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Val d'Anniviers

L'intemporel au service de vos sens

De Sierre, la "ville aux cent collines" posée sur les rives du Rhône aux villages centenaires sobres, rustiques et charmeurs, le Val d'Anniviers constitue une étape sauvage incontournable. Randonnées pédestres et à VTT offrent un point de vue permanent sur une nature puissante est préservée. Encaissés, ses vallons sont ceinturés de sommets de plus de 4.000 m formant la Couronne Impériale : Bishorn 4’156m, Weisshorn 4’505m, Zinalrothorn 4’221m, Cervin 4’477m, Obergabelhorn 4’063m et Dent Blanche 4’358m. Cette coiffe de roche et de glace contraste avec les alpages plus doux, mais peu accessible qu'elle domine. Ici plus qu'ailleurs, la présence humaine est le fruit d'un rude labeur et d'une passion pour les défis du quotidien. En témoigne la commune de Chandolin perchée à 2.000m, un des villages les plus hauts d’Europe habité annuellement. La population était liée par le nomadisme et la culture de la vigne. Les gens d’Anniviers, dont le nom signifierait "en chemin toute l’année", voyageaient au fil des saisons entre leurs mayens dans les alpages de la vallée et les coteaux de la plaine du Rhône.

Découverte du Val d'Anniviers

Je contribue très modestement à cette histoire par mon nomadisme motorisé qui propose bien d'autres avantages sur les routes tourmentées menant au Val d'Anniviers. Tantôt à flanc de falaises, tantôt au coeur de forêts d'épicéas, les voies d'accès sont des plus variées, amenant soudain l'équipage vers d'étroites vallées où s'accrochent de sombres chalets. Les lacets se succèdent pour se délier ensuite sur un plateau escarpé à l'approche du barrage de Moiry. L'ouvrage semble barrer la route de ses 158 mètres de haut. Impressionnant, il forme surtout une splendide retenue d'eau, bordée d'une route menant au pied du glacier et d'un petit lac glacière. Cimes immaculées étincelantes, sommets saupoudrés d'une neige récente et alpages encore verts composent un écrin pour ces joyaux liquides. Le froid en gèle déjà, par endroit, la surface aux eaux turquoise. Ces merveilles naturelles en annoncent une autre, architecturale cette fois.

La retenue d'eau du barrage de Moiry

Un peu plus bas, le village de Grimentz arbore sa remarquable simplicité, gage de son authenticité. Epargné des feux destructeurs des siècles durant, il s'offre au visiteur sous sa forme originelle. Les plus vieilles constructions datent du XIIe siècle et s'échelonnent le long d'une rue principale ouvrant parfois sur d'étroites ruelles. D'agréables places agrémentent le village, intégrant parfois des fontaines et sculptures en bois animées par l'eau. Comme à Evolène ou aux Haudères, le principe d'élévation suit les besoins d'espace, structurant discrètement les façades de différences centennales.

Le village de Grimentz

Balcons, escaliers extérieurs et décorations diverses attestent d'une maitrise remarquable de la construction tout bois. Seules les fenêtres témoignent du passage d'une modernité contenue. Elargies, ces ouvertures apportent désormais un peu plus de lumière. Hors ces commodités, l'aspect extérieur des demeures est inchangé, élégantes bâtisses de bois noircis par le soleil, solidement ancrées sur leur socle de pierre. Les plus anciens chalets témoignent du rude labeur d'un temps révolu, arborant des poutres dont les surfaces, taillées à la hache, diffèrent sensiblement de réalisations plus tardives où la mécanisation uniformise déjà le travail.

Les décorations sont nombreuses sur les façades du village

Au bout du village, on trouve d'ailleurs une scierie fonctionnant encore à la force de l'eau. Autre détail, une découpe rectangulaire formant opercule est visible en partie basse, donc ancienne, sur certaines maisons. C'était une ouverture escamotable pour laisser sortir l'âme des défunts…

La scierie fonctionne encore à la force de l'eau

Ainsi ralliaient-elles plus facilement l'église toute proche, aux tombes identiques et simples, sans maçonnerie. Une croix et un amas de terre en cachent ainsi les caveaux, rappelant à chacun l'égalité dans la mort. Edifié à l'origine en 1831, le monument ecclésiastique actuel date de 1950 et s'est enrichi de vitraux modernes et contemporains. Les premiers, dans la nef, sont de l'artiste Paul Monnier, parfaits exemples d'une modernité soucieuse d'une intégration rurale. Les seconds renouvellent le choeur depuis 1989 sur les thèmes de l’eau et du feu, conçus et réalisés par Christine Crittin-Rion, habitante du village.

