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Essai Harley-Davidson Road King "107"

Nouveau moteur "Milwaukee-Eight" à 8 soupapes pour cette reine de la route

1745 cm3, env. 90 chevaux, 150 N.m à 3250 tr/mn, 361 kilos à sec, à partir de 24 490 €

Tiens, une Road King ! Un petit sentiment de déjà vu, peut-être, puisque ce modèle est au catalogue Harley-Davidson depuis 1994 en étant, à l'époque, vue comme une déclinaison "Sport" de la fameuse grande routière Electra Glide.

Harley-Davidson Road King '107' sur route rapide

Mais la dissimulation est un art majeur, surtout chez Harley-Davidson pour qui la préservation du patrimoine fait partie des fondamentaux : la Road King est donc fidèle à sa posture d'origine. Suffisamment équipée (valises rigides, pare-brise amovible, selle généreuse) et, en même temps, relativement dépouillée, sans autres fioritures que sa généreuse console de phare entièrement chromée et son régulateur de vitesse, géré par le commode gauche. Bref, une allure intemporelle, une classe éternelle et un look qui, à l'image d'une Cadillac Eldorado des fifties, annonce la couleur : à son guidon, la route est autant une philosophie qu'une question de style. Et les principes, ça se respecte.

Rappelons à nos fidèles lecteurs qu'il existe déjà sur le Repaire un essai de la Road King en version CVO ; il s'agissait à l'époque du très haut de gamme, avec moteur 110 (1800 cm3) et accastillage carrément premium.

Pare-brise Road King '107'

Pour 2017, la Road King se dote donc du nouveau moteur 107 Milwaukee-Eight, dans la première de ses trois déclinaisons disponibles, c'est à dire avec le refroidissement "traditionnel" par air et huile : ce bloc de 1745 cm3 est entièrement nouveau pour Harley-Davidson, il a donné lieu à 5 ans de développement, plus de 1,5 millions de kilomètres d'essais dans des conditions variées, ainsi que 7000 de salle des tortures (exercices sur banc de puissance où l'on alterne des accélérations au couple maxi, d'autres à la puissance maxi, entrecoupées de longues minutes de ralenti). Ses proportions sont un peu différentes, avec un carter de transmission primaire et un filtre à air (fort à propos signé "107") qui sont plus étroits que par le passé, au bénéfice de l'ergonomie. Notez que Willie G. Davidson lui-même a supervisé l'aspect esthétique de ce moteur, pour qu'il s'inscrive au mieux dans la lignée. Le filtre à air, les culasses polies et ciselées sont de bons moyens de les reconnaître.

Découverte

La force de cette Road King et la "107" comme la précédente "103" et les autres, c'est d'avoir réussi ce trait de dessin et d'en avoir fait un classique. Voilà une moto faite pour durer et on imagine que son propriétaire ne sera frustré de voir que chaque nouveau millésime s'accompagne de quelques nouveaux coloris. L'attrait d'une Road King dépassé ces frivolités. On notera cependant que comme une grande partie des modèles 2017, la Road King est également disponible dans une livrée noir et or du plus bel effet !*

Phare avant Road King '107'

Contrairement aux modèles plus carénés de la gamme Touring Harley-Davidson, une Road King n'est pas foncièrement intimidante. Sa selle est située à un raisonnable 705 mm de haut et, certes, le guidon est éventuellement un peu plus haut que sur d'autres modèles, sans que cela ne confine toutefois au ape hanger. D'où cette position "cool mais pas trop", qui invite à aller rouler. Par rapport à la Road King CVO essayée par le passé sur le Repaire, la Road King, "de base" et fut-elle "107", est moins clinquante dans sa présentation.

Moteur Harley-Davidson Road King '107'

On apprécie cependant la touche de modernité dans un océan de classicisme : le régulateur de vitesse, les fonctions du tableau de bord (2 trips, autonomie, horloge, rapport engagé et régime) accessibles via un bouton à l'index gauche au commodo. A noter que par rapport au tarif de base, qui correspond à une Road King livrée en noir, les peintures nécessitent un supplément : par exemple de 600 € pour le bleu / gris 2 tons ou 1000 € pour le "candy" illustrés sur cet essai.

