Essai Brixton Cromwell 1200

A l'attaque

Bicylindre en ligne de 1.222 cm3, 82,9 cv, 108 Nm, 235 kilos, 9.999 euros, 11499 euros

Cromwell ! Oliver Cromwell ! Un général britannique qui a chassé les royalistes en 1642. L'image est claire, Brixton veut chasser du Britannique. Et avec le look sans équivoque de la Cromwell 1200, la cible est évidente : la Triumph Bonneville T120. Cromwell a été vu par beaucoup comme un héros, symbole de la liberté et par d'autre comme un véritable tyran. Ce qui est sûr c'est que le modèle néo-rétro s'est fait attendre depuis sa présentation en 2020, qui laissait entrevoir une arrivée plus rapide, contrariée comme tous les constructeurs pour arriver finalement en cette fin d'année 2022. Alors comment Brixton se positionne-t-il sur un marché totalement nouveau pour la marque, plus habituée aux 125 néo-rétro dans la suite des Mash que de grosses cylindrées, même si le constructeur avait détonné en proposant une vraie nouveauté au look unique avec la Crossfire 500 que nous avions essayée alors (avec au passage un problème de phare clignotant). La Cromwell 1200 passe clairement dans la catégorie supérieure, notamment en termes de motorisation. Mais comment se positionne-t-elle vraiment par rapport à sa concurrente aussi bien au niveau finition que motorisation et pas uniquement prix.

Car ce qui est sûr, c'est que le prix est imbattable juste sous la barre des 10.000 euros, soit 3.600 euros de moins que l'originale ou au même tarif qu'une SpeedTwin, mais en 900 du coup (anciennement Street Twin). Mais que peut-on avoir réellement pour ce prix ? En attendant, Brixton est surtout le groupe KSR est à prendre au sérieux, avec ses 60.000 motos vendues par an, soit plus que certains constructeurs européens mais aussi avec des marques comme Lambretta et Malagutti. Essai...

Découverte

Phare rond, réservoir goutte d'eau, double amortisseur arrière, fourche à soufflet... Tous les codes des classiques sont respectés. Et pour le non-connaisseur, de loin, nul doute, c'est une Bonneville et surtout une T120. Mais que se cache-t-il vraiment sous le réservoir, au propre comme au figuré.

Et bien on retrouve une motorisation très proche de l'original, avec un bicylindre en ligne 4 temps à refroidissement liquide de 1.222 cm3 avec un calage à 270° associé à une injection électronique Magnetti Marelli et répondant à la norme Euro5, incluant des modes de conduite. Côté performances, le twin délivre 82,9 chevaux à 6.550 tr/min et 108 Nm à 3.100 tr/min. On est donc sur le papier très légèrement au-dessus de la principale concurrente ciblée qui assure 80 ch et 105 Nm aux mêmes régimes. La Cromwell affiche ainsi respectivement 3 chevaux et 3 Nm de couple en plus.

Et le tout pour le même rapport poids/puissance, puisque les deux motos ne sont séparées que d'un kilo. La Cromwell a un petit avantage au niveau look avec des plus gros pneus, aussi bien à l'avant qu'à l'arrière, renforçant l'aspect cossu, même si les tailles des jantes sont identiques. Même les disques sont un peu plus gros à 260 mm contre 255 mm à l'arrière, alors qu'à l'avant les deux sont en 310 mm. Freins Nissin (mais Brembo pour la Bonnie), ABS Bosh, pneus Pirelli, l'équipement est de qualité. Et c'est aussi le cas au niveau électronique avec les assistances avec un contrôle de traction (désactivable au commodo droit), un régulateur de vitesse et deux modes de conduite. Et puis on a un vrai réservoir de 16 litres, par rapport aux 14.5. litres de la Bonnie. On a enfin un vrai éclairage à LED à l'avant et à l'arrière, avec un joli feu avant et le logo Brixton au centre ainsi qu'un joli et discret feu arrière rond. Même les clignotants sont petits et particulièrement discrets.

