english

Roman : René (épisode 41)

Episode 41 : Le team GAGA, engagé en Mondial Superbike… !

Ce matin là n'est pas un jour comme les autres : un énorme semi-remorque vient de se garer devant le « Tourist Trophy »…

Le truc est neuf, bardé de sponsors, avec une peinture représentant un pilote en action, plein angle sur sa brèle carénée et l'inscription suivante dessous : Team GAGA – Mondial SBK !

Si tu suis les courses, tu n'es pas sans ignorer qu'il s'agit du fameux team Bordelais créé par l'ancien pilote Max IMUM-GATEUX, lequel fut une pointure des GP il y a un temps que les moins de cinquante ans ne peuvent pas connaître (merci Charles !), puis a fait fortune ensuite dans le domaine du préservatif.

Pour la petite histoire, le gars Max n'a pas vraiment décroché du milieu, même si ses activités de fabriquant de casques à chibre, comme il se définit lui-même, l'ont éloigné des circuits pendant plus de trente ans. Un pilote reste un pilote, et il revient toujours à l'univers qui l'a glorifié un jour.

Donc Max, maintenant à la tête d'une fortune conséquente (son activité est en constante croissance…), a décidé de monter sa propre écurie et de s'attaquer au mondial Superbike en y mettant les moyens. Un accord avec BIMOCATI pour les machines, des locaux flambants neufs avec de l'outillage dernier cri, une équipe technique à la hauteur, et un fabuleux pilote qui tente un come-back en la personne d'Alain TERIEUR , lequel fut multiple champion de France de vitesse sur route sur TERROT dans les années cinquante.

Max croit dur comme fer qu'Alain n'a pas eu sa chance à l'époque au niveau international, et que, malgré son âge respectable, il est encore assez vert pour dominer la génération actuelle. T'en penses ce que tu veux, mais lui a les moyens financiers pour mettre en œuvre son affirmation !

La fédé a bien entendu tiqué à sa demande, mais le chéquier sorti a rapidement convaincu les responsables de laisser sa chance au roi du latex…

Nous sommes lundi, et le mondial SBK débute ce week-end en AUSTRALIE. Personne n'a vu tourner Alain en essai cet hiver car ils ont travaillé loin des médias on ne sait où, préservant ainsi le suspense, mais aussi le scepticisme du milieu face à l'annonce de l'engagement de ce team pas comme les autres !

La porte du bar-restaurant s'ouvre : c'est Dave JMORLACRETTE qui vient de pénétrer dans l'établissement suivi du toujours fringant IMUM-GATEUX, lequel est particulièrement bien conservé pour un septuagénaire.

Fred, au parfum de l'actualité du sport moto, lève de grands yeux étonnés à l'entrée des deux personnages dans son rade :

« Le team GAGA ?????????, parvient-il à articuler au comble de la stupeur, je rêve ou quoi ?…

« Bonjour monsieur, dit Dave en souriant, nous venons de la part de Grigou THE KICK pour rencontrer René. Il nous a averti de sa présence dans votre établissement et on a absolument besoin de son aide »

René se trouve à l'étage en compagnie de Maurice et Ziva. La soirée d'hier ayant été une fois encore particulièrement arrosée, ils n'ont pas encore fait surface… Mais faut dire qu'il est huit plombes du mat' !

« Renéééééééé ???????? », fait Fred du bas de l'escalier.

« Mouaiiiiiis…., qu'est-ce tu veux ??? », grogne le Respectable après quelques instants.

« Y'a du monde pour toi qui vient de loin… », répond le tenancier.

« On peut pas m'lâcher un pneu, non ? J'peux même plus cuver peinard sans qu'on vienne me les briser !!! T'as vu l'heure ???? »

Superpapy a sa voix des mauvais jours. René, faut jamais le bousculer dans ces cas-là !

« C'est ton pote Dave, avec une petite surprise… Ils tiennent VRAIMENT à te voir… »

« Bon…, tu les fais poireauter cinq minutes, le temps que je retrouve un poil de mon aspect humain, et je descend… », soupire Pépère, un peu radouci.

L'Ancien semble avoir pris dix ans de plus quand il se présente au bar de l'hôtel, il salue son pote, lequel lui présente Max.