Feu arrière

En selle

La grande force de cette machine lourde (361 kilos à sec, quand même !) est de faire oublier son poids par un équilibre remarquable. Et parmi les nouveautés de ce millésime 2017, Harley-Davidson a travaillé sur l'ergonomie de son nouveau moteur Milwaukee-Eight. Alors disons-le tout net : ça marche ! Effectivement, le filtre à air est plus étroit et le genou droit peut désormais se poser sur le flanc du réservoir pour mieux se caler sur la moto. On sent toujours le contact avec le sus-mentionné filtre, mais la protubérance qui imposait de rouler jambes écartées a disparu. Pareil côté gauche, avec un carter de transmission primaire plus étroit et une jambe gauche qui se pose sur la plateforme dédiée de manière plus naturelle. Harley-Davidson a donc réussi la prouesse de concevoir un moteur plus généreux en cylindrée tout en le rendant plus compact en apparence.

Une fois en selle, la Road King séduit par son environnement épuré : commodos massifs et logique dans leur emploi et surtout, cette gigantesque console de phare chromée, dont la filiation conceptuelle et esthétique remonte aux années 60. Le soleil se reflète dedans : ça donne immédiatement envie de rider !

Contact (on tourne le contacteur sur le réservoir), démarreur au commodo droit. On avait le souvenir d'un moteur qui subit l'épreuve dans un mouvement de sursaut qui donnait l'impression qu'il allait se décrocher du cadre. Mais le Milwaukee-Eight est monté souple sur des salent-blocs en caoutchouc et ne vibre plus autant. Ensuite, on avait le souvenir de passer la première d'un geste viril sur le sélecteur double-branche et d'entendre un "klonk" à réveiller les morts, avec ce sentiment que tous les pignons de la boîte venaient d'exploser et de faire une belle salade au fond du carter ! Ca aussi, c'est fini, avec une boîte de vitesse plus souple, plus silencieuse. C'est ça, l'effet Milwaukee-Eight !

Démarrage Road King '107'

Un autre effet du Milwaukee-Eight : avant, au ralenti, le guidon était pris de jolies secousses qui faisaient passer la tremblante du mouton pour un aimable divertissement. Et bien là aussi, c'est fini. Le guidon ne bouge plus ; on ne ressent plus les vibrations du V-Twin que gentiment, sous la selle...

Un dernier effet du Milwaukee-Eight : un régime de ralenti baissé d'environ 1050 à 850 tr/mn (tout en gérant vibrations, débit de pompe à huile et d'alternateur), histoire de récupérer l'effet "potato-potato" des anciens moteurs Harley qui ont nourri bien des nostalgiques. Et la réduction des bruits mécaniques (notamment dans le haut-moteur) permet de se concentrer sur l'essentiel et d'apprécier toute la saveur et la richesse de la sonorité d'échappement. Ce que nous ne sommes empressés de faire, avec toutes les machines ici en pots US (voire certaines en Stage 1, avec filtre et pots Screamin' Eagle) : cela risque de ne pas être tout à fait la même chanson avec les versions stock en France.

En ville

Précisions préliminaires : les grands boulevards de la ville de Tacoma (WA, USA), même encombrés du fret qui se rend sur le port, n'ont rien à voir avec la densité charmeuse et bigarrée de la rue du Faubourg Saint-Denis (Paris 10). Et joli paradoxe : dans un cas, même avec l'interfile interdit (il se met doucement en place en Californie, seul Etat américain à avoir réfléchi à la question), la ville est n'est qu'une formalité. Dans le second, avec l'interfile autorisé, il peut mettre la Road King à l'étroit.

Essai Harley-Davidson Road King '107'

Trois remarques, cependant : l'équilibre de la machine est, on l'a déjà souligné, bluffant. L'auto-stabilité est excellente et une fois que l'on a compris qu'il ne faut pas lutter contre la masse, mais au contraire, l'utiliser à bon escient, la Road King se manie (presque) comme une grosse 125. La recette : mettre tout de suite les pieds sur les repose-pieds, garder l'équilibre de quelques sensuels mouvements du bassin (le centre de gravité est juste sous vos reins) et mener cette grosse machine dans un subtil et suave mélange de décontraction et d'autorité.

Deux : le nouveau bloc Milwaukee-Eight à 8 soupapes est évidemment plus puissant (Harley reste timide sur les chiffres, mais disons qu'il est passé d'environ 80 à 90 chevaux) et plus coupleux (de 138 à 150 N.m) que le précédent. Mais en ville, ce sont d'autres attributs qui nous intéressent : la souplesse du moteur est remarquable, avec le gros V2 capable de reprendre à 1500 tr/mn en troisième, sans vibrations.

