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Indian Chieftain

Essai longue durée sur 6.000 km du custom de chef aux 1811 cm3

Mythique, tel est l'adjectif qui convient le mieux à la marque Indian et pas uniquement pour le film de Burt Munro the world fastest Indian. L'idée de faire revivre cette marque plus que centenaire était en soi un coup de génie et le fait de revenir aux sources mêmes de son histoire avec ces gros customs en était une autre. Et en termes d'histoire, Indian affiche fièrement être la première marque américaine, car lancée en 1901, soit deux ans avant son principal concurrent. Polaris y a ajouté sa maîtrise de la technique et de la mécanique pour faire revivre avec succès la marque et le modèle Chieftain qui est sans doute en 2014 le plus emblématique ou en tout cas le plus touring des modèles avant l'arrivée du roadmaster. Et pour l'essayer, quoi de mieux qu'un essai longue durée sur les terres de la marque, avec 6.000 kilomètres dans l'Ouest américain. Embarquement immédiat...

Indian Chieftain devant un mur peint avec un indien à San Francisco

Découverte

De loin, un non connaisseur pourrait presque confondre la Chieftain avec une autre célèbre marque américaine. De près, il n'y a pourtant aucune confusion possible tellement Indian a apposé son sceau sur chacune des pièces de la moto. Depuis le garde boue avant qui affiche fièrement un indien (et sert également de feu de position en étant éclairé la nuit) jusqu'au compteur, à l'optique avant, aux rétroviseurs, à la selle, au cadre, au réservoir de liquide de frein, aux serrures des valises ou au moteur qui affiche la tête d'indien sculptée dans le métal en passant par le réservoir qui affiche également une tête d'indien mais peinte cette fois-ci, le doute n'est pas permis. On en a compté pas moins de 22 !

Veilleuse éclairée du garde-boue avant Indian Chieftain

Moteur VTwin à refroidissement par air de l'Indian Chieftain

Logo Indian sur le cadre de l'Indian Chieftain

Et c'est peut-être cela qui fait que toutes les personnes qui s'en approchent nous interrogent : c'est un modèle de quelle année ? Et à partir de là, les questions fusent à n'en plus finir. Rares sont les motos qui génèrent un tel flux d'interrogations et de questions, mais aussi de photos. Car bon nombre de ces passants ont sorti leur appareil pour la prendre en photo. Certes, nous sommes aux EtatsUnis et la marque réveille de nombreux souvenirs de part son histoire. Mais quand même...

Mais revenons au modèle avec sa face frontale importante et sa bulle réglable électriquement en hauteur, pour une protection efficace. La large selle pilote affiche de l'espace pour les plus importants gabarits. La fine selle passager comme la selle pilote s'insèrent de clous chromés.

A l'avant on trouve une large optique centrale encadrée par deux phares additionnels latéraux et de longs clignotants effilés.

Phare avant Indian Chieftain

Le garde-boue avant se caractérise essentiellement par sa jupe longue qui englobe et cache plus de la moitié de la roue. Et la version millésime 2015 affine encore les lignes globales de la machine.

Le pilote bénéficie enfin de larges marche-pieds alors que le passager dispose de simples repose-pieds.

Marche pied sur l'Indian Chieftain

Mais ce que l'on voit le plus, c'est l'énorme VTwin Thunder Stroke de 111ci soit 1811 cm3 refroidis par air magnifié par les énormes culasses galbées, très proche du modèle qui propulsait les Chief de 1940 à 1953.

Moteur VTwin de 111 ci ou 1811 cm3 de l'Indian Chieftain

Enfin, on apprécie l'absence de clef de contact avec le transpondeur, qui permet de n'allumer la machine que si on se trouve à moins d'un mètre d'elle... mais aussi de bloquer la fermeture des valises à distance. La seule utilité de la clef fournie réside dans le blocage de direction situé sur la fourche avant à droite.

Feu arrière Indian Chieftain

En selle

Avec une selle à seulement 660 mm, le pilote d'1,70 met les pieds parfaitement à plat par terre, voire le pilote d'1,60m. Et c'est assez exceptionnel pour le souligner car il est rare que le pilote ait les pieds à terre, y compris sur la majorité des customs hormis certains rares modèles avec une selle sous les 700mm. Les mains tombent naturellement sur le guidon assez large avec ses 1022 mm, offrant un important bras de levier, plus proche d'un trail presque que d'un custom usuel. Les pieds se posent sur les larges platines latérales et on retrouve l'immense pédale de frein arrière presque horizontale vers l'avant comme sur bon nombre de customs. A gauche, le sélecteur est traditionnel par contre et n'est pas double.

Réservoir Indian Chieftain

Sous les yeux, on trouve alors un véritable tableau de bord avec le compteur de vitesse et le compte-tours analogiques qui encadrent un affichage digital rouge et l'ordinateur de bord pour le rapport de vitesse engagé, le totalisateur, le double trip partiel, la consommation, la consommation moyenne et instantanée, l'horloge, la tension de batterie, la pression des pneus, le voltage batterie, le nombre d'heures de fonctionnement du moteur, la jauge d'huile ainsi que les informations de volume et de chaîne pour la radio. On notera également la prise allume-cigare bien pratique pour recharger un portable ou simplement alimenter un GPS.

