Comment poser le genou par terre

Pilotage : trajectoire, vitesse, position et... contact ! Tous nos conseils pour limer du slider sur piste

Il y a un avant et un après sur circuit : poser le genou ne fera pas de vous le même motard !

Si l'acte est totalement naturel pour un pilote, aux yeux du grand public, poser le genou par terre possède quelque chose de magique, voire d'ésotérique. Le grand public pense en effet qu'il faut être fou, que ça doit faire mal. Bref, le genou par terre, ça fait frémir dans les chaumières.

Mais, au fait, pourquoi mettre le genou par terre ?

Excellente question, qui appelle une réponse analogue à une autre question qui nous renvoie au bon vieux temps : "il est comment, Fonzie ? Fonzie, il est coool". Poser le genou par terre, c'est cool, c'est un petit plaisir personnel qui ne doit rien à personne et qui, au yeux des profanes, vous range définitivement dans la catégorie des chevaliers de la route.

Au-delà de l'apport qu'il procure à l'ego (et qui n'a rien de négligeable), le genou par terre permet deux choses : déplacer le centre de gravité de la machine (dans une courbe prise à vitesse égale par deux machines, celle dont le pilote déhanche devra prendre mathématiquement moins d'angle, ce qui confère plus de sécurité... ou donne du potentiel pour passer encore plus vite) ; le contact du genou avec le sol est également une mesure de la prise d'angle (cette métrologie reste cependant un peu artisanale, puisqu'elle va en partie dépendre de votre morphologie et votre attitude sur la moto). Évidemment, cette mesure fait peu de sens sur la route, où l'on pose rarement spontanément le genou sauf éventuellement dans une courbe régulière de rayon moyen, mais sur piste, cette indication renseigne également sur le rythme tenu.

La recette

Voici maintenant un secret que vous ne devez surtout pas révéler à votre entourage : en fait, poser le genou par terre n'a rien de compliqué. Il suffit juste de suivre la recette : trajectoire, vitesse, position...

Avant d'aller plus loin, rappelons tout de même une évidence : certains motards s'amusent à déhancher alors qu'ils sont en jean, sans slider. Et certains finissent par poser le fameux genou : mauvaise idée, la matière du genou n'étant à l'origine pas conçue pour cet usage. Ça fait des trous dedans, avec des complications du style épanchement de synovie : le genou ne se pose que dans un environnement sécurisé. De préférence, sur la piste, donc.

La Sainte Trinité du slider : trajectoire, vitesse, position...

Un bon posé de genou répond à quelques règles bien précises, mais demande avant tout, de bien saisir la philosophie de l'enjeu. En effet et répétez bien cette phrase jusqu'à l'avoir parfaitement comprise et intégrée, il faut laisser le sol venir à votre genou et non pas insister pour frotter celui-ci par terre. Poser le genou n'est pas la résultante d'un mouvement brutal et d'une modification radicale de votre position de conduite, mais l'aboutissement d'une démarche calculée et cohérente où tous les ensembles ne font plus qu'un : une douce caresse assortie d'un bruit de plastique qui frotte. Voici donc la charade gagnante :

Mon premier, la trajectoire

Sur route, vous naviguez dans un corridor d'à peine 2,5 m de large. Or, la largeur d'une piste est souvent comprise entre 8 et 12 mètres. Ainsi, en utilisant plus de largeur de piste, votre trajectoire va être naturellement plus arrondie, ce qui vous conduit d'abord à pouvoir passer plus vite et ensuite, très naturellement, à prendre plus d'angle.

Mon second, la vitesse

Sauf à vous jeter littéralement en dehors de la moto, vous ne poserez pas le slider en prenant les virages à très faible vitesse (ou alors, par gravité, mais c'est une autre histoire). Ceci étant dit, vous découvrirez qu'il n'est pas non plus nécessaire d'avoir une vitesse supersonique ou de faire des chronos de pilote de GP pour toucher le sol.

