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Essai Suzuki SV 650 N

Suzuki SV 650 N - jauneEssais motards : Antoine

La SV650, c'est un peu le roadster à part dans la catégorie des 600. A cela, plusieurs raisons :

  • Sa motorisation d'une part : un bicylindre de 650 cm3 et 70 ch - prometteur au niveau des sensations -, introuvable ailleurs que chez Ducati avec le Monster et maintenant chez Cagiva (qui a tout simplement installé le même moteur sur son Raptor).
  • Son poids plume : 166 kg à sec, un des plus bas de la catégorie. Ce poids vous permet de vous sentir tout de suite à l'aise à son guidon, et donne (presque) l'impression d'enfourcher un vélo.
  • Son esthétique, originale sans être agressive, immédiatement reconnaissable à son cadre en treillis : de gros tubes d'aluminium aux soudures de qualité, et une taille très fine avec un réservoir assez échancré (16 litres seulement), idéal pour bien enserrer la bête avec les jambes.

Trois raisons en béton pour s'intéresser au cas SV de plus près.

Le tableau de bord avec le petit compte-tours à fond blanc excentré et l'entourage en faux carbone du compteur de vitesse sort de l'ordinaire, mais fait moins sérieux que celui de la Bandit. Pas de montre, peu de témoins, juste l'essentiel avec simplement un voyant de réserve (pas de robinet : pratique !). La béquille centrale est elle aussi mise au placard, et le coffre est de dimensions modestes, même si un petit U rentre sans trop de problèmes dedans, ainsi qu'un pantalon de pluie et un bloc-disque. La selle est ferme, façon sportive, avec la selle passager séparée et haut perchée. Heureusement, le passager peut compter sur une poignée généreusement dimensionnée. Reste à voir la protection avec une position aussi décalée…

Suzuki SV 650

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le bicylindre s'ébroue sans trop vibrer dans un bruit caractéristique et assez feutré. Pas de hurlement rageur de 4-pattes : ici, l'esprit est tout autre. On sent quand même la mécanique japonaise un peu aseptisée par rapport aux transalpines. Cela dit, ça ronfle gentiment. Starter pendant quelques minutes, le temps de stabiliser le ralenti (molette très accessible, du reste) aux alentours de 1200 trs/minute, et c'est parti.

Première, clac, la boîte Suzuki se rappelle à notre bon souvenir, et à part quelques faux points morts pendant le rodage, je n'aurai jamais de reproches à faire à la boîte durant toute son utilisation : souplesse et précision sont ses principales qualités. Surprise : il y a du couple au démarrage, dès le ralenti. Gaffe à ne pas relâcher l'embrayage trop vite ! Heureusement, celui-ci est très dosable. En revanche, pas besoin de mettre trop de gaz au démarrage : c'est appréciable.

On monte les rapports gentiment : ça se conduit sur le couple entre 2 et 5000 tours, même en 5ème ou en 6ème (idéal en ville). On peut également aller chercher le caractère -presque- sportif du bloc, passé les 6500 tours, régime où l'on ressent un léger coup de pied au cul bien agréable. Cela pousse alors sans discontinuer jusqu'à 10.500 tours, régime où la coupure moteur intervient presque brutalement, tant le moteur semble prompt à prendre des tours. Il m'est arrivé plusieurs fois, à ma grande surprise d'arriver au rupteur en 2e, faute d'avoir surveillé le compte-tours...

Côté prise en main, la position de conduite est très naturelle : on est presque droit (pas besoin de se coucher pour attraper les bracelets comme sur la version S). La selle à deux étages permet de bien se caler dedans, et les cale-pieds n'obligent pas à trop replier les jambes, même pour les grands gabarits (je fais pourtant 1,83 m). La légèreté de l'ensemble fait qu'elle est très réactive au contrebraquage et incite à prendre de l'angle. Malheureusement, la monte pneumatique d'origine a un peu de mal à suivre en raison de ses quelques défauts. Les MeZ4 sont en effet longs à chauffer (glisse garantie à froid dans les grandes courbes), et leur usure est relativement rapide pour le faible grip qu'ils procurent (entre 8 et 12.000 km pour un pneu arrière). Des Dunlop D207 ou mieux, des Bridgestone Battlax BT020 sont fortement conseillés (plus de grip pour une usure comparable ou à peine plus rapide).

