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Essai Yamaha YZF R6

Année modèle 2002

Essais motards : Olivier

Passer du Bandit au R6… . En voilà une idée un peu brutale, contre laquelle bon nombre de motards aguerris se sont battus.

Et pourtant… . Et pourtant, je l'ai fait. Mais avant de chevaucher ce genre d'engin, il faut effectivement s'assurer d'un minimum de trois points :

  1. le premier, c'est bien évidemment d'en avoir l'usage. 106 ch pour aller acheter sa baguette le samedi matin, cela n'a qu'un intérêt limité.
  2. le second, c'est d'avoir le comportement qu'il faut. Ce n'est pas tant une question d'expérience que d'attitude. Le plus chevronné d'entre nous pourra se tuer s'il n'y prête pas attention, et le motard moins aguerris y trouvera au contraire son bonheur sous la simple condition qu'il soit prudent et ne joue pas au "kéké" à chaque feu.
  3. le troisième point, c'est le coût. Comme toute hypersport, le R6 coûte cher en entretien et en assurance.

Quelques mots sur le bestiau…

La Yamaha R6 est une hypersport, c'est-à-dire qu'elle appartient à cette catégorie assez fermée au sein de laquelle on trouve la CBR 900, la ZX 12R, la R1, l'Hayabusa, et quelques autres machines de circuit auxquelles on a rajouté des rétroviseurs de manière à pouvoir appeler cela "motobylette à usage urbain".

C'est avant tout une moto légère, entre 166kg et 169 kg selon les millésimes. Le carénage est bien évidemment intégral, surplombé d'une bulle assez horizontale. En d'autres termes, passé 120 km/h, il est préférable d'aller raboter le compteur avec les dents plutôt que de jouer au piquet, auquel cas vos cervicales s'en souviendront.

Néanmoins, la prise de position sous cette bulle est assez facile, dans la mesure où la position de conduite globale est basse, poignées bracelets obligent. Le réservoir est bien dimensionné et permet de se pencher sans retenue. Côté jambes, les repose-pieds sont assez élevés, et favorisent cette inclinaison vers l'avant. A ce sujet, faisant 1,87 m, je dois signaler que je n'ai jamais eu de désagrément au niveau de l'ergonomie de la moto. On sent un travail d'étude et d'équilibrage de la moto important de la part de Yamaha, c'est appréciable.

Côté fonctionnalités, simplicité et efficacité sont les deux maîtres mots. Le tachymètre est digital, à gros chiffres, rétro-éclairé rouge, du plus belle effet, et parfaitement visible en toutes conditions. Le plus important sur ce genre de moto reste évidemment le compte-tours. Ici, chiffres rouges sur fond blanc, comme toute sportive. Il est également indiqué en incrustation la température du moteur, elle aussi fondamentale. On tourne en générale entre 75° et 85°C. Au-delà, c'est qu'il fait chaud dehors ou que vous êtes en ville, et ça, la R6 n'aime pas ça du tout, mais alors pas du tout… : le moteur chauffe TRES vite (+ 5° par minute), la position de conduite devient pesante, le moteur donne des accoups, etc.

Concernant enfin les rétroviseurs, oubliez-les: c'est comme s'il n'y en avait pas. En revanche vous aurez une vue imprenable sur vos coudes. Si vous avez l'habitude de vous retournez, ça ne changera rien, mais si ce n'est pas le cas, vous aurez bien des surprises: c'est bien connu, l'Automobile Satanique attaque toujours par derrière lorsqu'on ne s'y attend pas.

Pour le passager, même constat: vous oubliez. La moto n'est pas faite pour cela. En dépannage et sur une courte distance, c'est tout.

Machine du Diable

A part ça, elle roule, me direz-vous ? Je veux, mon neveu… La première fois que je suis monté dessus, j'avais 8 mois de permis, il faisait nuit, il grêlait, et c'était sur une autoroute à l'heure de la sortie des bureaux (un vendredi soir, cela va de soi). Premier constat: cette moto est très confortable, il faut l'essayer pour le croire. Deuxième constat: elle ne tourne pas. Dérivée de la course, l'angle de chasse du guidon est ridicule, donc oubliez les virages à 90° en ville et les zig-zags entre les voitures, ou c'est la gamelle assurée.