« Avant tout les gars, vous aller m'excuser : faut qu'j'émerge, souffle René en se massant le haut du front. Fred ?, tu m'fais un KAWA de compét' qui monte assez dans les tours pour m'faire passer ta tisane d'hier au soir ? Bon sang, j'ai l'impression d'avoir l'mégaphone d'un vieux mono anglais dans les étiquettes… »

Une étrange métamorphose se produit pendant que le Vénérable ingurgite son breuvage. Les traits de son visage se lissent, la brume disparaît de son regard, et bientôt le voilà comme à son habitude. C'est surprenant pour qui n'est pas habitué à côtoyer le Phénomène, mais René est décidément un être à part !

Les autres attendent sans dire un mot que Pépère finisse son rituel. Celui-ci, une fois le café expédié, marque un temps d'arrêt, s'étire, les regarde un à un, puis se décide enfin à parler :

« C'est bon, j'vous écoute ! », fait-il d'une voix éclaircie.

Max semble vraiment embarrassé. Aujourd'hui ils doivent convoyer le semi-remorque jusqu'à l'aéroport international de Nice pour y décharger les caisses qui vont être transportées par charter en direction du circuit de Philip Island, seulement, y'a un hic… Alain TERIEUR, le pilote attitré, est out !

Le responsable du team explique les difficultés par lesquelles il est passé pour monter son aventure. D'abord trouver des arguments pour se faire admettre auprès de la fédé avec un projet aussi farfelu, décidé un constructeur à lui confier les machines, remettre à flot son pilote fétiche qui, malgré un talent intact, accuse quand même un certain kilométrage (mais c'est le but de son implication…), trouver des locaux, de l'outillage et la main d'œuvre pour le bon fonctionnement de l'équipe (pas facile de convaincre les ténors du milieu, lesquels tiennent à préserver une image qui risque d'être mise à mal en cas de flop). Mais sa fortune et son enthousiasme ont fait sauter les barrières des plus réticents. Faut dire aussi que son entreprise est réputée, de part son activité particulière, pour son banc d'essai composé d'une multitude de créatures de rêve dont le Max se sert sans vergogne aux fins de promotion de sa boîte, laquelle est en passe de chiper le leadership du marché au number one dont je ne te ferai pas l'affront de te citer le nom…

Bref, tout se passait bien, Alain avait retrouvé une seconde jeunesse au guidon d'une moto parfaitement au point avec des temps rapidement au top, grâce notamment au talent du chef mécanicien de l'équipe, Albert Poncharal, l'oncle du célèbre team manager de Tech 3.

C'est certain, le team allait surprendre les sceptiques à l'ouverture du championnat…

Seulement voilà, Alain TERIEUR est à l'hosto depuis deux jours suite à un tour de rein. Celui-ci est employé par Max comme pilote essayeur à temps partiel des prototypes qui sortent du bureau d'étude de son entreprise et, chevauchant une fougueuse demoiselle chaussé d'une capote aphrodisiaque inédite, il s'est sorti après une brusque accélération…

Il s'est avéré ensuite que le dosage du dit préservatif était quelque peu excessif !!!

Alain H.S., alors que la saison débute ce week-end, et c'est le drame pour l'équipe. Un seul pilote et pas de remplaçant sur le marché ! Il n'est bien entendu pas question d'engager un pigiste de la génération actuelle car le but du patron est de démontrer que le poids des années n'a pas prise face au talent…

Déclarer forfait ? Impossible car l'organisateur et les sponsors vont exiger un dédommagement trop important qui risque de compromettre la suite de la saison !

C'est là qu'est intervenu Dave. Le génial informaticien et fondateur du Repaire des Respectables est un ami de Max, lequel finance aussi une bonne partie du site (ce qui n'est pas négligeable…). JMORLACRETTE, à part tapoter sur son clavier et gatouiller avec son poumonesque roadster SUCEKIKI (mais à son âge, c'est plus raisonnable…), s'adonne aussi aux plaisirs charnels et, par voie de conséquence, fréquente régulièrement le bureau d'étude de son pote et mécène. C'est lui qui a parlé de René à Max ; si un seul gars au monde est capable de remplacer au pied levé Alain, c'est lui et personne d'autre. Reste maintenant à le persuader de participer à l'aventure, et là, Dave a sa petite idée…

Pour l'instant, Pépère est pas convaincu.

« C'est pas possible, commence l'Ancien, j'prend quelques jours de vacances histoire de décrocher un poil, et v'là qu'on m'relance sur mon lieu de villégiature : vous pouvez pas m'lâcher de temps en temps ???
Toute façon, là on cause d'un championnat du monde, pas d'essayer une bécane. J'ai beau être capable de tourner une poignée, faut p'têt pas m'surestimer non plus…
En plus, partir comme ça, j'aime pas, et en AUSTRALIE pour couronner l'tout ! Va falloir trouver autre chose…
Et puis, franchement, j'la trouve un peu foireuse cette idée de défier des pros en activité sur leur propre terrain quand on est déjà trop mûr pour la catégorie vétérans !

