Essai motos Triumph TF 250-E et TF 450-E
Chapeau melon et bottes de cross
Triumph TF 250-E : monocylindre de 249,9 cm³, 42,3 ch, 27,8 Nm, 114,3 kg pleins faits, réservoir de 8,3 litres, à partir de 10 995 €
Triumph TF 450-E : monocylindre de 449,9 cm³, 59,3 ch, 49,3 Nm, 117 kg pleins faits, réservoir de 8,3 litres, à partir de 11 595 €
Après un intermède de 18 ans, l’âge de mon fils (non, c’est pas une coïncidence), j’ai redécouvert les joies de l’enduro depuis quelques mois. Ce sentiment de liberté qui permet de se rendre dans des lieux inaccessibles et d’admirer des paysages somptueux, éclairés par une lumière digne d’un Van Gogh, tout en faisant des travers de porc… Bref, le sublime contraste qui fait toute la richesse de l’humanité, à mi-chemin entre l’émotion que l’on ressent devant une goutte de rosée glissant le long d’un pétale de fleur et la joie sauvage éprouvée en essorant un bout de caoutchouc relié à un moteur à combustion interne. Du coup, quand j’ai vu passer la news annonçant l’arrivée de Triumph et ses TF 250-E et TF 450-E, sur un segment dominé par les Autrichiens (au travers de KTM, Husqvarna et Gas Gas), quelques Espagnols (Beta, Rieju) et Italiens (Fantic, TM), ainsi qu’un irréductible Français (Sherco) qui résiste encore et toujours aux envahisseurs, j’ai sauté sur l’occasion. Et puis, le Repaire, c’est celui de tous les motards, alors pour une fois que l’on est content de sortir de la route, c’est le moment de voir ce qu’il y a de l’autre côté…

L'essai vidéo des enduros Triumph TF 250-E et TF 450-E
Découverte
Lorsque Triumph a débarqué en motocross l’année dernière, nombreux ont été surpris. Il y avait des pistes plus évidentes, ou naturelles, à suivre pour développer la gamme de la marque anglaise. Comme les sportives, curieusement absentes de son catalogue, alors que le constructeur fournit les moteurs en Moto2, est engagé officiellement en championnat du monde Supersport et équipe Peter Hickman au Tourist Trophy. Et pourtant, comme Ducati, c’est vers l’off-road que les Grands Bretons se sont dirigés. Avec un certain succès. Leur 250 s’est attirée pas mal de louanges et a déjà décroché des podiums en Supercross US et en MXGP. La suite logique était de proposer une 450, ce qui fut fait il y a quelques mois, ainsi que des modèles pour l’enduro.

Et si vous craigniez de retrouver des machines de SX pourvues d’un alternateur plus gros et d’une plaque phare, soyez rassurés, les ingénieurs ont bossé afin d’adapter parfaitement leurs machines à cette discipline.Ainsi, les mécaniques ont été assagies en alourdissant le vilebrequin (de 30% sur la 450 et 34% sur la 250), afin de trouver de l’adhérence, la boîte de vitesses est désormais à six rapports, les trois premiers étant spécifiques à un usage enduro et le sixième, surmultiplié, destiné à assurer les liaisons routières. Le profil des arbres à cames est lui aussi spécifique. Malgré tout, les performances demeurent impressionnantes. La « petite » développe tout de même 42,3 ch, quand la « grosse » frôle les 60 canassons !

Côté châssis, le cadre périmétrique en aluminium est très semblable aux modèles cross, à l’exception des attaches pour la béquille latérale et quelques détails, mais les bras oscillants et les rapports de biellettes sont spécifiques. Côté fournisseurs, on n’a pas pris de risque en s’adressant à des marques connues et reconnues : KYB pour les suspensions, des jantes D.I.D, Dell’Orto pour l’injection, étriers et maître-cylindre Brembo, disques Galfer, pneus Michelin, etc. Le résultat est un rapport poids/puissance assez démentiel, puisque la petite affiche 114,3 kg sur la balance et la grosse 117 kg.