Trois : Harley annonce avoir travaillé sur la réduction des émissions de chaleur de ses moteurs (un vrai défaut en ville et l'été) et a conservé le désaccouplage partiel ou total du cylindre arrière au ralenti ; l'emplacement du silencieux arrière a d'ailleurs été modifié par rapport au précédent bloc "103". Nous n'avons pas fait de ville dans des conditions suffisantes pour juger de cette amélioration. Néanmoins, un long roulage sur les petites routes, parfois fraîches, de l'Etat de Washington, permettait d'apprécier une douce chaleur qui réchauffait les pieds. A confirmer, donc...

Enfin, plus douce et moins sonore que par le passé, la boîte verrouille parfaitement bien.

Harley-Davidson Road King '107' sur route

Sur autoroute et grande routes

Question essentielle : 2000 ou 3000 tr/mn ? Car selon l'endroit du monde où vous allez cruiser, ce sera-là votre régime de croisière sur le dernier rapport. Car aux States, avec les autoroutes limitées à 55 ou 60 miles per hour, vous serez a à peine plus de 2000 tr/mn en sixième. Et sur nos autoroutes françaises, ce sera 3000. Evidemment, la Reine de la Route est là dans son élément.

Bien calé sur la selle généreuse et épaisse comme il faut, on regarde le ciel se refléter dans la gigantesque console en chrome, les feux additionnels se chargeant de compléter ce cinémascope par un petit complément de ce qui se passe derrière : les bandes jaunes qui délimitent les routes américaines, le gros truck Kenworth chargé de grumes de bois que l'on vient de dépasser, sans effort.

Essai Harley-Davidson Road King '107'

Avec ce moteur 107, Harley-Davidson annonce des reprises améliorées de 11 % sur le test 100 - 130 km/h, sur le dernier rapport. Difficile d'être aussi précis sans appareil de mesure, mais ce qui est sûr, c'est que ce moteur est extrêmement rond et surtout, constamment disponible. Sur grande route, tournez un peu la poignée de gaz et il répond immédiatement ; essorez là d'un coup et il bondit dans un grondement sourd.

Sans se départir de cette inertie bien râpeuse qui fait le charme des moteurs Harley-Davidson, le Milwaukee-Eight répond toujours présent et participe aux formidables aptitudes routières de cette Road King.

Sur départementales

On entendra bien qu'une Road King n'est pas conçue pour aller se faire bousculer la tronche sur une départementale morvandaise. Certes. Néanmoins, on apprécie dans le sinueux son train avant neutre (et même, disons-le, léger par rapport aux autres modèles de la gamme Touring) ainsi que son agilité à se faire balancer du pif au paf. Mais ça, finalement, ça faisait déjà partie des qualités de la moto.

Essai Harley-Davidson Road King '107'

Ce qui est nouveau, donc, c'est encore ce satané Milwaukee-Eight. Le tempérament de nouveau moteur modifie sensiblement l'expérience de conduite. On a gagné en souplesse (le gros V2 accepte de tourner à 1700 tr/mn sur le dernier rapport, soit moins de 80 km/h et de repartir sans forcer ni se trainer) ; en réactivité, avec des reprises plus copieuses et en linéarité, avec une délivrance de la puissance constante jusqu'au rupteur, à 5500 tr/mn. Eh oui, c'est nouveau, on se surprend à aller taper dans le rupteur avec une grosse Harley de tourisme ! Mais malgré le passage de 2 à 4 soupapes, le régime maxi n'a pas été augmenté. La distribution par tiges et culbuteurs constitue de toute manière une limite mécanique...

Bref, que vous soyez en mode "énervé" ou en balade bucolique, le Milwaukee-Eight sait se plier à tous les usages. Et la boîte de vitesse confirme ses progrès dans ces conditions.

Harley-Davidson Road King '107' sur route US

Partie-cycle

La Road King dispose des nouvelles suspensions de la gamme Touring. A l'avant, une fourche conçue en collaboration avec Showa, avec deux nouveaux clapets pour une meilleure circulation de l'huile. A l'arrière, de nouveaux amortisseurs font l'apparition. Celui de droite est classique ; celui de gauche propose un réglage de précharge qui offre jusque 30 % d'amplitude de réglage en plus. Y accéder est facile : deux vis permettent de retirer aisément la valise latérale et il suffit ensuite de tourner la molette, qui dispose d'une vingtaine de crans.

