Essai Husqvarna TR650 Strada et Terra
Mono-cylindre, multi-plaisirs
Très dynamique malgré ses 109 ans (oui, oui, depuis 1903...), Husqvarna propose cette année deux nouveaux modèles batis autour du même monocylindre et partageant également l’essentiel de leur éléments. Ces deux modèles, tout comme les Nuda 900 et 900 R, ont été développés en collaboration avec BMW, propriétaires de la marque désormais implantée à Varèse, Italie.
Les TR 650 Strada et Terra, Route et Terre donc, viennent sur le segment très porteur des machines uni-cylindre. Pas moins de 30.000 unités ainsi motorisées ont été vendus dans le monde en 2011. De quoi donner de grands espoirs au constructeur désormais italo-germanique concernant notamment les marchés brésilien, sud africains, australien et nord américain, adeptes de ce type de production.
Découverte
Les deux nouveautés partagent l’héritage esthétique fort de la marque, aux lignes tendues et élégantes, signature du style italien. Un regard suffit néanmoins, tant pour se convaincre de l’identité génétique des deux soeurs que de leur destinée différente. Si l’une s’adresse aux motards routiers, l’autre cultive, sans ambiguïté, une vocation tout terrain.
Ainsi, la Strada, adopte un lèche roue avant classique tandis que la Terra s’affuble d’un garde-boue surélevé. Celui-ci, rasant l’optique frontale, semble jaillir de ses flancs aux lignes tendues. Jantes en aluminium coulé, chaussées d’enveloppes routes Metzeler Tourance, pour l’une et rayonnées portant des Metzeler Sahara pour la plus baroudeuse, sont les deuxièmes et dernières différences évidentes. Plus «subtile», on notera enfin des roues de 17’’ et 19’’ (avant) équipant l’asphalteuse et une monte en 18’’ et 21’’ (avant) pour sa soeur.
A l’exclusion de ces quelques points, toutes deux se parent du même habillage. Leurs longues selles, abritant un bidon de 14 litres, couvrent le réservoir, au bouchon dénué de charnière, reposant sur une boucle élancée. Deux larges poignées de maintien passager encadrent l’assise, formant porte paquet, et domine les échappements en position haute.
L’ensemble repose sur une poutre tubulaire en acier, dont la boucle arrière est boulonnée au cadre et une tige de support relié au moteur à l’avant. Pour celui-ci, Husky a de nouveau été piocher dans la banque d’organes allemande. On retrouve donc l’éprouvé monocylindre de la BMW G 650 GS, mais modifié à la sauce transalpine... rigueur ET fun. Ainsi, le bloc à refroidissement liquide, doté de nouvelles culasses au revêtement écarlate, reçoit un double arbres à cames, deux bougies et adopte des courbes de levée de soupapes modifiées. On retiendra surtout l’implantation d’un piston forgé et de son vilebrequin allégé, disposant d’un arbre d’équilibrage afin de limiter efficacement les vibrations. Ainsi retravaillé, l’uni-cylindre fournit 43 kW (58 ch) à 7250 tr/mn et développe un couple maximal de 6 da.Nm à 5750 tr/mn. Pour les jeunes permis de moins de 25 ans, une version bridée est disponible, suivant la réglementation européenne en vigueur avec 35 kW (48 ch) à 7250 tr/mn et 5,4 da.Nm de couple à 5750 tr/mn.
Pour guider ces trails, une même fourche inversée Sachs, non réglable, de 46 mm équipe les machines. Le combiné ressort-amortisseur, ajustable en précontrainte et détente, s’appuie sur un bras oscillant acier classique, monté sur biellettes. Avant et arrière propose un débattement de 190 mm, tant pour la routière que l’aventurière, mais des lois d’amortissement différentes. Petite spécificité, l’angle de chasse est également variable suivant le modèle. De 64° pour la Strada (ABS de série), il est 63,5° pour la Terra sans ABS ou 63° avec le freinage assisté, optionnel sur le modèle tout chemin. Le freinage s’appuie sur un monodisque de 300 m à étrier Brembo double pistons, conjugué, à l’arrière, avec une galette de 240 mm pincée par un élément monopiston.
De bonne facture et tout en contraste, mélant éléments sablés de teinte grise, carter noir et culasse rouge, la présentation mécanique subit toutefois encore les affres d’une finition perfectible. Cosses et autres fils électriques pourraient se faire plus discret. De même, on regrette des cale-pieds passager soudés au cadre.