L’équipement d’origine est lui aussi pléthorique, avec des protège-mains, deux cartographies moteur, un quickshifter, un contrôle de traction, ainsi qu’un launch control ! Le tout pour un tarif ultra agressif par rapport à la concurrence. Bon, la fiche technique est alléchante, mais sur le terrain, ça donne quoi ?
En selle
Sur le parking du superbe domaine de Las Comes, à une centaine de bornes au nord-ouest de Barcelone, les bécanes sont alignées comme à la parade. Pour le moment, elles sont propres, mais vu les sombres nuages qui s’accumulent au-dessus de nos têtes, pas dit que ça dure longtemps. Esthétiquement, la robe noire surprend, dans un premier temps. Il est vrai que dans le domaine, on est habitué à des couleurs plus vives, qui permettent de les reconnaître immédiatement : rouge pour Honda, bleu pour Yamaha, vert Kawa, orange KTM, jaune Suzuki, etc. Il faudra s’habituer à la signature sombre, relevée de jaune, de Triumph. De près, aucune faute de goût… à part un phare qui semble disproportionné, du moins tant qu’il n’est pas allumé. Mais la marque nous promet une réelle efficacité de nuit, au cas où une sortie dans les bois se prolongerait en hiver. Pour le reste, c’est beau, moderne, bien fini et ça respire la qualité.

La forme de la selle est bien étudié, elle offre du grip pour ne pas glisser à l’accélération et, bonne surprise, malgré une hauteur qui semble himalayesque sur le papier (955 mm), la combinaison de suspensions souples et d’une forme fine permet à mon mètre 77 de poser les deux bottes bien à plat. La position de conduite me rappelle celle de ma EXC-F 350, avec un guidon un peu haut, comparé à la Sherco du fiston. En tout état de cause, les leviers se règlent en écartement facilement, avec précision, et, après avoir ajusté les hauteurs, je me sens comme à la maison. En bonus, l’utilisation de l’électronique est évidente : quand le bouton est illuminé, l’assistance est en fonction. Et le système conserve le dernier réglage en mémoire au prochain démarrage. Les modèles de route pourraient en prendre de la graine ! Comme sur toutes les enduros du marché, le réservoir transparent permet de vérifier le niveau d’essence d’un coup d’œil.

Prise en main
Contact, démarrage, le petit mono de la TF 250-E s’éveille dans un martèlement discret, mais sympathique. Embrayage ultra doux, première tout en souplesse et je décolle. Nous avons droit à run d’échauffement, sur une spéciale mêlant virages à plat et obstacles gentils. Tant mieux : j’ai un niveau loisir en off-road et je le revendique. J’aime les sensations que procure le tout terrain, mais je m’y suis assez frotté (clavicule, cubitus, radius, cheville…) pour ne plus vouloir m’y faire mal. Donc si vous voulez faire de la compèt’, prenez mes remarques avec des pincettes ou, mieux, allez voir chez mes confrères plus aguerris ! En revanche, si votre kiff, c’est de partir en balade deux ou trois heures quand un week-end le permet, de vous régaler de grandes glisses et de quelques franchissements « gentils » durant lesquels vous avez la sensation, pendant quelques secondes, d’être un pilote, un vrai, on est sur la même longueur d’onde. Vous comprendrez donc que la sensation d’essorer le mono jusqu’au rupteur soit jouissive ! Un moulin qui dispose d’ailleurs d’une allonge impressionnante et d’une pêche réjouissante. Côté châssis, rien à dire, les éléments Kayaba offrent de la souplesse et du confort en début de course, puis amortissent les gros chocs en fin de course, quand la position de conduite permet de charger l’avant ou l’arrière à loisir, sans être gêné par le réservoir de 8,3 l. Bref, on joue sur du velours.

En passant sur la 450, tout change… sans vraiment changer. Position, couleur, commandes, c’est la même chose. Mais dès la mise en route, la sonorité plus rauque donne le ton : c’est du lourd ! Et la première accélération confirme qu’il va falloir être poli avec la poignée de gaz, sous peine de mettre rapidement la cabane sur le chien. Malgré tout, la connexion est parfaite et on contrôle la puissance, omniprésente, avec précision. En arrivant dans les virages, on sent que l’inertie est supérieure, sans que ce ne soit dramatique. Heureusement, le freinage est à la hauteur et, là aussi, on dose le tout avec finesse. Reste à voir ce que cela donne dans le monde réel.
Sur piste rapide
Chez moi, il y a des « liaisons » sur de la DFCI rapide quasi obligatoire. De grandes pistes, souvent larges, mais non dépourvues de pièges, comme quelques saignées vicieuses, des pierres traitresses ou des buttes artificielles destinées à évacuer l’eau lors des gros orages. Les quelques passages rapides dont nous avons bénéficié m’ont rappelé tout ça, alors qu’un petit crachin imprègne l’atmosphère et que la brume s’installe. Dans ces conditions, la stabilité du châssis est irréprochable, tout comme la capacité des suspensions à encaisser une pierre cachée sans faire dévier la trajectoire. Si piloter la 250 a un côté jouissif, car le mono dispose d’une belle santé dans les tours, la force de la 450, avec un moulin sur lequel on peut s’appuyer quel que soit le rapport engagé et son inertie supérieure, qui a tendance à davantage « coller » la roue avant au sol, la rendent, à mon goût, un peu plus agréable.