Si ça ne touche pas au début, c'est que vous n'allez pas assez vite. Il faut augmenter sa vitesse progressivement et la meilleure façon d'y arriver est de bien décomposer les étapes : bien travailler son regard et analyser les points de freinage, de déclenchement du virage, de point de corde et de sortie de courbe et jeter la moto dans le virage d'un contre-braquage dynamique. Rien qu'en suivant ces règles, vous devriez ne plus être très loin du but. En s'appliquant et en répétant l'exercice, vous allez gagner à la fois en confiance et en précision dans vos trajectoires.

Mon troisième, la position

Attention, voici la séquence "Véronique et Davina" : poser le genou demande un peu de souplesse et si vous restez raide comme un passe-lacet, vous risquez non seulement de ne pas toucher le fameux slider mais en plus de vous mettre par terre en prenant trop d'angle.

Examinons donc ce que doit faire votre corps pour atteindre cet état de grâce, de bas en haut :

• Les pieds : position "en canard" absolument interdite (d'autant, qu'en plus, c'est moche et ridicule). Des deux côtés, la pointe des pieds se pose sur la pointe des repose-pieds. A l'intérieur, cela vous donnera du bras de levier (devrait-on dire du "pied de levier" ?) supplémentaire pour incliner la moto ; à l'extérieur, cela vous permettra de positionner votre jambe un peu plus haut, donc à la fois de vous caler sur le réservoir avec le genou et sur le cadre avec le talon.
• Cuisse et bassin : les cuisses sont souples et le bassin n'est pas collé au réservoir. Sinon, votre corps ne pourra pas pivoter autour de la moto et vous allez vous retrouver avec une position de conduite de crapaud absolument grotesque et pas efficace (exception à cette théorie : le pilote australien de GP 500 Mick Doohan et son style pas académique). Il faut donc laisser quelques centimètres entre le bassin et le réservoir, afin de pouvoir plus facilement pivoter autour de la moto.
• Les hanches : elles restent perpendiculaires à la moto, elles ne pivotent pas. Quand le virage arrive, décalez votre corps d'une demi-fesse vers l'intérieur.
• Le genou : souple, ouvert...
• Le buste : pas trop collé sur le réservoir, car sinon cela va bloquer la souplesse du haut du corps qui, figurez-vous, a aussi un rôle à jouer...
• La tête : elle accompagne le mouvement global dans une grande fluidité. Au-delà du posé de genou, l'objectif de l'opération est d'aller vite. En tant que porteuse des yeux (!), la tête du pilote montre que celui-ci se projette déjà dans la suite de la mission : sortir de la courbe, réaccélérer. La tête n'est donc pas figée, raide, au-dessus du corps, mais accompagne le mouvement en étant une extension de la posture de la moto
• Les coudes : le coude extérieur constitue un nouveau point d'appui sur le réservoir ; le coude intérieur est plié et pointe vers le sol, car cela participe à la baisse du centre de gravité, donc à gagner en vitesse et en stabilité.

Mon tout, le momentum

Et c'est ainsi que la montagne accouche d'une souris : ce qui semblait insurmontable devient en fait très naturel. Une bonne trajectoire, une vitesse raisonnablement appropriée, une entrée en virage dynamique, une position souple et fluide et à vous le respect de vos coreligionnaires grâce à vos sliders tout râpés.

Maintenant, si vous vous faites une gloire de passer plusieurs secondes avec le slider qui frotte dans chaque virage, nous avons une double mauvaise nouvelle pour vous : un, ça va vous coûter cher en sliders et deux, si vous regardez attentivement les pilotes de GP et de WSBK, vous constaterez qu'ils posent finalement assez peu le genou et se contentent d'une touchette au point de corde.

Morale de l'histoire : si vous frottez fort longtemps, cela veut dire que vos trajectoires sont trop arrondies et que vous pouvez gagner du temps en rétrécissant les phases neutres, en déclenchant le virage plus tard et en réaccélérant plus tôt. De fait, vous découvrirez que vous pouvez aller encore plus vite et que l'étape d'après le genou, c'est la bout de la botte et le repose-pieds qui frottent. Quant au coude, voire l'épaule, c'est une autre histoire...

Plus d'infos sur le posé de genou par terre

• Tous les conseils