Edifiée à l'origine en 1831, l'église actuelle date de 1950

Mon guide, Jean Vouardoux, éminent doyen de cette commune helvétique, m'entraine ensuite vers un solide bâtiment de 1550 en pierre, faisant face à d'antiques greniers typiques. C'est là le siège de la Bourgeoisie locale. Particularité suisse, cette appellation possède une signification bien différente de celle que nous connaissons. C'est plutôt un club veillant à la conservation du patrimoine qualité de la vie sociale du village. Chaque citoyen suisse est bourgeois d'une ou de plusieurs communes. Et dans le canton du Valais, fier de ses traditions, il existe encore de nombreuses bourgeoisies actives. A l'étage, une vaste pièce d'un autre âge sert aux réunions où de longues tables accueillent les membres. Cependant, il faut avoir fonction d'autorité (militaire, président, députés, juges…) pour s'assoir à la Grande Table et faire offrande d'une channe en étain. Objet singulier, ces nombreuses cruches ouvragées ornent en effet les murs de la vénérable pièce. L'une d'entre elles est signée du nom de mon guide et celui-ci est également le caviste des lieux.

La salle de la Grande Table est ornée de channes en étain

Car le vaste sous-sol de la bâtisse abrite une vénérable cave renfermant des futs de chêne de 900 à 1.300 litres. Cultivé en plaine, un vin acide, la Rèze, était transporté dans les villages dans des fûts de mélèze. L'une de ces barriques, amplie en 1886, se reconnait à ses parois taillées à la hache, contrairement aux autres qui ont été sciées. Il contient donc une rèze originelle mythique, hors du commun, appelé Vin des Glaciers ou Glacier. Il était d'usage d'en réserver un tonneau à l'attention de l'évêque qui, lors de ses visites, en ponctionnait le volume. SI l'ecclésiastique se fait désormais rare et a perdu son exclusivité, on ne l'ouvre toujours qu'en de très rares occasions. Mais, afin que le vin se conserve dans les meilleures conditions, il faut donc annuellement compléter le niveau. Toutefois, de savants calculs prouvent qu'il reste encore 15% du breuvage originel dans cette barrique plus que centenaire. Cet alcool délivre une gamme de saveurs proches de celles d'un cépage du Jura typé nommé Savagnin. Oxyde, importantes nuances d'épicéa et de noix composent une signature olfactive et gustative hors norme. De ce vin, une charte en définit le profil : il doit être composé d’un cépage acide (rèze, ermitage), mûrir au-dessus de 1.200 mètres et être conservé en tonneau (traditionnellement en mélèze). Du plus jeune au plus vieux, on transvase le vin de tonneau à tonneau. La protection de l'appellation permet d'en assurer le respect de l'histoire et de la tradition.

Dégustation de Rèze dans les caves de Grimentz

Pour achever cette immersion en terroir authentique, je me suis régalé d'une véritable raclette valaisanne au feu de bois. Bien connu en Savoie et Haute-Savoie, ce plat est pourtant bien d'origine valaisanne. La douceur du fromage suisse fait d'ailleurs la différence, ainsi que son original goût délicieusement fumé. On citera à nouveau à l'honneur les vins de la région, regroupés en une appellation latine : Vinum Montis, soit "le vin originaire de la montagne". Cette définition caractérise pleinement la région viticole de Sierre, Salgesch et Environs, au pied du Val d’Anniviers.

Une raclette au feu de bois dans la plus pure tradition valaisane

Et c'est alors que prend fin ce nouveau périple en terre de traditions, d'histoire et de saveurs authentiques. Multiple, le Valais sait agencer ses facettes contrastées pour composer un passionnant ensemble au caractère affirmé et au charme sans concession. Entier, riche de coutumes et savoir-faire séculaires, le canton adoucit l'aridité de ses hautes montagnes par les grâces de ses flancs plongeant sur la sereine vallée du Rhône. Enfin, modernité et passion du patrimoine s'associent à une gastronomie remarquable, bien loin des clichés montagnards, sachant mettre à profit les ressources locales. A la recherche d'un espace où vous ressourcer en profondeur, où chaque route est une suite de méandres suivant ceux de l'histoire? Le Valais est à votre disposition.

Le Roadtrip du Valais

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