Les commodos sont standards aux modules japonais, hormis à gauche avec les boutons de réglage de la radio et de la bulle électrique et à droite avec le régulateur de vitesse. La gâchette habituellement réservée à l'appel de phare permet de passer les menus de l'ordinateur de bord.

Indian Chieftain de face

La radio affiche 100 watts de puissance... parfaite aux US pour ceux qui ne portent pas de casque, mais un peu juste pour être bien audible sur autoroute quand on porte un bon casque.

Les rétroviseurs se règlent facilement et offrent une excellente vision arrière, y compris avec le passager.

Indian Chieftain de face

Contact

Le bicylindre s'ébroue instantanément dans un son grave et rauque particulièrement valorisant. La première s'enclenche avec un clonk très custom et les autres rapports s'engagent fermement dans la foulée. A noter que l'Indian apprécie d'accélérer pour passer les vitesses avec aisance, comparativement à certains modèles où l'on peut pratiquement monter toutes les vitesses dans la foulée. La première est longue mais l'on apprécie de passer la seconde voire la troisième pour enrouler en douceur. De toute manière, l'Indian apprécie tous les rapports, y compris presque pour démarrer. Et oui, il est possible de démarrer en troisième et même en quatrième ! Certes en jouant un peu de l'embrayage, mais on a rarement vu une moto accepter sans même caler d'être malmenée de la sorte. Pratique pour les flemmards qui s'arrêtent à un feu en seconde ou troisième. Ils n'ont même pas besoin de repasser la première pour démarrer au vert!

Essai Indian Chieftain sur route

En ville

Avec les pieds bien à terre et son large bras de levier, la ville va bien à l'Indian. Sa capacité à démarrer sur n'importe quel rapport et à enrouler également sur pratiquement n'importe quel rapport y compris le dernier la rend très agréable en ville. C'est d'autant plus extraordinaire, que la première se pousse jusque 65 km/h (40 mph) et qu'à contrario la Chieftain accepte même de rouler à 30 km/h sur le sixième et dernier rapport ! Qui dit mieux ? Certes, à 30 km/h en 6e, on est entre 800 et 900 tr/mn et çà cogne, mais c'est possible, même si elle accepte plus facilement d'enrouler doucement au-dessus de 1.500tr/min. Elle passe même très bien l'exercice de l'interfile. En fait, ce sont les américains qui apprécient peu l'interfile plus que la moto.

Elle trouve son point d'équilibre dès les premiers mètres et du coup, on oublie son poids et ses quand même 369 kilos... à sec ! Les manœuvres à l'arrêt, assis sur la machine, se font aisément aussi bien vers l'avant que vers l'arrière pour la garer (si un ingénieur avait pensé à la marche arrière, elle serait inutile en fait). Il faut juste une grande jambe pour lancer la béquille latérale à l'arrêt (et grande également pour la rétracter). Si j'avais su, j'aurai mangé plus de soupe.

Les démarrages sont fonction de l'humeur du pilote, qui peut choisir d'enrouler tranquillement ou au contraire d'essorer la poignée droite pour laisser le gros coeur propulser dynamiquement la Chieftain vers le prochain feu.

Essai Indian Chieftain en ville

Il reste les demi-tours en ville. Tout va bien si la rue est bien large. Mais dans les ruelles, la manœuvre demande un peu de temps, à cause du rayon de braquage assez important. C'est un excellent exercice au demeurant qui s'apprécie au fur et à mesure des semaines quand on arrive à le faire de plus en plus facilement.

Essai Indian Chieftain en ville

Sur autoroute

L'Indian se lance avec dynamique sur autoroute, atteignant facilement les 130 km/h à seulement 3.000 tr/min, loin de la zone rouge à 6.000 tr/min. Un coup de la poignée droite et l'on atteint aisément et avec vigueur les 150 km/h pour gagner ensuite régulièrement les kilomètres heures jusque 180 km/h. Et l'on peut encore gratter quelques kilomètres heures ensuite si l'on est bien lancé. La moto est parfaitement en ligne et stable, même chargée en duo et avec bagages. A cette vitesse, la protection offerte par la bulle est tout simplement excellente. Surtout, elle ne génère aucun infrason dans le casque, quelle que soit sa hauteur de réglage. En position basse, il y a juste le bruit du vent dans le casque qui disparaît complètement à mi-hauteur. Il reste donc encore de la marge même pour les grands gabarits. Mieux, cette protection est aussi efficace pour le passager que pour le pilote qui apprécient alors le silence apporté par la bulle.

