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Essai Yamaha R1

Essai piste : Une R1 sinon Rien ?

Reine de beauté la R1 a séduit de nombreux motards par sa plastique et ses qualités dynamiques. En 14 années d’existence elle a déjà subit 7 évolutions, la dernière ayant surtout pour objet de lui adjoindre un antipatinage. Retour sur l’histoire d’une icône (déchue ?) …

1998 : naissance d’une star

Cette année là, Yamaha rompt avec les sportives polyvalentes Thunderace et Thundercat. La R1 est une moto sans compromis, qui renoue avec une longue tradition de sportives belles à couper le souffle. Des lignes fines, étirées, apparues dans les années 70 sur les 250 DS7 et 350 R5. La R1 illustre « l’esprit du Kando » cher à la marque, qui met en avant une profonde satisfaction et l’enthousiasme de posséder un bel objet… Indubitablement, la R1 a la beauté de l’efficacité et un pedigree qui impressionne : 150 chevaux, 200 kilos avec les pleins et 278 km/h en pointe, le tout dans un gabarit de 600 à l’époque. L’accastillage est au top : fourche inversée, étriers 4 pistons monobloc (plus rigides), culasse à 5 soupapes, système Exup à l’échappement et silencieux carbone (qui vieillit d’ailleurs assez mal). La partie cycle est exigeante et vive. L’amortisseur de direction n’est pas prévu en série, mais gare aux guidonnages !

Yamaha R1 1998

2000 : mise à jour

A peine 2 ans et déjà une remise à niveau. Esthétiquement, l’esprit reste. Le silencieux adopte une enveloppe titane. Les suspensions sont travaillées, la sélection améliorée et le moteur carbu est mis aux normes euro1. Malgré les évolutions, la R1 garde un pilotage très musclé… et tombe sur un os : la 1000 GSXR : 10 chevaux de plus et 10 bornes de mieux !

2002 : Injection et look « furtif »

Les lignes se tendent et pourtant la R1 adoucit son caractère. L’aérodynamisme y perd et la vitesse maxi aussi (elle tombe à 274 km/h). Le moteur reçoit une injection et gagne 2 cv dans l’opération. Il devient aussi moins brutal. Il passe désormais la norme Euro2. La 3ème génération du châssis Delta box est encore plus rigide. Le bras oscillant aussi est nouveau et l’ensemble est désormais peint en noir. Si la position de conduite est toujours aussi basculée sur l’avant, la R1 devient plus facile à piloter, mais conserve encore une tendance au guidonnage. Malgré des performances en net retrait par rapport à la « Gex », la R1 plaît et se vend bien. C’est même la meilleure vente des hypersport en 2002.

Yamaha R1 2002

2004 : L’état de grâce

Le nouveau design est un chef d’œuvre ! Cette japonaise a la beauté sensuelle d’une italienne.

Yamaha R1 2004

Le millésime 2004 est entièrement nouveau avec un moteur aux côtes nettement plus supercarrées pour monter plus haut en régime et gagner en puissance (77 X 53,6 contre 74 X 58 auparavant). L’alimentation est assurée par une injection double papillons. Yamaha annonce 172 cv à 12.500 tr/mn en statique, soit un bond de 20 chevaux ! En outre, la prise d’air dynamique doperait son moteur de 8 cv supplémentaires à la vitesse maxi selon le constructeur… Le cadre lui aussi est nouveau, comme le bras oscillant désormais renforcé par dessous pour laisser de la place aux tubes d’échappement. Les 2 silencieux sont maintenant situés sous la selle. La belle prend 3 kg au passage et affiche 204 kg tous pleins faits. On note l’adoption d’un amortisseur de direction. La fourche passe de 41 à 43 mm alors que le freinage est amélioré : les disques passent de 298 à 320 mm avec des étriers à fixation radiale.

Yamaha R1 2006

En 2006, Yamaha ne prend pas le risque de changer une recette qui gagne. L’évolution est discrète : bras oscillant plus long, répartition de la rigidité du cadre améliorée au profit d’une maniabilité accrue. Côté moteur on gagne 3 chevaux (175 en statique). Le tableau de bord reçoit une fonction chrono.

Yamaha R1 2006 SP

Pour les plus fortunés, une version SP de la Yamaha R1 fait son apparition avec suspensions Öhlins, jantes Marchesini forgées, peinture spécifique. Elle est proposée à environ 1.500 € de plus …

2007 : L’électronique prend le pouvoir…

Si esthétiquement les changements sont relativement contenus, on note par contre l’arrivée d’un accélérateur électronique et d’une admission de longueur variable censée rendre le moteur plus exploitable. L’évolution vers un modèle plus facile à piloter se confirme nettement. La techno-parade commence.

