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Roman : René (épisode 48)

Episode 48 : Le warm-up…

René est dans son box, équipé de cuir. Il attend tranquillement en discutant avec Max, Dave et son frère, que retentisse la sirène donnant le départ de la toute dernière répétition avant le début des hostilités. La moto numéro un se trouve déjà à l'extérieur, équipée des couvertures chauffantes, avec les mécanos affairés aux ultimes vérifications sous la direction d'Albert.

Aucune tension ni appréhension particulière ne semble lisible sur le visage de l'Ancien. Il plaisante sur les « performances » de son frangin, qu'il compare à une espèce de Hide de la gent féminine dès l'absorption de son curieux breuvage, conseillant néanmoins à ce dernier d'éviter d'en verser dans le réservoir de sa KAWASUKI. Cette dernière, à l'image de son propriétaire, risquerait de grimper sur son pilote… Et à son âge, deux cent kilos de métal sur le dos, vaut peut-être mieux éviter ! Hilarité totale dans l'assemblée, sauf de l'intéressé en question qui rétorque que le moment venu, y'en a un qui sera bien content d'en avoir recours pour booster l'injection de sa BIMOCATI…

Ce qui me fait en revenir au fameux stratagème du team GAGA. René n'aura droit qu'à trois impulsions au cours de la manche, et va falloir s'en servir à bon escient…

Cette fois, la sirène vient de retentir. Pépère, toujours aussi calme, enfile son casque en vérifiant la jugulaire, puis ses gants. Ensuite, il se lève et sors du box pour se diriger vers la machine qui chauffe à renfort de grands coups de gaz, les couvertures chauffantes enlevées. René, avant de grimper sur la moto que lui tend Papy, jette un regard autour de lui et croise les yeux de Régis LACONI, sorti du box voisin. Celui-ci lui lance un sourire et lève le pouce en l'air, comme pour l'encourager. Puis c'est le moment de s'élancer pour l'ultime répétition. Pépère enfourche son trois cylindres, abaisse la visière de son casque, et doucement, lâche l'embrayage en tournant la poignée droite.

L'équipe s'est mise d'accord pour que René ne recherche pas le chrono. De toute façon, sa place sur la grille est déjà déterminée. Son rôle va être de déterminer la bonne monte pneumatique pour la course, à partir des réglages fixés la veille. Son manque d'expérience l'a en effet obligé à ne se consacrer qu'à la mise au point de la partie cycle et du moteur. Se perdre en plus avec le choix des gommes, surtout avec cette météo aléatoire, aurait risqué de passer à côté d'un bon setting.

L'ancien commence d'abord par effectuer deux tours de reconnaissance, puis en effectue trois en 1'37, et regagne les stands.

« Elle marche pas mal, très stable au freinage, mais j'ai un peu d'mal à la faire plonger et on dirait qu'elle fuit la corde. Passez moi un soft avant ! Par contre, j'garde l'arrière, si il tient toute la manche, ça va saigner !!! »

Plutôt motivé, Pépère ! Aussitôt l'équipe s'exécute, tandis que Juju effectue les premiers relevés télémétriques.

René repart pour un tour de lancement, puis un tour « vite » en 1'35. Nouveau retour par les stands de l'Ancien qui a le sourire aux lèvres, au grand soulagement de son équipe.

« Au poil ! », fait-il, visiblement satisfait.

Vérification de l'état des pneus et nouvelle intervention de l'informaticien. OK !, fait celui-ci à Albert, un peu anxieux. Ce dernier s'adresse alors à « son » pilote :

« Bon, si la monte te convient, tu vas maintenant partir pour dix tours rapides, dans le rythme de la course ; c'est à dire, aux alentours des 1'36. Ensuite, sauf si un truc cloche avant, tu repasses au stand et on vérifie l'usure pour être certain que le soft va tenir la manche, ça marche ? »

« OK pour ça ! », répond René en reprenant la piste.

Un premier tour de lancement, puis Pépère commence à visser. Il oscille entre 1'35 et 1'37, au gré du trafic sur la piste, mais à chaque passage le Respectable lève le pouce en l'air en passant devant le muret des stands. Tout semble se dérouler pour le mieux dans l'immédiat. Seuls LACONI, CORSER et KAGAYAMA semblent avoir déjà commencé à s'expliquer ! Les trois hommes ne se lâchent pas et tournent régulièrement en 1'34, comme pour se défier. Ce rythme sera quasiment impossible à imprimer en course, mais on sent que le trio piaffe d'en découdre et cherche à impressionner l'adversaire…

René, pour sa part, besogne dans son coin. Il continue de s'habituer tranquillement à sa BIMOCATI sans prendre le moindre risque, s'appliquant à chercher de nouvelles trajectoires en s'efforçant de conserver le même rythme. Bref, il se prépare tout en testant la longévité des ses pneus, et pour l'instant, la belle italienne semble tenir la cadence sans problème.

Dixième tour d'affilée de bouclé et nouveau passage au box. Pépère est dans son truc, concentré au possible, le regard au loin mais l'œil brillant…

L'équipe se précipite sur la moto, tandis que René redescend lentement sur terre : un pilote est toujours dans un état second, même après un round d'une dizaine de tours, quand approche l'heure du premier départ. A partir de ce moment, il ne voit plus rien, n'entend plus personne. Il est déjà dans sa course et ne fait qu'un avec sa machine. Seule compte pour lui alors le tracé de la piste dont l'image ne le quittera plus avant le premier feu vert.