« Là René, t'exagères, proteste Dave, quand on voit ce que t'es capable de faire avec SARRON d'abord, et y'a pas longtemps sur la M1 à ROSSI, t'es en totale contradiction avec tes paroles. Franchement, ce projet, j'y crois dur comme fer ! Il n'est évidemment pas question de songer au titre ! Faut quand même être réaliste, mais un ou deux coups d'éclats, pourquoi pas ? »

« René, tu permets que je te tutoie et te nomme par ton prénom, enchaîne Max, c'est le rêve de ma vie que je tente de réaliser. J'ai trimé pendant des années pour arriver ou je suis après avoir arrêté la compétition sans jamais avoir été titré, même si j'ai fait une belle carrière. A mon âge, je ne peux qu'être de l'autre côté de la barrière et c'est pour ça que j'ai décidé de relancer Alain. Je suis sûr qu'il a encore des trucs à montrer, que je pourrais vivre à travers lui. Une sorte de come-back par son intermédiaire en sorte. En plus, si j'ai raison, quel pied de nez à toute la jeune génération… j'me marre d'avance !
Si c'est l'fric qui t'intéresse, pas d'problème, j'assume, tu demandes et je signe…
Et puis c'est juste le temps qu'Alain soit réparé. »

René secoue toujours la tête :

« Même si j'accepte, t'as vu le niveau cette année ? On peut peut-être faire illusion sur un tour ou deux, sans doute. Mais franchement, à notre âge tenir toute la course (deux manches j'te signale…), on a plus la condition pour ça. De plus, ta bécane, j'la connais même pas…
Moi j'dis que c'est un truc à se ramasser grave de chez grave ! »

« Et bien laisse-moi en prendre le risque et accepte ! Si tu as raison, c'est moi qui plonge, pas toi car les gens verront bien que tu auras fait le maximum. Ca, j'le pense après avoir étudié ton parcours, et je crois avoir cerné quel genre de gars tu es dans ce domaine bien précis.
Le public comprendra lui aussi. Mais je reste persuadé que ça peut le faire ! »

A ce moment, Maurice et Ziva font leur apparition. Après un récapitulatif de l'histoire, les avis sont partagés. Le frangin juge René capable de surprendre, même au guidon d'une brèle inconnue, et Ziva, quand à lui, se montre aussi sceptique que le principal intéressé. Bref, on n'a pas avancé d'un poil et Pépère se montre toujours aussi réticent.

Soudain, Dave décide de lancer son va-tout…

Sans un mot, il se lève, sort du bar et fonce directement vers l'une des portes du semi-remorque pour l'ouvrir d'un geste théâtral…

T'as déjà vu les girls du Crazy Horse Saloon ? Ben, imagine un peu une bonne vingtaine de ces magnifiques créatures se radinant vers toi ; c'est exactement ce qui vient de passer !

Elles sont un peu plus vêtues, mais si peu dans leur fine combinaison transparente à l'effigie du fabriquant de capotes, elle viennent de pénétrer dans le rade à Fred telle une vague déferlante dont la beauté d'ensemble les laisse scotchés sur place…

« Les Umbrella Girls du team GAGA !!!! » lance Dave avec un clin d'oeil envers René, lequel vient de manquer de s'étouffer…

« Là, c'est pas loyal, dit ce dernier sitôt qu'il a un peu récupéré, j'accepte, mais c'est juste pour rendre service. Et Maurice vient aussi ! »

Max pousse un cri de joie, relayé par Dave et… par l‘ensemble des filles dont l'enthousiasme fait peut-être partie du boulot, mais avec un professionnalisme qui laisserait facilement croire que tu es le centre du monde. Et bordel ce qu'elles sont craquantes…

Isabelle, attirée par le bruit, semble elle aussi abasourdie par la vision qui s'offre à elle. Mais celle-ci soutient largement la comparaison sans avoir besoin d‘un quelconque artifice pour cela. Fred, d'ailleurs, malgré la présence de ces superbes filles dans son établissement, jette un regard rassurant envers sa femme, même si cette dernière n'a jamais douté de ses atouts bien réels.

René Gédeufoitrentans "le gatouillable" by Sato

Episode précédent | Episode suivant