Essai Indian Chieftain sur autoroute

Sur départementale

A l'aise en ville comme sur autoroute, l'Indian se retrouve tout aussi bien à son aise sur les petites routes, qu'elle enroule sur le dernier rapport sans difficulté. Quand les départementales deviennent des petites routes de montagne, il vaut mieux redescendre en quatrième... Sachant qu'elle pourrait même se contenter des trois premiers rapports, avec une seconde qui se pousse sans souci jusque 95 km/h et une troisième jusque 130 km/h (80 mph). Mais à quoi servent les autres vitesses ? Peut être tout simplement à enrouler tranquillement sans sentir la moindre vibration. Et quand la petite route de montagne se transforme en lacet serré, la conduite devient un peu plus sportive, car elle emmène facilement son pilote avec une petite tendance à élargir en courbes. Pour autant, sa garde au sol est tout simplement impressionnante avec ses 142 mm et il faut vraiment rouler vraiment très très fort pour commencer à la faire toucher ou racler en virage, quand la très grande majorité des customs ont déjà fait entendre le chant du métal. Quand la grande majorité des customs frotte sans effort dans les ronds-points, rien de tel ici.

Essai Indian Chieftain sur départementale

Encore une fois, on peut enrouler tranquillement ou au contraire profiter du couple bien disponible dès 2.000 tr/min et dévoilant tout son gros coeur à 3.000 tr/mn. Les sensations sont bien là pour le plus grand plaisir du pilote et du passager qui doit alors bien s'accrocher.

Sur piste

Nombreuses sont les petites routes dans les parcs américains offrant des pistes plutôt que des routes bien goudronnées et les bas cotés sont généralement bien gravillonneux. La Chieftain s'en sort avec les honneurs, de part son centre de gravité bas et la possibilité de récupérer du pied une glissade éventuelle.

Essai Indian Chieftain sur piste

Freinage

Le frein avant freine... respectablement sans trop en faire malgré le double disque de 300 mm et les étriers double-pistons. Il offre un très bon feeling mais peine à freiner à lui seul les 369 kilos bien lancés de la machine. Comparativement, c'est le frein arrière avec pourtant son simple disque de 300 mm qui est particulièrement puissant, même sans appuyer fort. Et lui se révèle suffisant pour arrêter l'Indian. Les deux cumulés offrent toute la puissance nécessaire pour arrêter efficacement l'Indian même bien lancée. L'ABS très peu interusif est un plus.

Freins de l'Indian Chieftain

Confort

La fourche téléscopique de 119 mm et l'amortisseur arrière simple de 94 mm avec précharge mécanique offrent un excellent confort en gommant particulièrement bien les imperfections de la route. Le tout offre un confort souple, mais pas trop.

La selle de l'Indian offre une bonne et large assise confortable. Mais la première semaine de route au bout de 1.500 km de routes, on appréciait une pause au bout de 160 km. Mais à la fin de la seconde semaine et 3.000 km, on pouvait enchaîner 250 km. Le passager est un peu moins bien loti que le pilote par contre, même avec la présence d'un sissi bar. Mais au final, on peut faire de la route avec. On a fait 6000 km en 3 semaines à deux et sans souffrance. Attention par contre à la chaleur dégagée par le moteur et l'échappement côté droit dès que la température extérieure dépasse les 25°C... Le mollet droit peut souffrir à la longue et le pantalon de pluie n'y a pas résisté.

Selle de l'Indian Chieftain

Selle passager et sissi-bar sur l'Indian Chieftain

Consommation

En fonction du bon remplissage du réservoir de 20,8 litres, l'Indian dispose d'une autonomie d'environ 400 kilomètres. Le premier quart de la jauge est ainsi atteint à 120 km, la moitié à 200 km, le troisième quart à 290 km. Et le témoin de réserve s'allume alors vers 340 km. A noter qu'aux US, elle consomme de l'essence à octane 91 (le plus haut en fait, puisque les stations proposent du 84 et du 89 sinon et rien au-dessus du 91).

Indian Chieftain à une station service sur la route 66

Pratique

Les deux valises latérales offrent une bonne contenance avec leurs 32 litres respectifs, idéaux pour un week-end prolongé. Mais pour plusieurs semaines de routes, il faudra absolument ajouter un porte paquet arrière. Le passager appréciera également un sissi-bar. Il est également possible de monter des porte- paquets en métal sur les valises mêmes. Ce n'est pas indispensable mais pratique malgré tout et ce d'autant plus que cela s'intègre bien à la ligne de la machine.

Valise latérale de l'Indian Chieftain

Conclusion

Bien née, la Chieftain arbore tous les progrès d'une machine moderne avec un look rétro pour un style et une conduite plus coulée faisant la place au couple avant la puissance pure. On y gagne une tranquillité de conduite, non sans sensations avec ce gros coeur qui propulse fort dès les plus bas régimes et avec une vraie disponibilité qui en font un régal aussi bien en ville que sur autoroute. Il y a de l'espace à bord et avec un sissi-bar accompagné d'un support complémentaire, on peut même envisager de partir plusieurs semaines avec madame et ce, de façon confortable. Seul son prix à quand même 26.199 euros peut faire hésiter à franchir le pas ou commencer à regarder directement vers la version plus GT avec la Roadmaster.

Points forts

  • moteur et couple -> sensations
  • confort
  • consommation
  • espace à bord
  • finition globale

Points faibles

  • Chaleur moteur dégagée coté droit

La fiche technique de l'Indian Chieftain