La BIMOCATI, rentrée dans le box, est aussitôt auscultée tandis que René, toujours casqué, vient s'asseoir sur le fauteuil qui lui est réservé. Il s'enfile, à l'aide d'une paille, une boisson énergétique que lui tend Maurice, tandis qu'Ovomaltine recharge les écrans jetables de la visière de l'Ancien, toujours silencieux.

La seconde machine se trouve à l'extérieur, prête à partir. Un simple regard entre Albert et René suffit. Superpapy se relève, sort du box, enfile sa monture et repart. Dix nouveaux tours sont effectués, sensiblement dans les mêmes chronos, dont un en 1'34'3. Puis Pépère lève la main, regagne la voie des stands et rentre cette fois définitivement. Le warm up n'est pas encore fini, mais René est prêt, sa moto aussi…

Toujours dans un état second, il enlève ses gants, son casque, et regarde sa machine avec une lueur bizarre dans les yeux (Max et Albert l'observent sans rien dire : ils savent exactement ce que l'Ancien ressent à ce moment…). Puis le Respectable tombe le cuir, toujours sans parler, enfile un jean et un tee-shirt, puis sort du stand et regagne sa chambre une bonne demi-heure. Besoin de se retrouver seul pour se préparer mentalement. La pression monte dans l'équipe. Dehors, le warm up des supersports vient de débuter. Dans une heure très exactement, le départ de la première manche du mondial SBK sera donné…

Trente cinq minutes plus tard, l'Ancien est de retour. René semble présent beaucoup plus détendu, il est même arrivé en sifflotant ! Dans le team, par contre, la tension est à son comble : Max n'arrête pas de griller sèche sur sèche, Albert vérifie cent fois les relevés télémétriques de Juju, tandis que les trois mécanos continuent de s'affairer sur les machines. S'agit pas de se louper pour un détail oublié…

Pendant ce laps de temps, y'en a trois qui se sont fait gentiment refouler à la porte du box : le gars MONNERET et le duo BLANCONOVITCH/JBT. Pas d'infos ni interview avant la fin des courses, consignes du boss. C'est Maurice, accompagné de Dave, qui s'est chargé de les éconduire en y mettant les formes (on est jamais trop prudent avec la presse…)

René s'équipe maintenant tranquillement, et c'est fou ce qu'il semble calme alors que le départ est prévu dans moins de quinze minutes !

Max s'approche de lui, un peu étonné par l'attitude du Respectable :

« Dis-donc, mon vieux, t'es OK ??? »

René le regarde en rigolant, tout en finissant d'enfiler le cuir :

« Relax, mec ! J'crois qu'j'ai jamais été aussi en forme. J'avais b'soin d'rester seul, histoire de r'visionner tout ça tranquillos, pis j'ai pensé qu'un peu d'étirements me f'raient pas d'mal : alors j'ai fait quelques exercices… »

A ce moment, une girl vient de pénétrer dans le stand. Belle plante dans son collant moulant ses formes généreuses, mais la fille semble un poil essoufflée par un effort récent, et sa magnifique chevelure est ébouriffée… En passant devant Pépère, elle lui lance une œillade de connivence !

Max, voyant le manège, éclate de rire et déclare à l'Ancien :

« Toi ? On peut pas dire que tu fais les chose comme tout l'monde… !!! »

René rétorque, en se marrant aussi :

« Celle-là au moins, au niveau réglage, elle est parfaite. Tu verrais comme elle pousse en sortie d'courbe… »

La sirène vient de retentir : le trois cylindre chauffe déjà à l'extérieur, et Pépère se lève en sifflotant pour sortir du box et se diriger vers la moto que lui tend Albert. D'un coup, le regard du Respectable semble avoir retrouvé toute sa concentration. Il entame le tour de formation et vient se placer sur la quatorzième position de la grille de départ, juste à côté de son copain MC COY.

Tout le monde a coupé les moteurs, et les machines sont maintenant béquillées, les pneus revêtus des couvertures chauffantes. Chaque pilote a enlevé son casque, pour la présentation au public. Au delà de la première ligne, un pilote attire particulièrement l'attention. Le team GAGA au grand complet est rassemblé autour de René, avec les vingt filles en collant… Je peux t'assurer que ça ne passe pas inaperçu ! Les caméras n'arrêtent pas de zoomer dans leur direction, en s'attardant très peu sur le reste du plateau. Déjà le fait de l'age du Respectable, lequel semble avoir débarqué comme un chien dans un jeu de quilles, même si son temps de qualification ne reflète pas vraiment l'exploit réalisé. Alors, avec de plus les activités sulfureuses du boss de l'équipe, et entouré ainsi, l'équipe en jette et les journalistes n'ont qu'une envie : réussir à obtenir quelques mots de René avant le départ. Là, les filles, toujours sur instruction de Max, ont formé une espèce de bouclier autour de l'Ancien, empêchant ainsi une quelconque intrusion.

Soudain, la sirène retentit de nouveau ! Les mécanos redémarrent les moulins, enlèvent les couvertures chauffantes, et bientôt ne restent sur la piste que les pilotes sur leur machine. Un commissaire, deux drapeaux jaunes à la main, commence à les agiter, libérant ainsi les lignes pour le tour de formation. Cette fois, c'est parti…

Tourne vite la page suivante… Si t'aimes les émotions fortes, tu vas être servi !!!

René Gédeufoitrentans "le gatouillable" by Sato

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