Freins

La Road King dispose d'un freinage faisant appel à trois disques de 320 mm tous pincés par des étriers à 4 pistons. Ceux qui prétendent que les Harley ne freinent pas doivent rebooter leur logiciel : compte tenu de la vocation de la machine, le freinage est tout à fait correct, avec des transferts de masse plutôt contenus et un bon dosage que ce soit à la poignée ou a la pédale.

Confort et duo

La Road King ne ment pas : elle est faite pour dévorer des kilomètres. La selle est moelleuse et les heures passées au guidon se font sans souffrir. En fonction des morphologies, le pilote pourra trouver que le haut de la bulle arrive juste au niveau de son regard (pour les plus d'1,85 m), ce qui peut poser un dilemme à la Capitaine Haddock : je regarde au-dessus ou en-dessous de la bulle ? Néanmoins, celle-ci ne génère pas de turbulences. Le passager est bien installé, on pourra cependant le choyer avec un sissy-bar optionnel.

Selle Harley-Davidson Road King '107'

Consommation / autonomie

Harley-Davidson annonce une consommation en baisse grâce au double allumage des Milwaukee-Eight et à une meilleure gestion des flux d'admission d'air. Nous n'avons pas été en mesure de pouvoir mesurer les consommations sur cet essai. A vérifier ultérieurement, donc.

Harley-Davidson Road King '107' aux US

Conclusion

Evoluer de manière suffisante pour être en phase avec son temps (et les normes anti-pollution), sans révolutionner pour ne pas faire fuir la clientèle attachée aux valeurs de la marque : l'exercice n'est pas facile et le Milwaukee-Eight jouait une partie serrée. On y a cependant gagné de la douceur, de la puissance, de l'ergonomie et, normalement, de l'efficience énergétique. Ce qui s'appelle scorer sur tous les tableaux.

Certes, le caractère plus linéaire du moteur pourra chagriner les grincheux (qui auraient de toute façon trouvé à redire) : ce qu'il faut retenir, c'est le gain en souplesse et en disponibilité, donc, au final, en agrément. Et tout cela ne retire rien, au contraire, aux formidables capacités de la Road King à avaler la route avec style.

Points forts

  • Moteur souple, puissant, consistant
  • Ligne intemporelle
  • Aptitudes routières
  • Le confort dans le (relatif) dénuement
  • Bon freinage couplé
  • Plaisir de conduite global

Points faibles

  • Bulle qui peut être juste sous le niveau du regard des grands gabarits
  • Dispersion améliorée de la chaleur du V2 à confirmer lors d'un essai parisien
  • Gain en consommation à confirmer lors d'un essai parisien
  • Agrément sonore (échappement) en hausse à confirmer lors d'un essai avec une version française

La fiche technique de la Harley-Davidson Road King 107

Conditions d’essais

  • Itinéraire: 300 kilomètres de petites routes et un petit peu d'autoroute dans l'Etat de Washington (USA)
  • Kilométrage de la moto : 1000 km
  • Problème rencontré : aucun, faire de la Harley aux States, c'est toujours un kif !

La concurrence : Indian Springfield, Triumph Thunderbird LT, éventuellement Kawasaki VN 1700 Nomad.

Commentaires

MotoMotoVroumVroum

> (Harley reste timide sur les chiffres, mais disons qu'il est passé d'environ 80 à 90 chevaux)

Si la puissance n'est pas dans le dossier de presse, elle est sur la carte grise, le champ P2.

12-09-2016 17:39 
Phil G

Merci de cette info mais on a fait un essai aux States et Harley ne nous a pas donné les "grey cards" (à supposer que ça existe de manière équivalente là-bas clin d'oeil
Philippe

12-09-2016 20:43 
MotoMotoVroumVroum

Effectivement, ça ce tient sourire

12-09-2016 20:52 
Tchatch 68

C’est une moto très agréable pour rouler à deux. J’ai fait installer le top-caisse Harley et ma Dame est enchantée. J’ai rouler toute sorte de route : traverser la France jusqu’en Bretagne, rouler en Corse, arpenter les cols des Alpes. C’est une moto très bien équilibrée, avec le centre de gravité bas et très belle 🤩.
Pour moi, elle est plus facile à rouler que mon ancienne BMW R 1200 GS, dont le centre de gravité est trop haut ! Chargé et à deux, je l’avais versé deux fois à l’arrêt. Vive le ROAD KING 🤴

17-01-2024 07:37 
 

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