Entre les arbres
Et puis notre guide plonge entre les arbres, dans une pente bien engagée où l’on doit se glisser au milieu des troncs (c’est mal entretenu ces forêts !), dans un espace à peine plus large que le guidon, comme des skieurs en slalom. Et là, les rôles s’inversent. La deux-et-demie paraît peser dix kilos de moins et non seulement trois. Aucune inertie, elle se place avec le regard et obéit au doigt et à l’œil, d’une pression sur le guidon ou sur le repose-pied. Même chose pour les freins qui se dosent à la perfection. L’efficacité est remarquable, tout comme la facilité. J’aurais presque l’impression d’être bon, si je ne voyais pas les copains partir comme des balles et disparaître au bout de deux cents mètres.

La 450 demande plus d’engagement, elle écarte davantage la trajectoire, il faut plus de force pour la faire passer d’un angle à l’autre et, alors que l’on reprend ce single dans l’autre sens pour les photos, je dois me méfier et garder un doigt sur l’embrayage pour ne pas caler sur un coup de piston. Malgré tout, elle pardonne beaucoup et reprend très bas dans les tours en préservant une adhérence étonnante.
Dans la caillasse
Notre parcours nous aura mené plus d’une fois dans quelques grimpettes parsemées de petites marches et même des lits de rivières bardées de dalles rocheuses rendues glissantes par la pluie. La souplesse de la mécanique et les qualités du châssis et des suspensions ont continué à séduire. Tout comme l’efficacité de l’électronique. Le contrôle de traction s’est révélé très efficace, sans empêcher de lever l’avant ou de glisser sur les parties rapides, il limite les dérives et préserve l’adhérence quand on en a besoin, au moment d’aborder les difficultés. La 250 brille par sa facilité et son agilité mais, avec mon niveau, le train avant plus léger réclame de l’attention, tout comme le choix du rapport. La 450, avec sa courbe de puissance adoucie, qui m’a beaucoup rappelé le caractère moteur de ma 350, permet de préserver l’adhérence tout en bénéficiant d’une stabilité un poil supérieure. Bref, quand, comme moi, on est souvent passager de sa machine et qu’on la laisse faire le boulot, la quatre-et-demie encaisse tout très bien, repart sans caler et facilite un poil les choses. La 250 est plus évidente à placer, plus précise également, en ce sens qu’elle ne s’écarte pas de la trajectoire choisie, mais il faut davantage s’impliquer et la piloter. Deux écoles pour un plaisir identique et une efficacité impressionnante.

En spéciale
De retour à notre point de départ, après pas mal d’heures en selle, je suis heureux… mais rincé ! C’est le moment de faire quelques images sur la spéciale « de découverte » utilisée le matin. Je commence avec la 250. Plus à l’aise qu’il y a quelques heures, je prends énormément de plaisir au guidon, mettant davantage d’angle dans les virages, n’hésitant pas à charger l’avant et à essorer la poignée droite. Je roule avec la courbe en full et le TC enclenché. La boîte de vitesses est rapide et précise, mais le shifter ne fonctionne pas toujours sans que je comprenne vraiment pourquoi. Il est censé agir à partir de la seconde, mais ce n’est pas toujours le cas. Au bout de quatre tours, j’échange ma monture avec la 450 de mon guide, persuadé que je vais en ch… D’autant que là, si je conserve le TC, je remets la courbe de puissance au max. La différence de puissance et surtout de couple saute aux yeux. L’accélération est démente, mais toujours contrôlable. J’étais persuadé de préférer la 250, j’en suis moins sûr d’un coup. D’autant qu’en suivant un passage étroit, genre ruisseau asséché, sur des dalles rocheuses humides, avec deux petites marches à franchir, je la trouve plus stable tout en ayant la sensation de me poser moins de questions quand j’ai besoin d’un peu de watts pour franchir un obstacle. Bien sûr elle réclame plus d’énergie, mais dès que l’on a un peu d’espace, quel pied !