Yamaha R1 2008

Yamaha R1 2008

2009 2011 : le big-bang !

Nous voici donc arrivés à la version qui fait l’objet de notre essai. Avec ce modèle, Yamaha surfe sur les exploits de Valentino Rossi en GP et ceux de Ben Spies en SBK. Outre une importante métamorphose esthétique, l’actuelle R1 se caractérise par son moteur au calage « cross plane ». Cela signifie que les manetons du vilebrequin sont décalés de 90° et non de 180 ° comme c’est l’usage sur un quatre cylindres en ligne.

Yamaha R1 2009

Vilberequin cross plane

Concrètement, ce moteur en ligne se comporte comme un V4 ouvert à 90°. L’idée est inspirée de l’expérience acquise en GP. On a en effet constaté qu’un tel moteur délivre son couple instantané de façon moins saccadée, ce qui favorise la motricité. Cela suffira-t-il à faire de cette version une championne des pistes ? Commençons par un petit tour du propriétaire…

Découverte

Cette Yamaha ne trahit pas sa filiation. Elle est soignée, bien finie et très bien équipée. Esthétiquement, la version 2004 semblait plus aérienne et plus saillante, mais cela reste affaire de goût. Le regard a perdu en agressivité (c’est louche…) et les plastiques ont fait une abondante apparition…

Phares Yamaha R1

Cela étant, la belle a vraiment perdu la ligne car elle affiche désormais 215 kg tous pleins faits sur la bascule, ce qui fait d’elle la plus lourde des sportives moderne ! La technologie, ça a du bon mais ça se paye, sur la bascule comme en bas de la facture…

En selle !

Si la première R1 impressionnait par sa petitesse pour l’époque, cette version semble désormais volumineuse, surtout face à une Aprilia RSV4 par exemple… La position n’est pas des plus extrêmes, mais n’offre pas le confort d’une GSXR dont la polyvalence fait toujours référence malgré les années qui passent. Le tableau de bord est à la fois simple et joliment dessiné, comme c’est la tradition chez Yamaha où l’on a l’habitude de soigner les détails. Mais il n’est pas des plus lisible et ne dispose pas de commande au guidon. Outre un indicateur de vitesse engagée et une fonction chrono, on remarque aussi un graphique d’ouverture des gaz qui n’est pas forcément d’une grande utilité. Le compteur est digital.

Compteur Yamaha R1

Contact

Dès que l’on démarre le moteur on sent bien que quelque chose de « pas normal » se passe. Ce quatre cylindres a une sonorité pas catholique… un bruit de V4 en fait tout bêtement. Le décollage se fait en douceur, mais la souplesse a perdu un peu de l’onctuosité du 4 cylindres en ligne de la version précédente. Par contre, à l’évidence, ça tracte bien dès les mi-régimes.

En Piste !

Yamaha R1 sous la pluie

C’est essentiellement sur ce terrain que nous avons fait évoluer la R1, car son pedigree et sa haute technologie devraient y être mis plus en valeur que sur des départementales bosselées et en version 100 ch. D’autant qu’il est déjà difficile de juger des aptitudes d’un tel bolide pour un pilote ordinaire… Alors tant qu’à le faire, autant que ce soit dans de bonnes conditions.

Dès les premiers tours de roues sur piste, on apprécie la bonne disponibilité du moteur à mi-régime et la qualité des composants de la partie-cycle. Freins, suspensions, cadre bras oscillant sont à n’en point douter irréprochables. Ça ne tortille pas, rien n’est mou, tout est précis comme on est en droit d’attendre d’une machine à ce tarif. La motricité est excellente et grâce au calage du moteur on peu remettre les gaz sans craindre une dérobade. C’est particulièrement rassurant quand l’adhérence est précaire.

Yamaha R1 sous la pluie

On peut alors utiliser les 3 cartographies disponibles au guidon. Si l’un des modes bride réellement le moteur et peut servir sous la pluie, les deux autres se distinguent par une réponse différente du moteur à l’ouverture des gaz. En fait, grâce à l’accélérateur électronique on joue tout simplement sur le ratio entre l’ouverture de la poignée de gaz et l’angle d’ouverture des papillons. C’est plus ou moins brutal, mais dans ces deux derniers cas, à fond on dispose toujours de la même puissance maxi. Seul le dosage est plus ou moins délicat. Les pilotes les moins aguerris auront tout intérêt à opter pour le mode le plus soft des deux.

Modes Yamaha R1

Mais grâce à son calage cross plane, la R1 ne vous désarçonne pas. A telle enseigne qu’on se demande si l’antipatinage est vraiment ce qu’il fallait ajouter à cette moto pour la rendre encore plus convaincante ?

