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Essai Honda 1000 CBX (1978 - 1984)

Six pattes de velours !

Quand les principaux constructeurs se bagarraient pour offrir à leurs clients le quatre cylindres le plus performant, Honda, quelque peu distancé par la concurrence sur le plan des performances pures, voulut retrouver sa suprématie... Après avoir imposé, une décennie auparavant, la fameuse CB 750, la firme démontre en 1978 son talent en matière de sophistication, en dévoilant l’audacieuse 1000 CBX…

Hop ! Une demi-douzaine de cylindres !

Découverte

On doit ce monument à l’ingénieur Shoichiro Irimajiri (l'instigateur de la Honda-6 250 GP RC164). La 1000 CBX à moteur 6 cylindres en ligne est née fin 1977 et est commercialisée dès juillet 1978 dans les concessions françaises. Le premier modèle (CBX Z) est pourvu de jantes Comstar de couleur aluminium et est disponible en rouge ou gris métal. Cette moto, hallucinante, ouvrait la route sur un autre monde…

La CBX B, l'invitation au voyage...

En selle

Un paquebot… Le moteur dépasse de partout ! Ce bloc, tout alliage, incliné à 30° vers l'avant, permet le montage des 6 carbus disposés en V vers l'axe longitudinal pour laisser la place aux genoux. Sous les yeux, le réservoir recouvrant l'épine dorsale semble énorme et pourtant la culasse déborde de chaque côté. La position de conduite est très agréable grâce au guidon réglable dans tous les sens. Le tableau de bord, aux chiffres rouges, dispose d’un voltmètre situé sous l’ensemble compteur/compte-tours. La moto est basse et la selle très confortable.

Tous les renseignements indispensables sur le tableau de bord et en prime, un voltmètre...

Démarrage

Quel moteur !!! Une puissance record pour l'époque (105 chevaux), le six cylindres envoute aujourd'hui comme hier. La douce mélodie du ralenti est légèrement troublée par les bruits de chaines primaire et distribution, mais dans les tours, cette cathédrale miaule dans un feulement extraordinaire…

La beauté du six à l'état pur...

En ville

En manœuvrant, le poids sur l'avant se fait sentir, mais disparait dès les premiers tours de roues. Malgré son gabarit imposant, la CBX se montre étonnamment maniable et se balance sans effort grâce à sa faible hauteur. De part sa conception, il ne s’agit pas de l’outil le plus commode pour se faufiler en agglomération, mais on finit très vite par oublier son poids et sa largeur.

La CBX B est à l'aise sur tous types de routes...

En route

Le six, c'est du velours ! Onctueux dès 2.000 tours, rageur jusqu'à 10.000, il réagit franchement et vigoureusement sans brutalité ni à-coups, de manière surprenante. Une mécanique superbe, mise généreusement en valeur dans un cadre minimaliste. Pourtant, la partie cycle n'est pas en adéquation avec ce fabuleux moteur, qui par ailleurs assure la rigidité de l’ensemble. Mieux vaut éviter les excès d’optimisme, au risque de voir la moto se désunir…

Balade à douze pattes...

L’autoroute

La fourche de 35mm de diamètre et le bras oscillant en tôle emboutie sont manifestement sous dimensionnés. La CBX se montre floue à haute vitesse et la tenue de cap n’est pas d’une grande rigueur. Toutefois, croiser à une allure largement supérieure aux limitations imposées, arrive très rapidement. Les agitations de la CBX n’apparaissent ensuite qu’autour de 170 km/h.

La CBX Z version Sportive

Le duo

Selle spacieuse et accueillante, repose-pieds passager idéalement positionnés, absence de vibrations… La 1000 CBX est une reine du transport en commun. D’autant que sa tenue de route reste bien meilleure en duo qu'en solo…

Parées pour aller au bout du monde !

Le freinage

Plutôt faiblard sur une machine qui fut la plus rapide du moment (220 km/h). L'avant manque cruellement de mordant et l'arrière bloque facilement... Tous ces défauts seront corrigés partiellement sur le modèle 1980 et davantage l'année suivante avec le modèle Pro-Link.

Disques ventilés et étriers double pistons pour CBX B, disques pleins et étriers simple piston pour CBX Z

Entretien

Le carnet d'entretien Honda est à respecter scrupuleusement. La CBX exige de la rigueur si on ne veut pas courir à la catastrophe. Au minimum une vidange moteur avec remplacement du filtre à huile tous les 5.000 km, une mise au point complète, avec contrôle des jeux aux soupapes et synchronisation des carbus tous les 10.000 km (les pastilles de soupapes diam.25 de Yamaha FJ se montent sur le 6 cylindres). Méfiance pour le réglage les carburateurs, la synchronisation demande matériel, compétences, vidange de la fourche tous les 10.000 km (on peut augmenter légèrement le volume d'huile pour accroitre la tenue de route).

Détail du réglage d'amortisseur sur la CBX B.