Partie-cycle
Rien à dire, les Anglais ont fait un super boulot. Pour une première, c’est une pure réussite, mélangeant l’agilité des Autrichiennes et la stabilité des Japonaises ou des Européennes. Le châssis est rassurant, les suspensions efficaces et les périphériques de haut niveau. Bref, pour moi c’est largement suffisant.

Freinage
Même constat, que ce soit en termes de qualité perçue, au moment de régler les leviers où la pédale, de feeling, ou de puissance, il y a tout ce qu’il faut.

Conclusion
Triumph a fait très fort avec ses enduros. Le seul reproche que je puisse faire est… qu’après une journée d’essai je ne sais toujours pas laquelle choisir !
Le 250 est ultra jouissive à piloter et, entre des mains expertes, certainement plus efficace. La puissance est largement suffisante, le caractère et le bruit du mono dans les tours sont géniaux, alors que la facilité que procure le châssis, tant dans les petits coins qu’en spéciale, en font un joujou extra.

La 450 est plus « posée » en châssis, elle vous embarque davantage, mais gigotte aussi un peu moins quand c’est cabossé. Avec la courbe de puissance adoucie, elle est d’une facilité déconcertante et se comporte comme une 350, préservant du grip, ne calant pas facilement et vous aidant en toutes circonstances. Mapping sur full, elle devient plus réactive, carrément fun, tout en restant contrôlable. Bref, le résultat est impressionnant. Côté options, à part une protection de biellette et, éventuellement l’utilisation de l’app MX Tune, qui offre 6 courbes au total et permettra d’aller encore plus loin dans la personnalisation, il n’y a rien à ajouter. À si, des mousses (comme lors de notre essai) en lieu et place des chambres à air d’origine.

Un tel niveau d’efficacité et de plaisir, avec un équipement des plus complets et des périphériques de marque, à un tel prix, c’est impressionnant. Avec 10 995 € pour la 250 et 11 595 € pour la 450, c’est ultra concurrentiel par rapport à ce que l’on trouve sur le marché. Le tout avec l’assurance d’une marque sérieuse et d’un réseau important. Bref, il va falloir s’habituer à trouver du noir et jaune de plus en plus souvent dans les chemins ou les spéciales, car ces TF ne manquent ni de qualités, ni d’arguments.
Points forts TF 250-E
- Moteur pétillant
- Agilité diabolique
- Facilité d’exploitation
- Équipement
- Prix
Points faibles TF 250-E
- Train avant parfois léger dans le technique
- Shifter pas toujours efficace
La fiche technique de la Triumph TF 250-E
Points forts TF 450-E
- Moteur Génial
- Puissance exploitable
- Courbes de puissance efficaces
- TC bien pratique
- Équipement
- Prix
Points faibles TF 450-E
- Inertie un poil sensible
- Shifter pas toujours efficace
La fiche technique de la Triumph TF 450-E
Conditions d’essais
- Itinéraire : Du technique, de la caillasse, de la piste, des singles entre les arbres avec de la bonne terre, une spéciale enduro… la totale !
- Météo : Humide toute la journée, petite averse en fin de matinée, conditions de grip changeantes… bref, de l’enduro
- Problème rencontré : aucun
Disponibilité / prix
- Coloris : noir/blanc/jaune
- TF 250-E : 10.995 euros
- TF 450-E : 11.595 euros
- Disponibilité : immédiate
Equipements Triumph TF 250-E et TF 450-E
Équipement de série | Exemples d'options |
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Équipement essayeur
- Casque Shot Lite Challenger
- Masque Shot Core
- Pantalon et jersey Shot Aerolite Ultra Neon Yellow
- Veste Shot Softshell Lite Black Neon Yellow
- Protections Shot Airlight vest + Race D3O Protector Knee guards
- Gants Five E3 Evo
- Bottes Gaerne SG22
Commentaires
Merci pour cet essai hors des sentiers, j'aurais aimé savoir d'où provenait le bloc moteur, c'est maison ou ils ont repris le mêle bloc Yamaha que chez Fantic?
01-07-2025 18:51Piston forgé durée de vie 90h !!
02-07-2025 00:29