En selle
Sur l’une comme sur l’autre, il convient de jeter la jambe assez haut. L’assise de la TR 650 Terra (avec ABS) culmine à 865 mm, celle de la TR 650 Strada à 5 mm de moins seulement. Notez que la version chemin, si dénuée d’ABS, ajoute 10 mm à cette valeur. Etroite près du faux réservoir, la selle autorise tout de même de bons appuis au sol pour les pilotes de plus d’1 m 75. De plus grande dimension, la roue avant relève le guidon, rendant la position générale plus agréable sur la Terra. Position verticale du buste, flexion réduite des jambes et repose-pieds gainés rendent la monture accueillante. De même, poignées de freins et levier d’embrayage sont réglables en écartement. Sans surprise, les mains retrouvent un large guidon presque plat, supportant des commodos déjà en place sur autres modèles de la gamme.
Autre similitude, la platine d’instruments ne surprendra pas les possesseurs de Nuda 900. Celui-ci s’articule autour d’un compte-tour centrale bien lisible, mais dépourvu de l’indicateur de rapport engagé. A gauche, sont placés les témoins habituels (essence, moteur, clignotants, neutre... etc). A l’opposée, une fenêtre digitale regroupe tachymètre, jauge de température moteur. Diverses informations (température extérieure, avertisseur de verglas, odomètre et partiel) défilent successivement par pression, peu aisée, d’un petit bouton sur le bloc compteur. Plutôt spartiate, l’ensemble du cockpit ne s’embarrasse guère de fioritures. Té supérieur de fourche et pontets sont de bon aloi. Sans plus. Enfin, l’ABS peut être déconnecté et le contacteur est codé.
En ville
Plaintif, le gémissement du démarreur est vite couvert par les claquements secs du berlingot de 652 cm3. Celui-ci fait décoller prestement les 186 kg de la Strada (183 Terra sans ABS). Vive, la géométrie des deux machines est un régal dans l’encombrement des centres urbains. En dépit d’une fourche dénuée de réglage, les transferts de masse semblent bien contenus, évitant l’effet de cheval à bascule.
La faible inertie du monocylindre et sa disponibilité remarquable, épaulé par une boite précise à 5 rapports, dope le caractère joueur des deux soeurs. S’il n’accepte gère de descendre sous les 2.500 tours/mn, le bouilleur d’origine allemande trouve suffisamment de grâce pour emmener l’équipage sur les intermédiaires à basse vitesse. Montant en régime sans traîner, il dévoile déjà beaucoup d’aisance en zone urbaine. Maniables, équilibrées, vibrant peu, les TR 650 se glissent dans l’aube naissante des faubourgs espagnols, manifestant leur envie d’espaces moins réduits.
Autoroute et voies rapides
N’attendant que votre sollicitation, les deux trails répondent avec efficacité à la moindre rotation de la poignée des gazs. Calé à 5 000 tr.mn au légale autoroutier, Strada et Terra gardent en réserve une bonne part de leur écurie, prêt à jaillir de leur «starting-boxes». La maison Husqvarna sait assurément concevoir du monocylindre péchu.
Pour le confort, c’est déjà moins flagrant. Les longs trajets rappelleront à votre fondement que son assise comporte des arrêtes un peu dures et une mousse un peu fine. Egalement, on aurait souhaité, sur le modèle routier, une protection au flux d’air meilleure sans recourir à l’optionnelle bulle haute. La partie cycle témoigne aussi d’origines plus enclines aux évolutions sur pistes dégradées. De légères ondulations s’emparent des machines si l’on force un peu les appuis au guidon.
L’architecture moteur des TR n’aimant guère les régimes constants, emmenons les soeurs sur des parcours plus variés.
Départementales
Enchaînant la virole à bon train, les petits échassiers de 650 cm3 dévoilent un peu plus encore un profil facétieux. Si la Strada est plus vive, la Terra montre logiquement plus de confort que sa soeur routière sur ce terrain du fait de son tarage de suspension. Pour autant, le train avant de la dernière semble offrir un meilleur ressenti qu’un essai plus long pourrait ou non confirmer.