On note une finition en nette hausse et tous les petits détails, comme le logo Brixton qui se retrouve dans le phare, sur les flancs de réservoir, en bout de selle, sur le moteur ou encore sur le plastique (qui veut ressembler au cuir) des poignées. Même les soudures sont propres et les fils plutôt bien cachés. Certains constructeurs plus premium font moins bien, même si Triumph est vraiment le constructeur le plus qualitatif au niveau des détails et de la finition et que la Brixton n'est pas au même niveau (il y a bien une raison à la différence de prix).

Mais on le sait, les fiches techniques cachent souvent des grandes différences. Et la différence se fait en selle.

En selle

800 mm. Le pilote d'1,70m se tient sur le bout de pieds, avec une selle plus de haute de 20 mm par rapport à la Bonneville et ses 780 mm plus accessibles. On découvre alors un compteur qui ressemble à un vieux compteur analogique mais qui est bien un vrai écran TFT, par rapport au compteur analogique avec une petite fenêtre digitale de l'original. Du coup, le compteur change même visuellement en fonction du mode de conduite : Eco ou Sport. En mode Eco, il y a toutes les informations avec compteur, compte-tours, rapport engagé, jauge à essence, trop partiel, horloge... alors qu'en mode sport, il y la vitesse et le compteur tours et le rapport engagé. Il y a moins d'informations, mais du coup, c'est aussi beaucoup plus visible, notamment la vitesse.

Il y a même un port USB au compteur, pratique pour alimenter un smartphone au guidon.
Les petits rétroviseurs offrent une vue réduite, même si cela suffit (quand ils ne se dévissent pas, ce qui oblige à avoir une bonne clef avec soi).
La position est naturelle, très sensiblement basculée vers l'avant par rapport à une position droite, mais sans excès.

Contact

Le bicylindre s'ébroue calmement dans un bruit feutré. Première, la boite est précise mais les rapports courts. Autrement dit, on passe rapidement la seconde, aux environs de 45 km/h sans attendre les 70 km/h où le bi atteint la zone rouge.

En ville

La Cromwell se prend facilement en main, de part la position de conduite naturelle, un bon équilibre qui ne fait pas ressentir les 235 kilos, alors que les jambes enserrent naturellement le réservoir. Seuls les caches du moteur gênent un peu au début au niveau des mollets mais on finit par s'y habituer. Et si la chaleur du bicylindre remonte assez vite en ville, elle s'oublie dès que l'on prend les petites départementales.

Le bicylindre est assez souple pour accepter d'enrouler sans broncher sous les 2.000 tr/mn et du coup, il est possible de rouler en cognant sur le sixième et dernier rapport en ville. Mais en fait, on ne le fait jamais, pour s'installer plus généralement entre le 2e et le 3e rapport.

Le mode Eco, malgré son nom, n'a rien d'Eco en comportement, étant relativement brusque et demandant de doser la poignée. Il aurait mérité le nom de mode "Route", plus proche de son comportement réel. Et on évitera en ville le mode Sport, vraiment brutal.

Les suspensions Kayaba enfin font un excellent travail non seulement sur une route propre mais également sur les pavés, que l'on ne sent quasiment pas et ce aussi bien en solo qu'en duo.

Sur autoroute

La Cromwell se cale tranquillement à 110 km/h à 3.000 tr/mn, puis 130 km/h à 4.000 tr/mn... sans aucune protection, sans surprise. On pourrait lui faire prendre 170 km/h en oubliant son permis tout en utilisant le régulateur de vitesse, mais l'autoroute n'est pas faite pour elle, même si la moto est stable et offre un excellent comportement.

Le régulateur s'enclenche facilement d'un appui long de 3 secondes et s'active à partir du moment où l'on est entre 30 et 160 km/h, quel que soit le rapport. On peut alors accélérer et la Cromwell reprend sa vitesse régulée automatiquement dès que l'on relâche ensuite l'accélérateur. Il n'y a par contre pas de possibilité d'augmenter ou diminuer la vitesse du régulateur via des boutons.

Sur départementales

Le mode Eco se révèle largement suffisant sur petites départementales, permettant d'enrouler et de rouler vite, avec un excellent rythme. Le mode Sport apporte du peps en plus pour commencer à arsouiller sévèrement et donner à son conducteur l'impression d'être un pilote, malgré les seulement 80 chevaux (82,9 exactement). La partie cycle est très saine et les suspensions efficaces sans comportement parasite auquel on aurait pu s'attendre vu le confort proposé par la Cromwell.

