent remettre du gaz pour ramarrer.
Valentini suit Christian comme un chien fidèle, pour ne pas fâcher le paternel, tandis que René, studieux, apprend et comprend, observant au passage Grigou devant lui, lequel semble plutôt doué. Du moins, à cette allure...

A la fin des 2 tours, tout le monde s'arrête devant le stand et Christian attend les réactions : certains, comprenant qu'on ne devient pas pilote en jouant à la play station ravalent leur salive sans dire un mot, Valentini pose 2 ou 3 questions concernant le positionnement à adopter pour certaines courbes, René lâche un simple « ça marche !.. », et Grigou observe tout ça en prenant des notes sur son carnet...
Christian libère ensuite la troupe avec rendez vous en soirée au « restau », puis à la salle de détente pour un concours de baby foot.
Demain, les choses sérieuses commencent...

René Gédeufoitrentans "le gatouillable" by Sato

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