Essai : Burgman 848 Evo !

Coup de tonnerre sur le marché du gros scooter sportif : Suzuki prépare la sortie du Burgman 848 Evo, une machine équipée d'un twin de 115 chevaux qui va reléguer le T-Max dans la catégorie des utilitaires placides.

115 chevaux à 10.000 tours. 8,4 Nm à 8.250 tours. Ces deux chiffres à eux seuls suffisent à éclipser tout ce que l'industrie motocycliste a pu mettre sur le marché en termes de gros scooter ces vingt dernières années. Avec son Burgman 848 Evo, Suzuki va remettre les pendules à l'heure. Et probablement relancer une course à la puissance sur un segment que l'arrivée de BMW avait à peine fait frissonner. Même le confidentiel Aprilia SRV 850, fort de 75 chevaux, fera au mieux de la figuration face au monstre qu'a développé Suzuki.

Pour bien comprendre l'importance de l'arrivée d'un tel engin, faisons un parallèle avec le monde de la moto : le T-Max développe 46 chevaux, soit l'équivalent de ce que sort une modeste CBR 500. Le SRV dispose de la même puissance qu'une XJ6. La Burgman 848 Evo, lui, évolue du côté de la Ducati 899 Panigale. CBR 500 / XJ6 / 899 Panigale. Voilà l'écart entre ces trois machines. Inutile de s'interroger bien longtemps sur le résultat du comparatif qui s’ensuivra.

Le tour de force de Suzuki a consisté à allier la puissance brute d'un V-Twin cubant, on l'aura compris, 848 cm3 et les aspects pratiques du scooter. La roue avant -en magnésium forgé s'il vous plaît- mesure ainsi 17 pouces de diamètres, afin d'assurer une précision de guidage propre à la moto, en plus d'autoriser la monte de freins de grand diamètre. Mais à l'arrière, on retrouve une roue de 14 pouces afin de ménager un coffre sous la selle de pas moins de 53 litres. Tour de force technique supplémentaire : arriver à conserver d'esthétiques pots sous la selle tout en préservant ledit coffre et sans pour autant empiéter sur la selle passager, véritable pouf à rendre jaloux la Gold Wing. Comme sur tout bon scooter, le fond du coffre est tapissé de moquette et l'on trouve sous la selle une petite veilleuse fort pratique pour retrouver ses affaires dans le noir. A l'avant, on trouve un vide-poche de 8 litres. Equipement rarissime chez les sportives : une béquille centrale et un frein de parking ; voilà qui va nous changer des latérales mal gaulées / à rappel automatique / trop droites / inchoppables assis sur la bécane.

Le moteur, version survitaminée et réalésée du V-twin de la SV 650, est associé à une transmission automatique à courroie traditionnelle, mais le pilote dispose aussi d'un sélecteur au pied pour pouvoir faire vroum-vroum-vroap-vroap comme dans les albums de Michel Vaillant. Les bracelets sont certes fixés en dessous des tés de fourche, mais comme ils sont associés à une selle très basse située à seulement 710mm du sol, la position de conduite est très reposante. Les plus sportifs seront soulagés de constater que Suzuki n'a pas versé dans la déplorable manie qui consiste à doter sa dernière création d'un mode tantouze -pudiquement rebaptisé « mode pluie » par les autres constructeurs pour ne pas froisser l'égo des clients. Tout se fera à l'ancienne, c'est à dire à la poignée de gaz. Suzuki a d'ailleurs approché le Ministère de la Sécurité Routière pour les prévenir d'une probable hausse verticale de la population des virgules en sortie de virage et des traces de pneus au fond des calefouettes dans les semaines qui suivront la commercialisation de son nouveau Burgman.

Nous avons pu nous introduire dans l'une des bases secrètes* de Suzuki afin de tester l'un des prototypes, laissé bêtement là avec les clefs sur le tableau de bord et le plein de carburant, aux côtés d'une combinaison de pilote, un casque, des gants et des bottes à ma taille, coup de bol, en plus d'un tasse de Lapsang Souchong pile-poil à la bonne température. Merci, c'est trop sympa les mecs, mais gaffe ça risque de se voir.

Vu la hauteur de selle, enjamber l'engin est une formalité. Le large guidon permet de redresser la machine sans même y penser. En fermant les yeux, on pourrait presque se croire sur un Burgman 400 « stock ». C'est en pressant sur le démarreur que je redescends sur terre : le moteur s'ébroue dans un barouf de tous les diables. Pitain, les voisins vont morfler grave, hurk hurk hurk. La moindre micro-rotation de la poignée de gaz catapulte le Burgman en avant sans ce temps mort caractéristique que l'on retrouve sur certains scooters : l'embrayage multidisques en bain d'huile joue là parfaitement son rôle.

En roulant, on retrouve un mélange paradoxal de docilité et de confort d'une part et de brutalité et de rigueur d'autre. Au levier droit, on retrouve du très haut de gamme : un ensemble Brembo de 320mm de diamètre avec étrier et maître-cylindre radial. Au levier gauche, la partition est plus mesurée : freinage couplé avant/arrière d'un diamètre réduit afin de limiter le poids non suspendu.

Au fil des kilomètres, les deux facettes de ce scooter s'affirment de plus en plus : train avant ultra-précis, mais train arrière confortable et souple. Moteur rageur au-dessus de 7.000 tours, mais progressif en-dessous. Freinage surpuissant et chirurgical à droite et prévenant et docile à gauche. Une évidence s'impose : il faut lui donner un nouveau nom à cette machine mi-moto mi-scooter. Et je tombe très finement sur le terme « mooter », qui ne manquera pas de faire sourire les germanophones.

Voilà. Vous pouvez remballer vos T-Max et vos SRV. Le Burgman 848 Evo va les péter comme Goldorak un vulgaire Golgoth-13 dans un épisode où Actarus se foule même pas trop.

*là où une voix féminine sortant de hauts-parleurs dit : « le gros bouton rouge d'auto-destruction de la base secrète du méchant qui fait mouhahaha est situé sur le pupitre de commande à gauche. A gauche, j'ai dit... Non ! l'autre gauche ! Rhaaa, mais quel dé-bile !

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