On commence par contre à bien sentir les vibrations à partir de 4.000 tr/mn et jusqu'à la zone rouge. Il y a les bonnes vibrations sur certaines motos et puis ces vibrations bien présentes qui sont le défaut de la moto, même si on commence à s'y faire après une journée pour presque les oublier. Ce sont ces vibrations qui incitent à passer le rapport suivant dès 4.000 tr/mn sans attendre la zone rouge. On ne restera ainsi jamais sur le 2e rapport à 105 km/h mais on sera déjà sur le 4e rapport à cette vitesse. Et puis, on y restera, sauf à vouloir bénéficier des 5e et 6e rapport qui sont plus des overdrive permettant de rouler de façon économique sur long trajet, surtout au prix du litre d'essence. Mais sur départementales, pour bénéficier de tout le peps moteur et sans rester trop longtemps haut dans les tours, on alternera régulièrement entre 3e et 4e rapport.

Freinage

Le frein arrière offre un bon feeling et se révèle largement suffisant pour la ville et un rythme cool sur route. Il apparait efficace tant que l'on reste sous les 70 km/h et au-dessus montre ses limites, tout en ne déclenchant pas l'ABS de façon intempestive. Mais on apprécie vraiment le frein avant et ses deux disques de 310 mm, qui offre un bon feeling et toute la puissance nécessaire. Il n'y a pas trop de mordant mais juste ce qu'il faut pour être efficace sur un freinage d'urgence.

Confort / Duo

Le confort des suspensions est vraiment incroyable pour une moto de cette catégorie, que ce soit en solo ou en duo. Le passager regrettera l'absence de poignée mais ne sentira ni les pavés ni les défauts profonds de la chaussée... de quoi envisager de longues virées.

Consommation

Brixton annonce une consommation de 4.6 litres au cent, qui semble particulièrement optimiste. Il y avait un seul bâton manquant mais après deux cents kilomètres, le dernier baton était rouge et marquait la réserve. On table donc plutôt sur une consommation de 5.5 litres au cent, avec une autonomie de 300 kilomètres avec le réservoir de 16 litres. Une consommation à vérifier sur un essai au long cours avec de vrais conso mesurées à la pompe. A noter, que le bouchon de réservoir n'est pas monté sur charnière (mais a une clef).

Révisions

Les intervalles de révision ont lieu tous les 8.000 km, avec une garantie de 3 ans pièces et main d'oeuvre, versus les deux ans de garantie sur les autres modèles de la gamme.

L'essai en vidéo

Conclusion

Brixton surprend avec une moto aboutie, complète (électronique), homogène, facile de prise en main (même pour un motard en sortie de A2), avec du confort et le tout pour un prix défiant toute concurrence, presque sous la barre des dix mille euros (il faut ajouter 204 euros de frais de transport en fait aux 9.999 euros annoncés). Cela reste 3.500 euros moins cher qu'une Bonneville T120 mais au même prix qu'une Speed Twin 900. Mais çà, c'était au lancement et son prix a été bien augmenté ensuite à 11.499 euros, avec un différentiel de prix moindre qui peut vraiment faire préférer l'original, ne serait-ce qu'à la revente. Et pour ceux qui sont un peu patients, une version Scrambler devrait arriver rapidement avec des échappements en position haute. Sinon, il reste à choisir entre les 3 coloris, gris, noir mat et vert. Il reste un tout petit réseau de seulement 34 concessionnaires et des motos qui décotent bien plus que l'original sur le marché de l'occasion. Mais avec ce prix sur un marché de niche (il ne s'est vendu que 709 T120 en 2021, hors Bobber ou Scrambler), la Cromwell pourrait bien avec son package complet aller grignoter quelques centaines de modèles.

La fiche technique de la Brixton Cromwell 1200

Conditions d’essais

• Itinéraire: petites routes variées + autoroutes interurbaines avec un peu de ville
• Kilométrage de la moto : 200 km