L'épreuve de la ville est donc une formalité pour notre monture : on appréciera la souplesse du moteur, le faible poids, le gabarit passe-partout ainsi que le rayon de braquage plus que confortable. On se sent encore plus à l'aise que sur la Bandit.

Une fois échappé de l'enfer urbain et les pneus bien chauds, on peut attaquer sans retenue. C'est sur des petites routes bien viroleuses que le châssis vous montrera toutes ses qualités : stabilité, précision de la trajectoire, et surtout bon encaissement du couple généreux qui permet de s'extraire des courbes avec vigueur. Sûr qu'un Hornet ou un Fazer, même forts de 95 ch, ne suivront pas le rythme, surtout lors de reprises à bas régimes. Il faut dire que l'étagement court de la boîte (notamment par rapport à la version S) aide à la nervosité et aux relances de l'engin. Mais quel plaisir de se laisser aller à une bonne arsouille et d'entendre vrombir le twin au bruit aussi agréable à bas régime que dans les tours !

Côté suspensions, c'est confortable sans être mou, mais il est plus que préférable de régler la précharge de l'amortisseur arrière sur dur (position 6 ou 7 sur 7) : ça permet de prendre un passager sans appréhension, et surtout, ça améliore sensiblement la tenue de route, sans trop dégrader le confort.

Arrive le moment de freiner : ça manque de mordant (typique Suzuki : il faut aimer). Du coup les plaquettes Carbone-Lorraine sont vivement conseillées pour plus de feeling. Mais après c'est suffisamment puissant et surtout dosable (le double disque avant n'est pas là pour faire de la figuration) ; de même pour le frein arrière qui permet de ralentir la moto sur l'angle, ou d'aborder les passages à basse vitesse sans faire appel au frein avant.

Sur longs trajets, on déplorera la faible capacité du réservoir : 16 litres seulement. Malgré une consommation raisonnable, variant de 6 à 9 litres selon le type de conduite, les étapes ne feront guère plus de 170 à 220 km. En fait, c'est surtout l'absence totale de protection pour le pilote (buste et jambes), comme pour le passager, qui limiteront les trajets trop longs. Mais bon, c'est un roadster, et il vaut mieux oublier les longues étapes sur autoroute. D'autant que la tenue de cap au-delà de 170 km/h laisse à désirer (fréquents guidonnages probablement dus au faible poids), et qu'accrocher plus de 200 km/h compteur devient vite une épreuve de patience. Le saute-vent est obligatoire pour ceux qui ne veulent pas se faire dévisser la tête à chaque pointe ! Il permet de gagner un peu de protection jusqu’à 160 km/h au lieu des 140 km/h de l’origine.

Enfin, pour ceux qui veulent se faire plaisir, la SV offre des possibilités assez intéressantes au niveau du tuning : on a ainsi vu fleurir maints équipements de pots, sabots, bulles, têtes de fourche, passages de roue, etc. Bref, la personnalisation ne devrait pas poser de problème particulier, sans toutefois atteindre la diversité des pièces disponibles pour le Hornet, par exemple.

En conclusion, pour 43.000 F en neuf, vous avez là un jouet fort sympathique, au caractère moteur entier, tout en étant très exploitable. Un engin à fortement conseiller aux débutants pour sa prise en main immédiate et malgré tout sa générosité en sensations. Avec l'habitude, on souhaiterait un moteur avec un peu plus de pêche ou d'allonge, ou encore une plus grande stabilité à haute vitesse, mais ses grandes qualités font vite oublier ces petits défauts.

La fiche technique et les courbes puissance/couple comparatives

Un essai réalisé par Antoine Boyaud