Yamaha R1 sur route

Car si la machine paraît volumineuse, elle semble aussi relativement pataude dans les enchaînements.

Yamaha R1 sur route

La faute à une légère surcharge pondérale sans doute, mais aussi à la répartition des masses. Avec ses échappements haut placés, la R1 affiche une inertie polaire importante qui pénalise sa vivacité lors des phases transitoires (entrée de courbe, redressement, pif-paf…).

Yamaha R1 sur route

A côté d’elle une Aprilia semble un véritable jouet ! pourtant sur la bascule l’Aprilia ne pèse que 2 ou 3 kilos de moins que la R1. Mais ces masses beaucoup plus centrées la rendent Ô combien plus vive ! ! ! De même le V4 Aprilia est plus rageur et excitant que « le faux V4 » japonais. En puissance pure la RSV4 n’a pas un boulevard d’avance (une bonne dizaine de ch au banc tout de même), mais au dela de 9/10.000 tr/mn, l’italienne creuse l’écart et ça se sent… Le Yam tracte bien, mais n’arrache pas vraiment. Que dire face à un BMW S 1000 RR ? A pleine puissance, la R1 accuse un déficit dépassant les largement les 30 ch sur le banc. Dans les lignes droites, la messe est dite…La BMW la dépasse avec plus de 15 km/h de mieux ! Pourtant aérodynamiquement Yamaha a bien repris les choses en main. En vitesse pure la R1 est performante compte tenu de sa puissance modeste pour la catégorie, elle offre aussi une protection très acceptable.

Freinage

Richement dotée la R1 dispose d’étriers 6 pistons monoblocs à fixation radiales. C’est puissant, dosable, efficace, irréprochable. Les 2 disques flottants de 310 mm ne bronchent pas malgré les kilos. Dans ce domaine la GSXR 1000 2010 ne peut lutter. Malgré toute la technologie embarquée, la R1 ne propose pas de système ABS sport. Dommage !

Freins Yamaha R1

Conclusion

Régulièrement remise à niveau la R1 accuse le poids des ans et le poids tout court face à la concurrence européenne en particulier. Les évolutions technologiques apportées sont certes importantes, mais elles nous rappellent qu’en matière de sportive l’un des fondamentaux reste le poids et sa répartition. L’autre c’est la puissance et dans ce domaine aussi la R1 marque le pas . D’où la déception en voyant arriver une version 2012 qui n’offre presque au final qu’un antipatinage en plus.

Yamaha R1 2012

Certes nous ne l’avons pas encore essayée, mais nos doléances n’allaient pas dans ce sens, bien au contraire. Grâce à la technologie crossplane la R1 revendiquait déjà une bonne motricité et une facilité d’exploitation de son moteur. Nous eussions préféré l’éternelle bonne recette : des chevaux en plus et des kilos en moins. Un échappement bas aussi pour réduire l’inertie de la moto dans les phases transitoires. Enfin bref, quelque chose dans le style de ce que nous ont fait les concurrents pour rendre la moto plus ludique et plus facile sur circuit. Car toute cette technologie embarquée à un prix qui situe la R1 au dessus d’une GSXR et d’une CBR plus polyvalentes.Elle est aussi plus chère que la nouvelle kawasaki ZX 10 R beaucoup plus moderne et puissante. Pour un tarif très proche vous pouvez aussi vous offrir une Aprilia RSV4 ou même une BMW et là, il n’y a pas photo comme on dit… Alors Monsieur Yamaha, même si cette R1 est superbement bien finie, on aimerait qu’elle se modernise un peu…

C’est d’autant plus surprenant que son contenu technologique est énorme, mais que face à une très classique GSXR « qui n’a rien » la Yamaha ne fait pas réellement la différence à l’usage sur route comme sur piste, sauf au freinage incontestablement. Mais remarquons que Suzuki a entendu la critique en équipant son modèle 2012 d’étriers Brembo, alors que Yamaha semble faire la sourde oreille…

Points forts

  • La finition et la qualité de fabrication
  • la facilité du moteur
  • Le fort contenu technologique.
  • La promo 2011 avec pot Akra et capot de selle pour 1 € de plus
  • Finitions

Points faibles

  • Le poids élevé
  • Les performances en retrait
  • Le rapport prix/performances

Concurrentes : Aprilia RSV4, BMW S1000RR, Ducati 1198, Honda CBR1000RR, Kawasaki ZX10R, MV Agusta F4, Suzuki GSXR-1000

La fiche technique de la Yamaha R1

Tarifs : R1 2012 15999 €
R1 2011 promo 14999 € pot akra titane + capot de selle + 1€