Consommation

La 1000 CBX est gourmande avec une consommation de 10l/100 en utilisation mixte et jusqu’à 12 litres sur autoroute à allure soutenue.

Chronologie et évolution

1978: Commercialisée fin juillet 1978, la CBX Z fait l'effet d'une bombe. Disponible en rouge candi ou en gris argent. Caches latéraux noir mat.


Essai Honda CBX 1000 de 1978

1980: Commercialisée courant 1980, la CBX A évolue timidement. Jantes Comstar plus rigides et retournées, fourche hydropneumatique, amélioration du montage de la colonne de direction, roulements de bras oscillant, robinet essence à dépression, coffre de rangement dans dosseret de selle et moteur dégonflé à 100 ch. Disponible en rouge, gris ou noire.

Honda CBX 1000 de 1980

1981: Commercialisation en mai 1981, la CBX B partiellement carénée change de style. Moteur noir avec pare-cylindres, disques de frein AV ventilés, étriers AV double pistons, fourche diam.39mm, carénage avec protection des jambes, réservoir 22 L, garde-boue AV avec déflecteur, carter de chaine chromé et surtout suspension AR de type Pro-Link. Disponible en gris argent ou en blanc.


Honda CBX 1000 de 1981

1982: Commercialisation à compter de 1982 et jusqu'à épuisement des stocks, la CBX C sera la dernière des CBX 1000. Sacoches et montre de série, câble antivol fourni et se rangeant dans le vide-poche de la tête de fourche et poignées pour le passager sur le dosseret de selle.


Honda CBX 1000 de 1982

Production

La CBX fut produite à 3.734 unités pour la France. 2.915 pour la génération entre 1978 et 1982. Seulement 819 pour les modèles Pro-Link à partir de 1981 jusqu'à 1984.

Identification

1978 à 1980 CBX Z type CB1 N° à partir de 2000879
1980 à 1981 CBX A type SC03 N° à partir de 2000000
1981 à 1982 CBX B type SC06 N° à partir de 2300225
1982 à 1984 CBX C type SC03 N° à partir de 2400000

Acquisition

On peut trouver des occasions à restaurer ou à l'état moyen entre 2.500 et 4.000 €. Une restauration peut s'avérer coûteuse et engendrer des rapports conflictuels avec votre banquier. Phase 1 ou phase 2 (Pro-Link), choisissez selon votre usage et votre budget, les premières cotent un peu plus. Si vous optez pour un modèle "Naked" en parfait état, prévoyez un minimum de 8.000 €. Les prix peuvent atteindre plus de 12.000 € pour des modèles d'exception.

Maquillée élégamment par Daniel Mercier, sorcier du team Daytona 70, la 1000 CBX se retrouve transformée en Mike Hailwood Replica. Cette moto, confiée au double champion du monde Gérard Coudray, diffuse la musique de ses six mégaphones en championnats his

Mécanique

Les 5.5 l d'huile demandent à être correctement chauffés et une surveillance accrue du niveau est souhaitable. La vérification des numéros de série est le seul moyen de connaître, par exemple, le modèle C ou B. Le panachage des pièces n'est pas toujours possible entre les versions (exemple : la culasse du modèle Z diffère du modèle C ou B). Des problèmes de démarreur (souvent moteur chaud) sont causés par la déficience des soudures internes du stator. Diagnostiquez les bruits dans les carters au ralenti : défaillance de l'embrayage fréquente ou chaines d'entrainement.

Pour une tenue de route correcte, vérifiez l'absence de jeu sur l'axe du bras oscillant et le serrage des fixations moteur. Sur les premières versions, pensez à fermer le robinet d'essence en cas d'arrêt prolongé, en cas de fuite au niveau des pointeaux, le cylindre gauche se remplit d'essence si la moto est stationnée sur sa béquille latérale. Au prochain démarrage, la bielle de ce piston gauche risque de faire connaissance avec le carter moteur. Honda parvint à remédier à ce problème, en rappelant ses CBX pour modifier les tuyaux de trop plein des carburateurs et pour équiper par la suite les motos de robinets à dépression.

Conclusion

La Honda 1000 CBX témoigne d’un temps où toutes les acrobaties mécaniques étaient encore possibles. On lui pardonnera volontiers ses défauts pour ne retenir que le meilleur. Une moto prestigieuse, au moteur réellement fabuleux à la mélopée entêtante. Près de quarante années après sa présentation, son aura demeure intacte. Une machine exceptionnelle et… Eternelle !

La CBX B version GT

Points forts

  • Magie du 6 cylindres en ligne
  • Performances honorables
  • Moto prestigieuse et indémodable
  • Excellente routière (CBX B)
  • Forte personnalité (CBX Z)

Points faibles

  • Coût de restauration et d'entretien élevé
  • Comportement à haute vitesse (CBX Z)
  • Poids excessif
  • Freinage trop limite
  • Consommation élevée

La fiche technique de la Honda 1000 CBX

Commentaires

louis

Dans mes souvenirs, La Benelli sei (6 cylindres et 6 pots d'échappement) est sortie avant la Honda, non ?