Question mécanique, l’uni-cylindre remanié est à la fête, reprenant avec vigueur à tous les régimes. Au delà de 3 500 tr.mn, il tracte avec force et délivre des envolées frénétiques 2 000 tours plus hauts. 10 ch de plus que celui du bloc GS 650 complètent le haras. Il ne manque alors pas grand chose à la Strada pour jouer les supermot’. Une simple monte de pneus plus sportive ferait l’affaire, d’autant que les 6 da.Nm de couple dynamisent joyeusement la machine. Enroulant à bon rythme le sinueux parcours Ibérique, on profite également d'une bande son pétaradante. Les accents rauques, propres aux éclats de gorge des gros monos, martèlent l'air, tant en relances qu'en décélérations.
Plutôt spongieuse, la prise du levier de frein révèle alors une bonne progressivité de l’étrier avant, offrant une puissance parfaitement adaptée à la machine. L’élément arrière assoit efficacement les TR 650 en courbe, complétant honnêtement l’ensemble. Déconnectable, l’ABS ne s’est pas manifesté plus que de raison.
En utilisation tout terrain, l’amortisseur de la baroudeuse italo-germanique claque un peu sur les grosses compressions. La fourche avale, en revanche, efficacement les inégalités du parcours. Là encore, une utilisation plus longue que celle qui fut la notre saurait affiner cette analyse. Sur route, l’amortissement souple sait toutefois limiter les ondulations sur l’angle, prouve de la rigidité du cadre et d'un bon accord de suspension, en dépit d’un débattement important.
Partie-cycle
Particulièrement bien née, TR 650 Strada et Terra bénéficient d’une géométrie saine et vive. Leur équipement de suspension commun offre toutefois un bon compromis confort/efficacité pour leur domaine d’utilisation respectif grâce à un profil d’amortissement dédié.
Freinage
Progressive, les décélérations offertes par les étriers Brembo montrent une puissance en phase avec les prétentions de la machine. Sur l’angle, la prise du levier verrouille légèrement le train avant mais autorise tout de même les corrections de trajectoires.
Confort/Duo
Etudiée pour une utilisation au quotidien, l’ergonomie générale des commandes et la position imposée au corps offrent un confort globale appréciable sur les deux machines. Seule la selle pourra se révéler trop fine sur des trajets importants.
Pour le passager, le constat est meilleur encore. Poignées, repose-pieds, assise, l’accompagnant trouve un accueil très correct sur ce trail de moyenne cylindrée. Enfin, pour les voyageurs, valises latérales et top case sont disponibles. Ce dernier propose une astucieuse demi-ouverture, autorisant un accès rapide au contenu.
Consommation
Husqvarna annonce 3,2 litres/100 km à une vitesse constante de 90 km/h et moins de 4,3 litres pour 120 km/h. Nous n’avons pu vérifier ces chiffres mais ceux-ci sont conformes aux valeurs mesurées pour le bloc GS 650. La consommation, au vu des améliorations mécaniques et dynamique, devraient s’élever légèrement.
Conclusion
Avec ces deux modèles, Husqvarna propose un accès simple mais sérieux au trail léger du quotidien. Ciblant les citadins «commuters» ou les résidants de lieux moins urbanisés, les TR 650 Strada et Terra sont une réponse efficace aux besoin des motards cherchant une monture légère et agréable sans pour autant sacrifier l’agrément mécanique minimum. Le point fort de ces modèles est, de fait, leur motorisation pleine de peps. Leur mécanique monocylindre devra toutefois éviter les trop longs trajets à charge moteur constante.
Autre bon point, leur tarif : 6 690 €, ABS de série, pour la Strada, 6 290 € pour la Terra. Cette dernière s’affiche donc moins chère que la G 650 GS, équivalente en prix au modèle routier. Coté Asiatique, la Yamaha XT 660 R ne réclame que 5 990 € mais ses moindres performances ne sauraient faire la différence. Idem pour la version Ténéré grevée par une motorisation atone et exigeant 6 999 €.
Si le marché français, terre sacrée du roadster, semble manquer de passion pour ces machines légères, les soeurs Husqvarna pourrait bien glaner les coeurs des amateurs du genre et séduire quelques indécis. Leurs robes aguichantes le disputent à la répartie cinglante du coeur qui les anime. Succomberez-vous aux espiègles Italiennes?
Points forts
- Partie cycle
- Caractère moteur
- Sonorité de l’échappement
- Prix
Points faibles
- Finitions
- Manque de protection
La fiche technique des Husqvarna TR650
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