Le moteur, de son côté, comporte trois plages de régime. De 0 à 6.000 tours, vous avez une moto à peu près normale, ça tourne rond, il ne faut pas lui en demander trop car il n'y a pas de couple, mais ça tourne. C'est bien pour la ville. Au delà de 6.000 tours et jusqu'à 9.000 / 10.000 tours, ça commence à tirer sérieusement. Le moteur monte très vite en régime, le compteur affiche 160 km/h très rapidement. Au delà, c'est diabolique. Infernal. Le 600 cm3 survitaminé lâche tout ce qu'il a, le train arrière tracte comme une brute, le train avant vous propulse au triple galop vers des vitesses de pointes excessives, et il est recommandé de s'accrocher fermement aux poignées sous peine de décrocher.

Pour le passage de vitesses, il se fait haut, dans sa montée comme dans sa descente: rarement en dessous de 6.000 tours, et le moto exige bien souvent 9.000. La zone rouge est à 15.500 tours, c'est très élevé, il faut donc étager ses changements en fonction de cela, et aller chercher le régime mixte de changement de vitesse plus haut aussi.

Les freins

Côté freinage, pendant indispensable à ce genre de monture, pas de souci à l'avant: progressif et ferme, et un bon comportement sous la pluie. A l'arrière, c'est souple, pour ne pas dire mou… . D'un côté, c'est préférable, car le blocage du train arrière risque d'être assez douloureux, sur ce genre d'engin. De l'autre, lorsque un freinage d'urgence s'impose et qu'il faut combiner avant et arrière, ça crée un petit déséquilibre au détriment de l'arrière, et l'on a du coup tendance à plonger de l'avant un peu plus que théoriquement.

La partie cycle reste très stable, pas de guidonage, pas de vibration, pas de bruit, on sent un travail d'étude préalable important à ce niveau, une nouvelle fois. Evidemment, à haute vitesse, et avec moins de 20 litres de carburant, il ne faut pas s'attendre à faire 250 km. 200 km, c'est bien, et c'est la moyenne. A noter la présence d'un témoin lumineux de passage sur la réserve, ainsi que le passage automatique du compteur kilométrique en mode "réserve": un compteur spécifique apparaît et totalise combien de kilomètres vous parcourez sur la réserve. A vue de nez, on doit pouvoir faire 40 ou 50 km sur la réserve, ce qui est honorable et, en tout cas, suffisant dans la plupart des cas.

Pneumatiques

Enfin, les pneus. Les Michelin Sport montés d'origine sont excellents. Ce sont des pneus de course. En d'autres termes, de la gomme tendre, pour pouvoir chauffer plus vite. Cela convient parfaitement à la R6. Mais cela implique aussi qu'ils s'usent plus vite, et sont beaucoup plus sensibles aux débris routiers (éclats de verres, cailloux pointus, etc.). A 150 euros pièce en moyenne, il vous faudra donc éviter les passage sur des bandes d'arrêt d'urgence pas trop propres (ou alors laissez passer un scooter devant vous, il fera le ménage à votre place).

Conclusion

Pour finir, la R6 est la moto que l'on attend: sans concession, brutale, vive, rapide, étonnante, chère (pneus, essence, et assurance selon les cas), excessivement bien conçue, et exigeante. Les bonnes surprises viennent du moteur, absolument fabuleux, du confort surprenant pour une hypersport, et de l'équilibre global de ses éléments. Les mauvaises surprises sont rares: en dehors d'un frein arrière un peu mou, et peut-être d'une consommation importante, il n'y a pas grand chose à redire. Depuis, je suis "redescendu" à plusieurs reprises à la SV 650, à la Diversion, je suis même un peu revenu au Bandit. Rien à faire: je suis toujours revenu au R6.

La fiche technique

Voir aussi l'essai complet de la Yamaha R6 2012

Un essai réalisé par Olivier