03-04-2014 15:21 
Ptit Loup1300

Oui, les Benelli (750 et 900), conçues à partir du moteur de la CB, sont sorties 6 ans avant la CBX. Mais on ne peut guère les comparer, celles-ci étant restées mal conçues, poussives et peu fiables.


Je voudrais revenir sur certaines imprécisions concernant la CBX (principalement les modèles Z et A), qu'on lit d'ailleurs beaucoup un peu partout sur cette moto légendaire.

D'abord la consommation. Il semble que la légende porte à l'exagération. Une CBX consomme en fait entre 7 et 9 litres/100. Pour passer la barre des 10 litres, il faut, soit une machine dépendante d'un bon réglage (ce qui n'est pas rare), soit "taper dedans" allègrement. Mais comparons alors la conso d'une R1 ou d'une 1300 GSX-R dans les mêmes conditions ! La mienne, une "A" SC03 de 1980, consomme 7,8 litres/100 en roulant "à peu près" dans des conditions normales (+20% par rapport au Code de la Route). Ca n'a rien de si monstrueux. D'autant que l'autonomie tourne autour de 280 km, ce dont bien des motos d'aujourd'hui devraient s'inspirer.

Ensuite, si le freinage d'origine est certes une cause d'angoisse permanente, c'est très facile à corriger. Heureusement, car passer d'une machine récente à la CBX n'est pas sans laisser des traces de grosses frayeurs en conduite "enjouée". Mon premier trajet avec cette nouvelle moto (Nice - Grenoble) m'a laissé quelques souvenirs humides... Il semble que cela vienne du maitre cylindre d'origine, probablement mal conçu. Une fois celui-ci changé par un modèle plus adapté, la machine devient sécurisante. Reste que la partie-cycle (notamment la fourche de 35 mm) montre encore mieux ses limites à partir du moment où on pousse le rythme.

En parlant de partie cycle : non, la CBX n'a pas un poids excessif. C'est même son principal défaut ; si on lui avait alloué un peu plus de kilos, la partie-cycle aurait pu être à la hauteur de ce moteur. Dans le bilan "poids", n'oublions pas non plus que cette machine permet de faire entre 230 et 280 km sans devoir s'arrêter. Si on compare avec diverses machines moins anciennes, comme la CBF1000F, la ZRX ou une 900 Diversion équipée par exemple, la CBX n'a rien à leur envier dans les manoeuvres à l'arrêt. Et en dynamique, la CBX devient une danseuse, alors que d'autres 6 cylindres comme la 1300 Z Kawa ou la GL 1500, restent des dinosaures lourdingues.

Reste que cette machine mythique mérite l'admiration qu'elle suscite. Ce moteur est inénarrable, il faut l'avoir conduit pour se rendre compte de ses capacités, de son caractère et de sa sonorité. Telle qu'elle (sans modifications notables), elle reste facile à manier, confortable, peu fatigante (sauf au delà de 120 km/h) et extrêmement jouissive quel que soit le rythme.
Avec peu d'interventions (freinage, suspensions), elle devient alors une moto tout à fait à la page, capable de jouer vivement et de vous faire perdre tous vos points en une seule fois, de passer partout dans de bonnes conditions de confort, et même de voyager.
Par contre, pas question de l'utiliser pour aller bosser, le volume des carters nécessitant beaucoup de temps pour la faire chauffer correctement.

28-04-2014 11:15 
passûr

Il faut aimer le saucisson et les armoires normandes

12-09-2020 15:48 
Ptit Loup1300

Le "saucisson" est une légende urbaine, une exagération principalement basée sur le tout premier modèle (version Z, type CB01, la plus vendue et pourtant la plus recherchée), dont le BO est sur bagues métalloplastique (une honte pour une machine de prestige) et le montage de la fourche perfectible. Il faut aussi reconnaitre que les amortisseurs d'origine sont des daubes, mal conçus et impossibles à régler malgré les nombreux réglages disponibles. Cela s'améliore facilement avec des composants disponibles partout, y compris avec des éléments provenant d'autres modèles contemporains comme la CB1100.

Les versions après 1979 sont améliorées et ne sont PAS des saucissons (modèle A type SC03 et Prolink ensuite).

Armoire normande ne s'entend que du point de vue de l'apparence (j'ai un collègue qui l'appelle "le mur", quand il la voit dans ses rétros...) mais certainement pas au guidon. Par exemple, il est facile de faire des ronds ou des "huit" sur un parking, alors que bien des machines plus modernes sont très délicates pour faire ça. Et cette "armoire normande" est largement plus confortable et reposante sur longs trajets ; il faut d'abord l'avoir pratiqué pour s'en apercevoir.

23-02-2021 16:28 
 

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